Le mythème de la colonne cosmique qui relie les enfers du monde chtonien au paradis céleste via le cratère et le corps d’un volcan est présent dans de nombreuses civilisations, en Indonésie, en Amérique du Sud, sur les hauts plateaux d’Afrique de l’Est…Mais singulièrement pas au Japon, où toute allusion mythologique au volcan semble absente des textes classiques ou les peintures anciennes.
En revanche, à l’époque moderne (avec Shiga Shigetaka ou dans les estampes par exemples), l’image du volcan, entraînée par celle du mont Fuji, acquiert une visibilité croissante. Plus concrètement, à l’époque contemporaine, le volcan actif sert parfois de pilier à un renouveau des communautés rurales et (sur)insulaires qui l’entourent. Non pas l’unique pilier, mais un pilier efficace, dans le sens où il contribue à déclencher effectivement du développement, des activités, des rencontres. La position périphérique et « faible » des espaces concernés, comparativement au poids de la mégalopole, rend ce développement parfois inaudible dans les statistiques nationales, et sa quantification, qui reste à établir, passe sans doute par des approches détournées et une attention minutieuse aux échelles en jeu. Pour Yatabe520, c’est très net :
‘« La vitalité des collectivités locales – mesurée en termes de capacité à maintenir un solde positif dans la balance des entrants et des partants – ne se trouve aujourd’hui corrélée ni au nombre d’habitants, ni à l’existence de dessertes routières, ferroviaires ou aériennes, ni même à la présence d’une infrastructure industrielle […] celles qui, envers et contre tout, ont su préserver leur mode de vie et leur environnement assurent aujourd’hui leur autonomie ».’Il n’y aurait donc pas de fatalité, ni de la petitesse démographique, ni de l’éloignement du centre, et il est fondé d’aller observer localement comment le volcan peut contribuer à cette vitalité.
À l’échelle d’ensemble, les éruptions majeures, traumatisantes pour la population qui doit évacuer, tendent à accélérer le dépeuplement périphérique qui progresse toujours dans l’archipel. Il n’en reste pas moins que la dynamique qu’on observe ici ou là autour des volcans actifs est ambitieuse. Noguchi, l’alpiniste leader du nettoyage citoyen du Fuji-san, affiche la couleur sur le bandeau de son site internet officiel, avec ce slogan : Fuji kara Nihon wo kaeru 富士から日本を変える, « changer le Japon depuis le Fuji »521.
Yatabe Kazuhiko (2006).
http://www.noguchi-ken.net/message/index.html.