1. 2. L’évangélisation par la radio. Le cas de la radio Notre–Dame

1.2.1. Analyse de la ligne éditoriale

La radio Notre-Dame, créée par le cardinal Jean-Marie Lustiger, se définit comme une voix catholique dans le monde. Sa ligne éditoriale ne s’écarte pas de sa charte et de ses principes, qu’on peut résumer par les vertus théologales : la foi, l’espérance et la charité. Joseph Casellasdéfinit la ligne éditoriale comme la clarification du projet dans son contexte. C’est une manière pour la radio d’afficher publiquement son identité et ses valeurs sur l’espace radiophonique et de prescrire des critères d’action à ses collaborateurs. La ligne éditoriale des radios chrétiennes en France est établie autour de quelques axes ou de quelques thèmes fondamentaux. On essaie de répondre à des questions de base, notamment, qui sommes–nous (émetteur) ? A qui voulons-nous nous adresser (destinataires) ? Animés par quelle motivation et par quel projet (objet) ? Et avec quelles ressources humaines et matérielles (moyens) ? Il s’agit en fait, de répondre aux questions définies par Lasswell et qui concernent toute communication : Qui dit quoi ? A qui ? Pourquoi ? Comment ?

Les idées dictant la ligne éditoriale sont formulées dans ce que l’on appelle la charte éditoriale. Celle-ci fixe par écrit la ligne éditoriale. Elle est l’expression privilégiée de la personnalité de la radio et elle représente son positionnement par rapport à la concurrence.

La ligne éditoriale se présente comme un condensé des éléments du programme. Elle est un ensemble des décisions quotidiennes. Elle peut ne pas être écrite ; elle reste évolutive et ouverte à toute modification ; elle est à ajuster de temps en temps, au fur et mesure que les éléments externes introduisent des modifications par rapport au projet initial. Cependant, qu’elle existe ou pas sous la forme d’un texte écrit et approuvé, la ligne éditoriale est repérable par l’auditeur attentif. En faisant attention à ce qu’il écoute, l’auditeur peut se situer par rapport à une radio donnée.

En relisant la ligne éditoriale353 de la radio Notre-Dame, on peut se rendre compte de la manière dont elle décline son identité, se positionne par rapport à d’autres radios (et depuis les origines, elle se distingue des autres radios chrétiennes en particulier celles du réseau RCF qui se refusent à être centrées sur la seule confession catholique) et affiche sa spécificité, en dévoilant pour ainsi dire, le cœur de son action radiophonique. A partir d’elle, on peut déduire des stratégies utilisées pour atteindre le but que la radio se fixe. Selon Mgr Vingt-Trois, l'objectif premier de radio Notre- Dame, est de donner aux auditeurs une présence chrétienne sur les ondes, par la lecture de l'Evangile, la prière, le chapelet et la messe. Mais comme la foi se nourrit aussi de tout ce qui fait l’environnement, c’est-à-dire « le monde » au sens de l'Evangile354, Notre-Dame propose aussi aux auditeurs des pistes, des éléments de réflexion pour qu'ils puissent vivre l'Evangile dans leur vie quotidienne : rencontres avec les autres, témoignages de foi, réponse aux questions des auditeurs, information... D’autre part, elle suit pour les auditeurs les grands événements de la vie de l'Eglise : notamment les JMJ et les voyages pontificaux.

Comme nous venons de le voir, ce qui fait la spécificité de cette radio, c’est le fait qu’elle propose un message fondé sur l’Evangile. Son programme, comprend trois axes : information, prière et enseignement. Elle diffuse la prière (notamment la récitation du chapelet, la messe), les événements qui touchent à la vie de l’Eglise, les informations de l’Eglise, les informations nationales, internationales et de proximité (la société et l’Eglise locales). Cette radio est un pont entre l’Eglise et la société. Elle est en quelque sorte au carrefour, entre l'Eglise et le monde. Elle amène l’Eglise au monde et ramène le monde à l’Eglise. Grâce à cette radio, certaines personnes qui ne sont pas catholiques, apprennent à connaître355 l’Eglise et y découvre ainsi le message qu’elle diffuse. Elle joue un rôle d'intermédiaire, de transmission de l'espérance chrétienne d'un côté, de remontée des questions adressées à l'Eglise de l'autre356.

Certaines émissions témoignent clairement de ce souci d’ouverture et d’évangélisation, on citera en l’occurrence : Le téléphone du dimanche, qui donne la parole aux familles de prisonniers, pour qu'elles puissent leur envoyer des messages de soutien, ou encore Place de l'Eglise, qui témoigne de ce qui se fait de bien dans chacune des paroisses d'Ile-de-France. Esprit de famille qui débat des questions relatives à la vie en famille (couples, place du père et de la mère, rôle des grands-parents, vie des retraités, éducation des enfants, etc.). Sans oublier les émissions plus culturelles, type Profils du monde, ou de société comme Le bistrot de la vie, qui ouvre à un regard chrétien sur le monde.

Toujours dans ce souci d’ouverture et d’évangélisation, radio Notre-Dame est aussi l'opérateur technique de la COFRAC, la communauté francophone des radios chrétiennes, et à ce titre elle propose ses programmes aux radios françaises, mais aussi d'Afrique, du Liban, ou encore au Canada. Certaines des émissions sont également reprises par RCF (Radio Chrétienne de France).

On notera que si la radio Notre-Dame est un moyen pour le diocèse de Paris et ceux d’Ile-de-France d’aller à la rencontre des gens, dans un but d’évangélisation, le résultat de ce travail est difficile à évaluer, d’autant plus que le nombre de ceux qui participent aux célébrations ne fait que baisser et qu’il y a de moins en moins de français qui se disent appartenir au catholicisme.Le nombre de français se déclarant catholiques est passé de 71% en 1981 à 59% en 2007. Bien que cela mérite d’être souligné, la fonction de reliance de la radio ne doit pourtant pas être sous estimée. Car la plupart des français restent attachés au catholicisme, religion de leurs parents et des grands-parents, même s’ils ne la pratiquent pas. Et on compte aussi dans l’Eglise catholique, de nouvelles conversions dues en partie à l’action des médias ; mais cela reste encore très limité.

Notre-Dame est d’abord la radio de ceux qui se reconnaissent à travers ses émissions. Elle leur appartient et ils peuvent y faire des suggestions. Le ton convivial de cette radio, renvoie à la proximité. Celle-ci appelle à la participation. Mais dans un organe de communication au service de l’Evangile, quel genre de collaboration et de participation peut-on attendre de la part des auditeurs ?

A travers Notre–Dame, l’Eglise trouve un moyen d’exposer sa doctrine, de partager sa liturgie et ses prières, d’expliquer ses prises de positions et de dialoguer avec toutes les sensibilités. Bien qu’elle s’adresse d’abord aux catholiques, on compte parmi les auditeurs de Notre Dame, 120.000 en Ile-de-France, dont 50 % de pratiquants réguliers, 30 % de non pratiquants et 20 % de chercheurs de spiritualité ou membres d’autres confessions religieuses357. En gros il y a plus d’hommes, 53 % qui écoutent cette radio que de femmes, 47 %. Qu’on se réfère ici au pourcentage des lecteurs du journal La Croix qui se trouve à peu près dans la même proportion.

Notes
353.

Voir en annexe le texte sur la ligne éditoriale de la radio Notre-Dame.

354.

C’est-à-dire, lieu de l’expérience humaine.

355.

Nous nous référons ici au pourcentage des chercheurs de sens (20 %) qui écoutent cette radio.

356.

Mgr Vingt Trois, discours à l’occasion des 25 ans de la radio Notre- Dame.

357.

Source : Sondage CSA janvier 2005.