4.1. Dispositif à double face : recherche et soin

Afin de penser la scène ordalique et d’interroger son émergence au regard de l’ordalie du contact, il nous a paru nécessaire de l’articuler à une scène de figuration graphique.

En effet, le dispositif de la cure repose sur une suspension de la motricité et une inhibition de la perception (modèle névrotique), et accorde électivement au champ de la parole, l’apanage du travail de symbolisation. Que ce soit dans une visée de recherche ou de soin, ce dispositif ne semble pas adapté à l’approche des sujets étudiés, car ceux-ci utilisent préférentiellement un mode d’expression de type sensori moteur, un passage par la scène de ce qu’ils ne peuvent se représenter.

Nous avons opté pour un dispositif graphique qui, a contrario, sollicite d’emblée la motricité et la perception visuelle du tracé (coordination main œil), en vue de collecter des données pour notre étude et également pour favoriser le travail de symbolisation du sujet. La recherche comporte une double utilité : d’éclairage des processus et de requalification des capacités de symbolisation du sujet.

C’est pourquoi la médiation graphique constitue pour nous, un maillon nécessaire pour qualifier ou requalifier le trajet de la symbolisation, dans la mesure où motricité et sensorialité sont exacerbées en vue d’accompagner le transfert d’un registre à l’autre.

Fidèle à notre orientation au regard des processus de symbolisation, et à l’enseignement de R. Roussillon, nous considérons que la symbolisation constitue un processus de mise en forme, en représentation et en sens de l’expérience subjective vécue. Cette alchimie est rendue possible par la supposition d’un travail de liaison et de transformation s’effectuant au sein de l’appareil psychique.

Ainsi, le dessin projectif nous intéresse car il répond aux deux objectifs escomptés. Du point de vue de la recherche, le dessin projectif constitue un matériel qui permet l’étude de l’expression de la problématique du sujet, sa capacité à mettre en forme son conflit interne afin d’en externaliser une trace repérable. Cette trace favorise un travail psychique par une mise en mots et une mise en signification dans l’après-coup de son jaillissement et mobilise le rapport préférentiel sensori moteur du sujet afin de mieux en cerner ces enjeux. Du point de vue du soin, ce passage par la construction graphique laisse des traces visibles et durables sur lesquelles le clinicien s’appuie afin de construire un dispositif de soin à la mesure de la problématique rencontrée et de ses conditions de mise en travail psychique.

Nous allons décrire la double vertue que nous accordons au dessin projectif de type AT9, afin d’analyser ses conditions de figuration susceptibles d’éclairer notre recherche.