B) The West Wing, dans les coulisses du pouvoir à Washington

« Une fiction télévisée dans laquelle il serait question d’un président de la République, de ses conseillers les plus proches, de la vie quotidienne à l’Élysée et des arcanes de la politique nationale. En France, une telle éventualité est impossible ». Dans ses écrits sur les séries télévisées américaines, Martin Winckler est un des premiers à vanter en France les mérites de cette série politique, explicitement politique même (2005). Dans notre pays, les fictions abordant le pouvoir présidentiel se résument à quelques romans policiers (Meurtre à l’Elysée) ou de politique-fiction - même s’ils sont écrits sous pseudonyme par d’anciens proches du pouvoir - ou à des pièces de théâtre de boulevard (Reviens dormir à l’Elysée), et les réalisations cinématographiques (Le bon plaisir) qui tentent de mettre à mal l’image du chef de l’Etat se comptent sur les doigts d’une main (Président, le film de Lionel Delplanque sorti en 2006). 

 En Amérique, où rien n’est si sacré qu’on ne puisse le représenter - et, par conséquent, le critiquer - les films et romans mettant en scène le président des Etats-Unis dans des situations à peine imaginaires ne se comptent plus. Depuis les années 60, le drame politique (Fail-Safe, avec Henry Fonda) côtoie la comédie romantique (The President and Miss Wade, avec Michael Douglas) en passant par la satire la plus destructrice (Dr Strangelove/Dr Folamour de Stanley Kubrick ou, plus récemment, Wag the Dog/Des hommes d’influence de Barry Levinson). Sur les grands écrans, le président des États-Unis a toujours été un personnage comme les autres. Ce n’était pas vrai à la télévision, non par auto-censure (les chaînes américaines ayant toujours été privées, elles n’ont jamais hésité à interpeller le pouvoir) mais sans doute parce que la fonction du président semblait mieux se prêter à des documentaires biographiques (d’Abraham Lincoln à George Bush en passant par J. F.Kennedy) et à des téléfilms centrés sur un événement cathartique. Depuis bientôt sept ans, pourtant, le président des États-Unis et son entourage rapproché font partie de la vie quotidienne des Américains, grâce à une série hebdomadaire « exceptionnelle » : The West Wing / À la Maison Blanche.

L’exemple le plus révélateur de la volonté « réaliste » de la série est la diffusion au cours de la troisième saison de la série aux Etats-Unis, le 24 avril 2003, d’un documentaire « spécial », consacré aux acteurs « réels » de la Maison-Blanche. On pouvait y voir des interventions de Léon Panetta, Dee Dee Myers, Henry Kissinger ou bien encore des anciens présidents Jimmy Carter, Gerald Ford et Bill Clinton. Cette « célébration » par les producteurs de la série montre la volonté de coller aux problèmes quotidiens des professionnels de la politique, et plus particulièrement de l’équipe personnelle du président. Qu’est-ce que nous dit cette série sur ce quotidien-ci ? Vient-elle valoriser la définition classique du politique ?