Emmanuelle, F/26 – Interne en médecine/Maîtrise/en couple

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Je suis un peu indignée par les nouvelles séries médicales. Comme Scrubs ou Nip/Tuck. Les médecins sont de vrais imbéciles qui détestent leur métier et l’environnement qui va avec. J’imagine qu’un adolescent qui les regarde avec attention ne souhaitera faire médecine que pour l’argent. C’est terrifiant.

Entretien

A) Qu’est-ce qui, selon vous, dans cet épisode, s’éloigne le plus indiscutablement de la réalité ?

J’en avais déjà parlé avec vous. J’ai l’impression qu’à force de regarder ces séries, les téléspectateurs peu informés croient dur comme fer au milieu qu’on leur présente. Mon milieu professionnel, la médecine est complètement desservie par une fiction comme Urgences. J’imagine qu’il en est tout autant pour la Maison-blanche. Tout le monde va croire que c’est la réalité qui est dessinée à l’écran, alors que je suis prête à parier que les gens qu’on croise dans ces émissions sont « extraordinaires ».

B) Y a-t-il un personnage de la série qui vous paraît plus caricatural que les autres ?

Ce n’est pas facile de répondre. Je pense comme ça à la femme du président. Dans notre imaginaire, la première dame reste silencieuse et garde ses réflexions pour des sujets non polémiques lorsqu’elle s’adresse aux journalistes. Dans la série, elle se moque bien de ce que son mari vient de dire, elle parle sans conseillers aux enfants.

C) Pensez-vous que le discours mis en scène dans cet épisode se rapproche des idées d’un parti politique existant aux USA et/ou dans le reste du monde ?

Ça ressemble à ce que des démocrates pourraient dire, mais je ne suis pas une experte. Les socialistes français seraient moins interventionnistes à mon avis, et la droite moins pédagogique dans son discours.

D) Etes-vous en accord avec les arguments développés par chacun des personnages de la série en matière de politique intérieure et extérieure ? Si non, quelles sont vos divergences ?

Je trouve qu’ils font des raccourcis exagérés. Comparer les terroristes aux Ku Klux Klan, aux nazis et aux gangs, les scénaristes en font un peu trop. Je partage leur haine du terrorisme, mais ça paraît évident.

E) Pourriez-vous voter pour une équipe présidentielle semblable à celle mise en valeur dans cet épisode de « The West Wing » si celle-ci se présentait à une élection dans la réalité ?

Non. Je me dirais que leur gentillesse ne pourrait que masquer quelques défauts graves. L’élégance n’excuse pas tout, et puis ils sont tellement jeunes.

F) Cet épisode montre bien le caractère pédagogique insufflé par les créateurs de la série. Qu’avez-vous retenu de cet épisode ? Une telle fiction politique est-elle, à votre avis, imaginable en France ?

Je crois que la France a essayé de faire une réalité-fiction politique récemment et c’est Raffarin qui a mis fin au projet lancé, bien évidemment, par TF1. On voit tellement les politiques à la télévision, je ne pense pas qu’il faille leur donner en plus un programme de fiction, même contradictoire.

G) Quelles sont les différences entre votre vision des hommes politiques et celle développée dans le cadre de cet épisode par les scénaristes de « The West Wing » ?

L’expérience est un mot-clé en politique. Mon frère s’est lancé dans la profession depuis une demi-douzaine d’années, je commence à apprendre des choses sur le milieu. Je sais aussi qu’on n’accède pas à des postes aussi importants si jeunes, et la série démontre là un excès de jeunisme regrettable.

H) Si les élections présidentielles françaises, prévues pour 2007, se déroulaient aujourd’hui, quel homme politique serait votre favori pour remporter le scrutin national ?

Je voterais pour le Premier ministre actuel (Dominique de Villepin) s’il se présentait. Il est passionné et c’est un souffle nécessaire aujourd’hui. Il faut trouver une voie pour demain et il faut le faire avec conviction et efficacité. Je ne veux pas prêcher, j’y crois simplement. J’ai la foi.

I) Pouvez-vous imaginer une influence quelconque de cette série américaine sur l’opinion publique, américaine ou française ? Vous a t-elle influencée politiquement ? Développez s’il vous plaît.

Tromper. La série trompe les spectateurs sur la marchandise. Ils se disent sûrement « voilà comment tout ça se passe » et puis ils gardent cette image pour un moment. En découlent tous les contresens de notre génération. Tous ceux qui croient savoir parce que quelqu’un à la télévision le leur a dit.

J) Existe-t-il un programme télévisuel qui vous semble plus à même de contribuer à l’éducation politique des téléspectateurs ? Si oui, lequel ?

Je regarde peu la télévision, mais je pense que la chaîne France 5 est un bon début. Elle devrait justement élargir ses programmes à la politique, aux institutions, il y a tant à faire sur le sujet. Il y a aussi l’émission de Christine Ockrent sur France3, celle qui parle d’Europe, je la trouve convaincante, à la fois sur le plan des invités et sur le plan des interviewers.

K) La télévision joue-t-elle, à votre avis, un rôle d’éducateur en matière politique ? Comment s’y prend-elle alors ?

Forcément. Je ne sais plus combien de temps en moyenne on passe devant la télévision, mais c’est effrayant, alors de là à dire qu’elle nous éduque, il n’y a qu’un pas. Je pense que c’est d’autant plus vrai pour les jeunes. Ils sont trop attirés par les paillettes. Je ne suis pas vieille, mais j’ai fait le deuil il y a longtemps du plaisir donné par les divertissements.

L) D’une manière générale, le réalisme à la télévision vous semble-t-il dangereux pour le regard des spectateurs?

Cela devient dangereux quand on se comporte encore comme des enfants après la majorité. La télé-réalité est abrutissante et avilissante. Pour les femmes encore plus. Les images de femmes vulgaires et simplistes sont partout. C’est dangereux pour l’avenir.