3. La médiatisation des voyages pontificaux ou la performance de la télévision

La médiatisation des voyages pontificaux passe par la dramatisation. Pour permettre au public de participer à la cérémonie, la télévision recrée l’événement en faisant appel aux ressources du spectacle. Elle essaie de montrer et d’expliquer les différentes étapes de la cérémonie en faisant « vivre » la cérémonie aux téléspectateurs. De ce fait, elle introduit ces derniers au cœur même de la cérémonie en jouant le rôle de « prêtre », d’intermédiaire entre la cérémonie et le public. Elle initie à la compréhension de l’événement, ainsi qu’à celle de l’Eglise en général, de sa hiérarchie, du sens de certains de ses rites, de son histoire, de ses sacrements et de sa mission. Les commentaires des prêtres pendant la retransmission de l’événement donne un peu plus d’éclairage sur ce qui ce fait et éclaire davantage la réalité de la vie de l’Eglise.

Le spectateur apprend ainsi à connaître le sens de certains gestes, rites ou symboles ; l’existence de tel groupe dans l’Eglise. Durant la retransmission du voyage pontifical à Lyon, les téléspectateurs ont été informés en passant, sur le nombre de congrégations religieuses, sur celui de prêtres séculiers, le nombre des prêtres ordonnés par an, etc. Ils ont également appris des choses sur la béatification dans l’Eglise catholique, sur ce qui se passe, sur la manière dont on procède, sur les conditions, etc. Cette intervention du prêtre au côté des journalistes qui s’explique par le besoin de faire comprendre ce qui se passe, se transforme finalement en une catéchèse pour les spectateurs. Ainsi certains y apprennent des choses sur l’Eglise catholique qu’ils peuvent approfondir par la suite. Exemple dans la cérémonie du baptême, on explique pourquoi on fait usage de l’eau, pourquoi le vêtement blanc et pourquoi les bougies, etc. Le prêtre explique chaque étape du rituel atténuant ainsi l’aspect « mystère » des cérémonies ou des rituels qui signifie pour certain incompréhensible et inexplicable, en faisant émerger, le côté humain et régénérant de ce sacrement.

Pour être à la hauteur de ce défi, la télévision exploite les ressources de la cinématographie : effets spéciaux, montage et juxtaposition, etc. On projette la silhouette du pape, sur l’immense mosaïque des fidèles tournés vers lui, on inscrit les gestes de bénédiction sur les mouvements de la foule, on passe du dôme des églises à la tiare du pontife, on détaille en gros plans les visages en prière. Il s’agit de doter l’événement d’un rythme continu, d’une cadence. Le rythme permet de convertir une assemblée en communauté. On pourrait dire qu’il donne une âme à la cérémonie. D’une masse de personnes issues de milieux différents, la cérémonie en fait une assemblée de chrétiens, une communauté de fidèles.

Refermons ce point en disant avec Marie-Noëlle Gougeon, qu’avec les cérémonies télévisées, on passe d’un traitement théâtral de l’événement, (manifestation à laquelle on assiste physiquement sur le site (cérémonies télévisées)) à un traitement cinématographique avec enchaînement de séquences, procédé narratif, « dialogue » entre les images prises sur des sites différents, « rôle » attribué aux acteurs (cérémonies télévisuelles). Soulignons que le traitement cinématographique est atténué par l’immédiateté du « direct ».