Prolongements

Si ce travail ne se veut pas programmatique, il ouvre sur une série de prolongements souhaitables. Nous ne reviendrons pas sur le suivi des évolutions qui se dessinent, et notamment le développement des MLS à la française dont on a déjà dit à quel point il serait intéressant de voir quelles transformations ils vont apporter, ni sur le rôle des agents immobiliers sur les deux autres grands marchés où ils occupent la première place : celui des résidences secondaires et celui des locations saisonnières. De la même façon, l'étude du milieu professionnel, à laquelle on a préféré celle de l'influence des intermédiaires sur le marché, constitue en tant que telle un objectif de recherche susceptible d'enrichir la description de ces circuits de valorisation, mais qui pourrait également se nourrir des analyses qui précédent, le rapport avec certaines clientèles et certains marchés entrant dans la définition d'une identité professionnelle et de ses variations. Toutes ces pistes sont pertinentes, mais le déroulement de la problématique de la valorisation conduirait plutôt à en privilégier deux autres.

Tout d'abord, elle invite à se pencher sur les autres dimensions de l'intermédiation immobilière, soit sur la transaction, avec le cas des marchands de biens, soit sur d'autres activités : recherche de locataires et gestion locative. La reprise des problématiques traitées dans ce travail ouvre deux pistes. En ce qui concerne le marché locatif, il s'agit alors de porter le regard sur la relation entre le bailleur et l'agent de façon à déplacer la problématique, souvent posée en termes institutionnels (partages des risques dans le contrat de bail, protection du locataire contre rentabilité locative), ce qui peut apporter de nouveaux éléments sur des thématiques comme celle de la discrimination. L'activité des marchands de biens suscite également un certain nombre d'interrogations, notamment sur leur ancrage dans des circuits marchands comparables à ceux des agents immobiliers, soit au moment du recueil d'information et de la recherche d'affaires (en particulier pour les petits intervenants, parfois individuels, réalisant des opérations occasionnelles), soit à celui de la commercialisation.

Elle suggère également la pertinence d'une comparaison, avec d'autres agglomérations mais aussi à l'échelle internationale. L'appel à une démarche comparatiste peut paraître rituelle au terme d'un travail centré sur une agglomération précise, mais provient ici surtout de la part écrasante des travaux anglo-saxons, et plus particulièrement états-uniens, dont les problématiques adaptées à une organisation donnée du marché sont formulées de façon à paraître génériques et à abstraire les principaux traits saillants de l'intermédiation. L'écart entre la situation française et celle des pays qui, comme le Canada, fonctionnent sur des systèmes de fichiers communs et de mandats exclusifs, n'est pas seulement institutionnel mais renvoie également aux spécificités nationales et locales des systèmes de l'habitat et des relations de voisinage. Le modèle américain des agences en franchise, typique des suburbs et de communautés locales homogènes, trouve ainsi en France sa meilleure application dans des immeubles relativement récents, caractérisés essentiellement par la mobilité des habitants. Dès lors, même si les deux sont fondés sur la territorialisation de l'activité, ils s'interprètent différemment. Rapporter le travail de l'agent immobilier à d'autres contextes réglementaires et sociaux, dans lesquels la mobilité résidentielle, le rôle de la propriété et les caractéristiques de l'offre diffèrent, par exemple en Europe du Sud ou en Allemagne (voire dans des pays où les marchés fonciers et immobiliers sont encore en construction) serait un moyen d'approfondir l'appréhension de l'intermédiation.