3.2.2 Données et Résultats

Les données utilisées ici sont issues de l’enquête Permanente sur les Conditions de vie des ménages (EPCV) de Mai 2002. Les caractéristiques des l’échantillon ont été présentées au cours du premier chapitre. Nous rappelons que pour le revenu, nous disposons seulement de la catégorie du revenu auquel appartient le ménage. Pour cette raison nous avons calculé, pour chaque ménage, le revenu équivalent (ou par unité de consommation) ; d’abord, en attribuant à chaque ménage un revenu égal au centre de la classe de revenu à laquelle il est situé ; ensuite, en appliquent l’échelle de l’OCDE (0.5 pour un adulte supplémentaire et 0.3 pour tout enfant âgés de moins de 15 ans). Les mesures de privation par attribut ont été calculées au paragraphe 2.2 de cette section (section 4).

L’estimation multivariée va nous permettre d’explorer les déterminants des mesures floues de pauvreté dans chaque dimension. Les résultats sont donnés au Tableau 14. La première remarque qui se dégage est relative au revenu. Nous remarquons que le revenu influence significativement le niveau de privation. Ainsi, une augmentation du revenu du ménage se traduit par une baisse de la mesure de pauvreté. Ceci revient à dire que les ressources économiques restent un important déterminant de la qualité de vie. En effet, un revenu plus élevé est synonyme d’accès à un logement de meilleure qualité, à un meilleur état de santé. A ce niveau, nous notons que la privation en termes de loisir reste la plus sensible aux ressources monétaires des ménages. Toutefois, cette relation est non du tout linéaire, comme l’atteste le coefficient du «revenu² », qui prend des valeurs positives. En d’autres termes, plus le revenu augmente plus la diminution de la privation qu’il engendre est importante : L’effet marginal du revenu est croissant. L’effet du revenu est plus important pour les dimensions de Loisir, d’emploi et de ressources économiques

Tableau 14 : Estimation Probit Ordonné des mesures de privation par attributs
Variables P1 P2 P3 P4 P5 P6
Revenu -6,8E-05* -0,00021* -0,00016* -8,7E-05* -0,00013* -0,000167*
Revenu ² 8,03E-10* 2,65E-09* 2,05E-09* 1,29E-09* 1,51E-09* 2,38E-09*
Taille du ménage 0,119* -0,01616 -0,04933 -0,05512 -0,12295* -0,037865
Type du ménage (1)
Couple sans enfant -0,276* -0,8941* 0,40247* 0,106765 -1,42928* -0,315252*
Couple avec enfant -0,403* -1,45648* 0,60559* -0,32006 -1,95567* -0,464153*
Familles monoparentales -0,085 -0,44728* 0,68789* 0,102035 -1,03167* 0,448212*
Autres 0,346 -0,54455* 0,95543* -0,45022 -0,60751* -0,279059
Age de la P.R
de 30 à 39 ans -0,148 0,16651 -0,40963* 0,275941 0,119639 0,559902*
de 40 à 49 ans -0,551* 0,11258 -0,50812* 0,369416** -0,18209 0,931894*
de 50 à 59 ans -0,81* 0,28487* -0,3555* 0,412593* 0,063418 1,264203*
de 60 à 69 ans -0,569* 0,74159* -0,66461* 0,538373* 0,627797* 1,398805*
de 70 à 79 ans -0,806* 1,10272* -2,56404* 0,691377* 0,977182* 1,424737*
80 ans et plus -0,951* 1,55542* -2,8447* 0,931122* 1,692749* 1,362492*
Femme -0,083 0,02338 -0,01027 -0,21259 -0,42773* -0,081658
État civil (2)
Divorcé -0,167 -0,30589* -0,15891 -0,09936 -0,47139* -0,270447*
veuf 0,252 -0,05633 -0,03513 0,136842 -0,04292 0,276395*
Niveau d'instruction (3)
2ème cycle d'enseignement général -0,213* -0,5693* 0,18114 -0,06393 -0,2885* -0,179902
enseig tech. Ou professionnel. court -0,342* -0,30399* 0,04403 0,018725 -0,29135* -0,075112
enseig tech. Ou professionnel. Long -0,262** -0,62397* 0,3096** -0,11251 -0,39736* -0,146055
enseig. Supérieur -0,113 -0,33208* 0,22017 -0,2195 -0,42813* -0,069521
Catégorie Socioprofessionnelle (4)
Artisans, commerçants, chefs d'entreprises et professions libérales 0,026 -0,59506* 0,45134 -0,28832 0,058627 0,459776**
Cadres supérieurs 0,081 -0,47176* 1,01313* -0,55699** 0,275298 0,372892
Professions intermédiaires 0,232 -0,71044* 0,58461* -0,29889 0,319325 0,412643**
Employés 0,099 -0,42428* 0,6178* -0,04706 0,311522 0,546905*
Ouvriers (y compris les ouvriers agricoles) 0,445* -0,26432 0,83587* 0,047953 0,590607* 0,634402*
Retraités -0,24 -0,85139* 0,17912 -0,32641 0,187578 0,363845
Autres inactifs -0,086 -0,87573* -1,75348* -0,56585 -0,26794 0,365352
région (5)
Région parisienne 0,613* 0,14172 -0,02441 0,154958 -0,28879* -0,024583
Bassin parisien 0,033 -0,15959 0,01496 0,070007 -0,25149** -0,190975
Est -0,034 0,21239 0,05763 -0,03148 -0,31877* -0,58284*
Ouest -0,1 0,01035 0,1858 -0,111 -0,11409 -0,61445*
Sud-ouest -0,007 0,22913** 0,10985 0,156196 -0,30813* -0,30479*
Centre- est -0,203 -0,13464 -0,1606 -0,09438 -0,26203** -0,50447*
Méditerranée 0,054 0,1792 -0,11281 0,027024 -0,21118 -0,203572
milieu de résidence (6)
urbain (moins de 20 000 Hab.) 0,509* -0,15192** 0,044* 0,011* 0,071405 -0,057297
urbain (moins de 100 000 Hab.) 0,647* -0,0076 0,058* 0,015* -0,13356 0,261168*
urbain (plus de 100 000 Hab.) 0,717* -0,17014* 0,057* 0,014* -0,17313* 0,140724*
LR chi2 (significativité) 735,04 (0,00) 1956,62 (0,00) 718,47 (0,00) 172,38 (0,00) 1701,43 (0,00) 867,11 (0,00
Pseudo R² 0,067 0,1671 0,1183 0,374 0,1864  
Log Vraisemblance 5116,48 -4877,67 -2,677,637 -2,219,285 -3712,1 -4779,42
(1) base personne seule (2) base célibataires et mariés (3) base sans instruction, études primaires et niveau inférieur au premier cycle d'enseignement générale (4)base agriculteurs exploitants (5) base région Nord (6) base milieu rural
Source données : EPCV Mai 2002          

La taille du ménage semble correspondre à une diminution de la privation dans toutes les dimensions, sauf pour la dimension du logement où nous notons un effet significatif positif. Si nous nous référons au type du ménage, nous constaterons que les privations P1, P2, P5 et P6 (respectivement relatives aux dimensions de logement, loisir, santé et de ressources) diminuent significativement pour les couples par rapport aux personnes seules. Cette diminution est d’autant plus importante pour les couples avec enfants. Par contre, la mesure de privation en termes d’emploi est plus faible pour les personnes seules.

Concernant l’âge de la personne de référence, il semble que les personnes âgées de moins de 30 ans sont les plus exposées aux problèmes de logement et d’emploi alors qu’elles réalisent de meilleurs scores en termes de santé et de loisirs. Les privations de logement et d’emploi sont nettement plus faibles pour les personnes à l’âge de retraite qui reste par contre plus exposées à des taux de pauvreté supérieurs dans les dimensions de santé et de loisirs.

Au vu des résultats des mesures de privation par dimension, nous remarquons qu’il n’ya pas de différences importantes entre les mesures féminines et masculines sauf pour la dimension de relations sociales. Cela peut s’expliquer par le fait que les femmes, de manière générale, accordent plus d’importance à entretenir de bonnes relations avec leur environnement familial et social. L’état matrimonial paraît jouer un rôle dans la variation du degré de privation par attribut. Pour les chefs de ménages divorcés, nous notons que comparativement aux personnes mariées et aux personnes seules, le risque de privation diminue et ce notamment pour les attributs de loisir, de relations sociales et de ressources économiques. Pour les veufs, l’aggravation de la pauvreté de ressources semble être le constat le plus important.

Pour les dimensions de logement, loisir et de relations sociales, le niveau d’instruction de la personne de référence semble contribuer à la diminution de la mesure de privation associée. Le fait d’avoir réalisé des études supérieures ne conduit pas nécessairement aux valeurs les plus basses, sauf pour l’attribut  relations sociales. L’attribut «loisir » semble aussi constituer une source de privation pour les agriculteurs exploitants comparés aux autres catégories socioprofessionnelles. Cette tendance va dans le sens inverse pour les dimensions d’emploi et de ressources économiques. La situation des cadres et celle «des professions intermédiaires » reste nettement meilleure par rapport aux autres catégories dans les dimensions de loisir et de santé. La différence des niveaux de privation entre les catégories socioprofessionnelles est moins importante dans les autres dimensions.

La distribution géographique montre que la privation en termes de logement est plus forte dans la région parisienne. En termes de loisir, la région du Sud-ouest connaît le taux le plus élevé. Alors que les coefficients relatifs aux dimensions d’emploi et de santé ne nous permettent pas de nous prononcer sur le différentiel régional, ceux relatifs aux dimensions de relations sociales et de ressources montrent que la privation est plus accentuée dans la région du Nord. Nous remarquons que la privation dans les fonctionnements de logement, emploi et santé est plus élevée dans le milieu urbain. La tendance s’inverse pour la dimension de loisir. En effet, la mesure de privation en termes de loisir dans le milieu rural est supérieure à celle obtenue dans le milieu urbain.