3.2 Caractéristiques de la personne de référence.

Parmi les autres déterminants de la pauvreté, la catégorie socioprofessionnelle du chef de ménage joue un rôle très important. En réalité, la pauvreté touche en premier lieu les ménages dont le chef est un actif sans travail. En effet, le travail constitue l’actif principal à la disposition de beaucoup de famille. Pour les inactifs (hormis les retraités), le taux de pauvreté enregistré est de 61.26 %.

D’autres catégories socioprofessionnelles semblent très touchées par la pauvreté53 : 27.97 % des agriculteurs exploitants ; 17.47 % des employés et 16.84 % des ouvriers. La pauvreté parmi la catégorie “des artisans, commerçants et chefs d’entreprises et professions libérales” est non moins importante vue que le taux avoisine les 13.5 %. Pour le reste de la population le ratio de pauvreté ne dépasse pas 5 % pour les professions intermédiaires et 1.78% pour les cadres supérieurs (tableau 9). La situation est très différente aujourd’hui, par rapport à ce qu’elle était il y a 30 ans où les retraités étaient sur- représentés, alors que la pauvreté aujourd’hui frappe plus fortement les jeunes54.

La situation des ‘agriculteurs exploitants’ se dégrade essentiellement pour les familles monoparentales (66,67% de cette catégorie sont pauvres) ainsi que les ménages dont la personne de référence est âgée de plus de 60 ans (58,33 % disposent d’un revenu inférieur au seuil de pauvreté monétaire). Dans la même catégorie socioprofessionnelle, les couples sans enfants se trouvent dans une situation plus favorable vu que le taux de pauvreté ne dépasse pas 5%. La même remarque s’applique pour les catégories d’employés et d’ouvriers. Selon la tranche d’âge du chef du ménage, nous remarquons que les personnes âgées de plus de 60 ans sont en moyenne plus pauvres et ce pour toutes les catégories socioprofessionnelles. Pour les employés, les personnes âgées de moins de 30 ans connaissent un taux de pauvreté supérieur comparativement aux autres catégories d’âge.

Les tableaux 12 et 13 confirment l’évidence selon laquelle le taux de privation diminue avec le niveau de l’instruction et le sexe de personne de référence. D’un côté, 36.36% des personnes sans aucun niveau d’instruction vivent en dessous du seuil de pauvreté alors que cette proportion ne dépasse pas les 3.23 % pour les ménages dont la personne de référence a poursuivi des études d’enseignement supérieur ou des études techniques supérieurs. D’un autre côté, pour les ménages conduits par des femmes le taux de pauvreté est de 16 % alors qu’il est seulement de 9.26 pour le ménage dont le chef est de sexe masculin.

Si nous considérons le sexe de la personne de référence, nous constatons que le taux de pauvreté augmente de 9,26% pour les ménages dont le chef est de sexe masculin, à 16,01% pour ceux dont le chef est de sexe féminin. Ce constat devient d’autant plus inquiétant au regard de la proportion des ‘ménages féminins’ qui vivent sous le seuil de 60% du revenu médian. Cette proportion arrive à 29,82% pour les ménages dirigés par des femmes, alors qu’elle se situe à 15,64% pour les ménages dirigés par des hommes.

“Cette disparité s’explique sans doute par le fait que les femmes sont majoritaires parmi les familles monoparentales ou parmi les personnes âgées n’ayant pas travaillé en permanence tout au long de leur vie active.” 55

Si nous explorons les caractéristiques des femmes chefs de ménages, nous remarquons que les ménages dirigés par des femmes sont soit des ménages unitaires soit des familles monoparentales. Or ces deux catégories affichent des taux de pauvreté plus élevés comparativement aux autres types de ménages. Toutefois, si nous considérons uniquement les personnes seules, les femmes sont moins exposées à la pauvreté monétaire. Ainsi, 12,55% des femmes seules disposent d’un revenu inférieur au seuil de pauvreté, alors que pour les hommes cette proportion arrive à 14,17%. Le taux de pauvreté, pour les ménages unitaires diminue considérablement pour la catégorie d’âge 30-59 ans, et se situe à 9,32% pour les femmes et 12,41% pour les hommes. La tranche d’âge la plus touchée (âge de la personne de référence) est essentiellement la tranche de moins des 25 ans (tableau 15).

Pour les familles monoparentales, la mesure de pauvreté est de 24,93% pour les ménages dirigés par des femmes et 14% pour ceux dirigés pur des hommes. La différence entre les taux féminins et masculins est très claire pour toutes les tranches d’âge et semble plus prononcée pour les personnes âgées de moins 30 ans où le taux des ménages monoparentales pauvres et dirigés par une femme arrive à 60%. Pour les familles dont la personne de référence est à l’âgé de la trentaine, la mesure de la pauvreté est de 34,28% pour les femmes et 11,11% pour les hommes. Cependant, Il faut noter que 88,3% des familles monoparentales ont à leur tête une femme.

Selon les classes socioprofessionnelles, nous remarquons que l’incidence de la pauvreté pour les ménages ayant à leur tête une femme est plus élevée que celle enregistrée pour les ménages dirigés par des hommes. La différence entre les taux féminins et masculins s’accentue pour la catégorie d’agriculteurs exploitants, celle des professions libérales ainsi que pour les employés (Tableau 14). A titre d’exemple, le taux de pauvreté pour les ménages dont la personne de référence est une femme agriculteur est de 53,33%. Par contre, pour les ménages masculins de même catégorie Socioprofessionnelle, la pauvreté est de 24,27%.

La catégorie socioprofessionnelle de la personne de référence du ménage peut aussi expliquer la différence entre les taux de pauvreté féminins et masculins. D’abord, les femmes chefs de ménages sont plus représentées dans les catégories de retraités, d’employés et d’inactifs.

Notes
53.

L’existence d’une catégorie de travailleurs pauvres constitue un phénomène de plus en plus remarqués : “en France, comme dans plusieurs pays de l’Union Européenne une catégorie de travailleurs pauvres est apparue dès la fin des années quatre- vingt- dix. De plus en plus de ces travailleurs pauvres sont salariés, qu’ils soient pendant l’année en emploi continu ou de façon intermittente.Le rapport de l’ONPES (2006, page 11). Un travailleur pauvre est une personne active, durant au moins la moitié de l’année de référence, qui a occupé un emploi pour au moins un mois et qui vit dans un ménage identifié comme pauvre.

54.

D’après le rapport de l’ONPES (2006) : “le visage de la pauvreté a considérablement changé depuis les années 1970 en France: initialement essentiellement composée de retraités, la population pauvre s’est progressivement concentrée parmi les plus jeunes générations” (page 31). Voir aussi Sandretto (2008).

55.

R. Sandretto (2008).