La rencontre avec l’Autre

Le corps du sujet s’expose et par-là même s’affirme en tant que surface de lecture potentielle sur laquelle s’exprimeront la figure et le verdict « d’une puissance surnaturelle ».

‘« Chez un malade de cette sorte, cette prétention était allée jusqu’à la conviction qu’une providence particulière veillait sur lui…» (S. Freud, 1919, p.141).’

Dans une ordalie, le divin est sollicité, mais il est aussi défié. Les conduites ordaliques sont un défi à l’autorité et à la loi. Prendre le risque de mourir pour légitimer sa vie, est un challenge, une défense contre les pulsions autodestructrices. Les conduites à risque, d’un point de vue psychopathologique mettent en avant, via une dimension de l’agir, d’une part la confrontation avec le risque de mort, l’adresse à l’autre et d’autre part la fuite dans la fusion psychique avec l’objet interne archaïque maternel. Si comme l’admettent A. Charles-Nicolas et M. Valleur, (1982) l’épreuve représente un passage vers une nouvelle naissance symbolique – «dans l’ivresse pulsionnelle» -, elle résulte d’un vécu de morcellement passager du moi. Ce procédé de convocation a un double objectif. D’une part, il s’agit de rencontrer la réponse du représentant de l’Autre et par l’introduction d’un choc, d’essayer d’unifier les différents aspects du narcissisme. Nous le comparons au « travail du lien » au sens de F. Marty, (2000, 2001, 2002), à partir duquel un sujet essaie de relier des fragments non intégrés, des restes en attente de subjectivation. La convocation de l’Autre, lors d’une démarche solitaire procure une « jouissance narcissique de l’instant» A. Charles-Nicolas et M. Valleur, (1982), à entendre comme principe d’excitation et d’intensité sensorielle. La mise en danger constitue, de ce point de vue, un réservoir d’éprouvés à partir duquel le sujet puise sa force de vivre. L’énoncé du jugement de l’Autre équivaudrait à une puissance surnaturelle affublée d’un pouvoir pour trancher de façon absolue et dont le jugement s’exprime à travers le corps de l’individu, physiquement exposé.

‘« Celui qui se soumet à l’ordalie en retrouve au dernier terme, l’Autre devant lequel se présente, le juge de la dite ordalie. » (J. Lacan, 1960). ’

L’énonciation de ces quatre fonctions reste le fruit de travaux abordant ces manifestations, du point de vue des conduites repérables. Bien que notre démarche s’éloigne de cette volonté de circonscription, nous résumons ces conduites pour en décrire leur manifestation, car il nous a paru important de rendre compte des recherches ayant participé à ce travail d’interrogation.

Aussi, nous récapitulons les travaux de ces précurseurs en précisant les grandes lignes du fonctionnement de ces conduites.