3ème Théorie du traumatisme : de l’effraction du pare-excitation à la configuration de la toile d’araignée

Dès 1920 S. Freud accorde au traumatisme une conception plus économique. Provoqué par une effraction du pare-excitation, le moi du sujet est soumis à une excitation qui vient le déborder et anéantir ses capacités de traitement. Ce modèle du débordement pulsionnel, selon lequel le moi ne parvient pas à se protéger de l’effraction quantitative externe ou interne, sert de tremplin aux travaux de D. Anzieu autour de la fonction des enveloppes psychiques. La porosité des enveloppes altérant la capacité de contention du sujet nous entraîne du côté des failles précoces des enveloppes psychiques chez les sujets ordaliques. Plus précisément, nous substituons au modèle « du moi peau passoire » proposé par D. Anzieu (1985), un autre modèle à l’instar de Liriopé qui n’a de cesse de dessiner des lambeaux pour recouvrir le refuge, jusqu’à ce qu’in fine le graphisme bricolé se transforme en représentation de toile d’araignée. La toile se tisse pour délimiter un territoire, et assurer sa fileuse d’une fonction nourricière. Elle repose sur une logique de piège funeste qui colle et enferme celui qui est piégé vers un destin de dévoration. Le paradoxe prédateur/victime sur lequel le dessin de Liriopé attire, se construit sur un fond d’ambiguïté que nous éclairons lors du travail de notre deuxième hypothèse. Il est à noter cependant, que Liriopé construit, au nom du principe d’auto-conservation, un refuge qui enferme le personnage. Cette figuration paradoxale de ce que nous nommons la figure du piège, nous conduit à présenter le modèle qui s’en dégage : le traumatisme de type toile d’araignée.

La particularité de ce traumatisme repose sur une triple logique :

Le refuge/piège se retourne contre son constructeur qui est à la fois celui qui fabrique et qui devient victime de son ouvrage. Autrement dit, la personne agit et attracte ce qu’elle redoute le plus.

Le dessin met en évidence l’espace dans lequel le personnage ne bénéficie plus des enveloppements tracés. Situé au centre, il est enserré par une délimitation ovoïde. Le modèle du « moi peau passoire » (ibid) définit la particularité d’un moi en proie à des angoisses de vidage. La perméabilité du tissu moïque présente une altération dans sa qualité de contenant. Le modèle que nous présentons met l’accent d’une part, sur l’effraction du noyau central, une attaque de plein fouet dont les effets d’autre part, collent à la peau psychique d’un sujet en suspension, hors du temps. La spécificité de cette attente suspendue au retour de l’agresseur, nous inspire l’image d’un « garde manger ». Le sujet reste englué dans la toile du traumatisme dans l’attente de servir de pâture ou nourriture à un prédateur, et ce afin de donner une figuration à son traumatisme en s’en construisant une représentation.

Liriopé tente de reconstruire, par localisation et à partir du modèle de l’effraction, l’histoire des traumatismes antérieurs du point de vue de la position de victime.

La figuration graphique du modèle de type toile d’araignée, nous amène, -à partir des théories de l’effraction du pare-excitation, et de ce que la clinique nous enseigne-, à insuffler une variante. Cette qualité particulière d’engluement matriciel que représente la toile d’araignée, traduit toute la difficulté de décollement que rencontrent ces sujets contraints à reprendre sur le même mode les effets de la survenue du traumatisme et leur rapport aliénant à l’objet.