4.1.3. L’homme, chemin de l’Evangile

L’Eglise a pour mission d’apporter la Bonne Nouvelle à l’homme où qu’il soit. Ainsi l’homme d’aujourd’hui, puisqu’il passe le plus clair de son temps à lire, à écouter la radio, à regarder la télévision ou encore à surfer sur Internet, l’Eglise se doit de le rejoindre à travers ces moyens qui sont devenus incontournables.

Ainsi donc sa contribution spécifique dans les affaires humaines, y compris dans le monde des communications sociales, est « justement celle de sa conception de la dignité de la personne qui apparaît en toute plénitude dans le mystère du verbe incarné.La question est de savoir si le développement technologique permet à l’homme de devenir « véritablement meilleur, c’est-à-dire plus mûr spirituellement, plus conscient de la dignité de son humanité, plus responsable, plus ouvert aux autres, en particulier aux plus démunis et aux plus faibles, plus disposé à donner et à apporter son aide à tous ».

Selon Claude–Jean Bertrand298, s’il est une valeur sur laquelle tous les humains peuvent se mettre d’accord, c’est la survie de l’espèce, le sort de la planète. Quelle que soit leur idéologie, qu’ils aient ou non une foi religieuse, ce souci devrait les animer tous. Ils sont menacés comme ils ne l’ont jamais été auparavant. L’ennemi, ils l’ont découvert : c’est eux-mêmes. Tous doivent se sentir responsables. Il se trouve, par bonheur, qu’ils partagent généralement certaines valeurs, sur lesquelles se fonde la morale sociale : le respect de la vie humaine, le souci de ne nuire à personne inutilement, la promotion de la justice et des droits de l’homme, l’amélioration du sort d’autrui.

Communio et progressio explique que les médias sont appelés à servir la dignité humaine en aidant les personnes à bien vivre et à agir en tant que personnes vivant dans une communauté. Les médias font cela en encourageant les hommes et les femmes à être conscients de leur dignité, à pénétrer les pensées et les sentiments des autres, à cultiver un sens de responsabilité mutuelle, à croître dans la liberté personnelle, dans le respect de la liberté d’autrui et dans la capacité au dialogue.

Dans une vision organique et correcte du développement de l’être humain, les médias peuvent et doivent promouvoir la justice et la solidarité, rapportant les événements de manière véridique, analysant attentivement les situations et les problèmes, et donnant voix aux diverses opinions299.

L’être humain est un être relationnel, il est par nature, tourné vers la communication. Dans ce contexte, Michel Boullet300 fait remarquer que le premier souci de l’individualisme est de centrer l’individu sur soi, alors que le premier souci du personnalisme est de le décentrer pour établir dans les perspectives ouvertes de la personne, un être capable de relation (…). Ainsi, la personne nous apparaît comme une présence dirigée vers le monde et vers les autres personnes, mêlée à elles, en perspective d’universalité. Les autres personnes ne la limitent pas, elles la font exister et croître. La personne n’existe que vers autrui, elle ne se connaît que par autrui, elle ne se trouve qu’en autrui.

Pour que je puisse dire « je », il faut que quelqu’un m’ait nommé (donc le « tu » précède le « je ») ; mais le « nous » c’est toujours « je » plus x. Le « nous » présuppose donc le « je ». Ainsi par nature la personne est communicable, communication, elle est même seule à l’être. Les médias, doivent être au service de la relation entre les hommes, image de la relation de Dieu avec l’homme, ce qui implique respect de l’autre, souci de sa promotion, respect de sa liberté. D’après Michel Boullet, lorsque la communication se relâche ou se corrompt, je me perds profondément moi-même : toutes les folies sont échec du rapport à autrui ; « alter devient alienus » ; je deviens à mon tour étranger à moi-même, aliéné.

Les médias peuvent également être utilisés pour freiner la communauté et nuire au bien intégral des personnes, soit en les aliénant, en les marginalisant et en les isolant, soit en les attirant au sein de communautés perverses organisées autour de valeurs erronées et destructrices. Ils peuvent fomenter l’hostilité et le conflit, en dévalorisant les autres et en créant une mentalité de « nous » contre « eux » ; présenter ce qui est bas et dégradant sous une lumière fascinante, ignorer ou amoindrir ce qui élève et ennoblit. Ils peuvent diffuser des fausses informations et la désinformation, promouvoir la vulgarité et la banalité. Les stéréotypes fondés sur la race et sur l’éthique sont malheureusement fréquents dans les médias. Souvent, les communications sociales oublient également ce qui est véritablement nouveau et important, y compris la bonne nouvelle de l’Evangile, et se concentrent sur ce qui est à la mode et bizarre.

La communication doit toujours être fidèle, car la vérité est essentielle à la liberté individuelle et à la communion authentique entre les personnes. La libre expression devrait toujours respecter les principes de la vérité, de la justice, et du respect de la vie privée.

Les communications sociales ont un pouvoir considérable sur la promotion du bonheur et sur sa réalisation. Les médias, on le sait, peuvent être utilisés pour le bien ou pour le mal – c’est une question de choix. « La communication à travers les médias n’est pas un simple exercice utilitaire visant uniquement à motiver, persuader ou vendre, ni encore moins un véhicule d’idéologie.

Les médias peuvent parfois réduire les êtres humains à des éléments de consommation ou à des groupes d’intérêt concurrentiels, ou encore manipuler les spectateurs, les lecteurs ou les auditeurs comme de simples chiffres dont on cherche à tirer quelque avantage, qu’il s’agisse de vente de produits ou de soutien politique ; et cela détruit la communauté. La communauté a pour tâche de rassembler les personnes et d’enrichir leur vie, et non pas de les isoler et de les exploiter. Correctement utilisés, les moyens de communication peuvent contribuer à créer et à soutenir une communauté humaine fondée sur la justice et la charité ; et c’est à cette condition qu’ils représenteront des signes d’espérance »301.

Le principe éthique fondamental qui inspire l’Eglise est le suivant : « la personne humaine et la communauté humaine sont la fin et la mesure de l’utilisation des moyens de communication sociale ; la communication devrait se faire par des personnes en vue du développement intégral d’autres personnes ».

Notes
298.

C- J, Bertrand, La déontologie des médias (coll. Que sais-je ?), Paris, PUF, 1997, p. 31.

299.

Jean – Pau II, lettre apostolique adressé aux responsables des communications sociales, le 24 janvier 2005.

300.

M. Boullet, Philosophie et théologie de la communication, dans Les Médias et nous. Quels pouvoirs ? Quelles libertés ? p. 54.

301.

Jean- Paul II, message à l’occasion de la 32ème journée des communications sociales, 1998.