5.2 Résultats et interprétations

Dans ce paragraphe nous exploitons les données issues du dispositif EPCV et plus précisément les données relatives à mai 2002. Nous rappelons que cette enquête de mai 2002 est réalisée auprès de 5739 ménages répartis sur toute la France métropolitaine. Les caractéristiques de ces ménages ont été présentées dans le premier paragraphe de cette section.

Les résultats de l’estimation du modèle logit multinomiale reproduisent la probabilité d’appartenir à un quartile de revenu donné par rapport à certaines variables indépendantes retenues. Avant d’évoquer les variables retenues, il est utile de noter que nous avons choisi de regrouper les pauvres dans la première catégorie.

Ainsi :

Les variables explicatives retenues rendent compte de i) le taille du ménage ii) le type du ménage : couple avec/sans enfant, familles monoparentales iii) caractéristiques de personne de référence : âge et sexe, l’état civil, le niveau d’instruction, la catégorie socioprofessionnelle v) la région de résidence.

Tout d’abord, les résultats du tableau 20 montrent que la taille du ménage a un effet négatif sur la probabilité d’être localisé dans la partie supérieure de la distribution. En effet, le coefficient relatif à la variable taille du ménage est négatif. Alors que l’effet marginal de la première classe (pauvres) est positif, cet effet est négatif pour la dernière classe (riches). En d’autres termes, l’augmentation de la taille du ménage entraîne un risque d’appartenance à une catégorie inférieure de revenu par unité de consommation.

Pour le type du ménage, nous notons que comparativement aux ménages unitaires, les autres types de ménages ont, plus de chance d’échapper à la pauvreté, même si le coefficient attribué aux familles monoparentales n’est pas important. Ceci confirme les résultats que nous avons déjà présentés et qui montrent que les personnes seules et les familles monoparentales sont plus exposées à la pauvreté monétaire comparativement autres types de ménages.

Ensuite, il apparaît que les caractéristiques du chef du ménage influence la probabilité d’être pauvre. En premier lieu, la relation probabilité d’être non pauvre - âge prend la forme de U inversé qui atteint son maximum à la cinquantaine. La pauvreté touche donc de manière plus sévère les personnes jeunes. Les résultats officiels vont dans la même direction. Ainsi, le rapport de l’ONPES 2005-2006 précise que :

“La population pauvre est plus jeune que la population totale : les moins de 25 ans sont surreprésentés parmi les individus considérés comme pauvres par rapport à leur place dans la population française dans son ensemble” 60 .

En second lieu, le sexe de la personne de référence influence le niveau de vie des ménages. Les ménages ayant à leur tête des femmes auraient moins de chance d’être localisés dans la partie supérieure de la distribution du revenu. L’effet marginal de la première partie de la distribution est aussi positif ce qui augmente la probabilité d’appartenir à la classe des pauvres. A ce niveau, il faut retenir deux points essentiels :

i. Les femmes chefs de ménages sont majoritairement présentes dans les groupes les plus touchés par la pauvreté : les familles monoparentales et les personnes âgées et vivant seules.

ii. A des conditions familiales et professionnelles égales, la situation des femmes n’est pas très différente de celle des hommes.

Pour le rapport ONPES la différence homme- femme est un phénomène ‘relativement structurel’ :

“La plus grande pauvreté des femmes ne se vérifie toutefois pas à situation familiale ou professionnelle donnée. Elle s’explique donc essentiellement par un effet de structure, les femmes étant largement majoritaires parmi les chefs de famille monoparentale, ou les personnes âgées vivant seules et n’ayant jamais travaillé. D’autres éléments, liés à la situation des femmes sur le marché du travail, permettent d’expliquer cet écart : écarts persistants de salaire avec les hommes, prépondérance des femmes (80 %) parmi les travailleurs à bas salaire” 61 .
Tableau 201: Régression logit ordonné des déterminants du niveau de vie des ménages en France (2002).
Variables Coefficient t-student Effets marginaux
Pauvres Riches
Taille du ménage -0,671* (-16,23) 0,038 * -0,102 *
Type du ménage (1)
Couple sans enfant 1,764* (16,35) -0,078 * 0,327 *
Couple avec enfant 1,933* (12,81) -0,094 * 0,344 *
Familles monoparentales 0,353* (2,84) -0,0177 * 0,0585 *
Autres 1,220* (5,39) -0,043 * 0,248 *
Caractéristique de la P.R
Age            
de 30 à 39 ans 0,666* (6,38) -0,032 * 0,114 *
de 40 à 49 ans 0,922* (8,51) -0,042 * 0,164 *
de 50 à 59 ans 1,142* (10,46) -0,049 * 0,210 *
de 60 à 69 ans 0,475* (3,08) -0,023 * 0,0798 *
de 70 à 79 ans 0,300** (1,82) -0,015 * 0,0487 **
80 ans et plus 0,468* (2,57) -0,022 * 0,0807 *
Femme -0,343* (-3,79) 0,021 * -0,049 *
État matrimonial (2)
Divorcé 0,673* (6,2) -0,0314 * 0,117 *
Veuf 0,282* (2,9) -0,015 * 0,0458 *
Niveau d'instruction (3)
2ème cycle d'enseignement général 1,188* (12,63) -0,046 * 0,232 *
Enseig, tech. Ou professionnel. court 0,882* (12,93) -0,043 * 0,151 *
Enseig, tech. Ou professionnel. Long 1,439* (11,78) -0,049 * 0,298 *
Enseig. Supérieur 1,876* (21,31) -0,074 * 0,366 *
Catégorie Socioprofessionnelle (4)
Artisans, commerçants, chefs d'entreprises et professions libérales 1,015* (4,79) -0,04 * 0,196 *
Cadres supérieurs 2,247* (11,02) -0,069 * 0,475 *
Professions intermédiaires 1,274* (6,62) -0,051 * 0,245 *
Employés 0,534* (2,76) -0,0259 * 0,091 *
Ouvriers (y compris les ouvriers agricoles) 0,545* (2,91) -0,027 * 0,091 *
Retraités 1,208* (5,81) -0,059 * 0,208 *
Autres inactifs -0,622 (-2,22) 0,046 ** -0,077 *
Région (5)
Région parisienne 0,908 (8,03) -0,0409 * 0,163 *
Bassin parisien 0,122 (1,12) -0,007   0,019  
Est 0,445* (3,63) -0,022 * 0,075 *
Ouest 0,116 (1,03) -0,0064   0,0181  
Sud-ouest -0,041 (-0,35) 0,0024   -0,006  
Centre- est 0,331* (2,8) -0,017 * 0,0543 *
Méditerranée 0,119 (1,02) -0,006554   0,0185  
Nombre d'observation = 5739
LR chi2 = 2752,7
Pseudo R² = 0,1462
Log Vraisemblance = -7627,87
(1) base personne seule (2) base célibataires et mariés (3) base sans instruction, études primaires et niveau inférieur au premier cycle d'enseignement générale (4) base agriculteurs exploitants (5) base région Nord

Nous remarquons aussi que les célibataires et les mariés affichent un risque de pauvreté moins élevé comparé aux ménages dont la personne de référence est veuve ou divorcée.

Le niveau d’instruction du chef de ménage joue un rôle important dans la situation de pauvreté, puisque les ménages conduits par une personne, dont le niveau d’éducation est inférieur au premier cycle de l’enseignement général, ont un risque de pauvreté plus important que les autres ménages. L’effet marginal d’appartenir au quartile des riches est le plus élevé pour les ménages ayant à leur tête une personne de niveau d’instruction supérieur.

Le tableau A1 montre également que les ménages ayant à leur tête un agriculteur exploitant (ou inactif) ont relativement plus de risque de résider dans le segment des pauvres. Pour les autres catégories, un regard sur les effets marginaux permet de constater que ces catégories ont, comparativement aux agriculteurs exploitants, plus de chance de se localiser dans le quartile des riches. Cet effet est d’autant plus important pour les cadres supérieurs, les professions intermédiaires et les retraités.

Pour la région de résidence, nous avons choisi comme région de base celle du Nord dans la mesure oùle taux de pauvreté dans cette région est le plus élevé. Les résultats de la régression sont de nature à confirmer les calculs établis. Les ménages résidants dans les régions : Est et la région parisienne, ont plus de chance d’échapper à la pauvreté et aussi d’être localisé dans le quartile le plus riche. Par contre, les paramètres attribués à la région du sud ouest montrent que cette région est plus touchée par la privation.

Notes
60.

Rapport ONPES (2006, page 30)

61.

Rapport ONPES (2006, page 30)