2.2.2.2. Y a t-il un effet propre à la densité ?

Les résultats relativement similaires dans les deux groupes d’aires urbaines n’offrent aucune évidence quant à la relation entre la densité et le niveau de ségrégation. Nous présentons seulement les résultats du deuxième groupe des aires urbaines moyennes. La densité de l’aire urbaine n’a aucun effet sur le niveau de ségrégation (Tableau 13), ce qui confirme l’effet taille souligné précédemment. La concentration des logements sociaux à travers le pourcentage des HLM reste le facteur le plus déterminant. Ce facteur est lui aussi associé à l’histoire industrielle, à l’immigration mais aussi au jeu d’acteurs politiques (Deschamps, 1998). Pour ce groupe d’aires urbaines moyennes (80 000-130 000 habitants), la commune-centre est la seule qui contient plus de 20 000 habitants, à l’exception de l’aire urbaine de Fréjus-Saint Raphaël écartée de l’analyse. L’effet de la part des HLM dans les logements de l’aire urbaine explique 62  % de la variance de l’indice de ségrégation (Figure 31). L’effet significatif du pourcentage des retraités, des étrangers et des chômeurs est aussi confirmé sur ce groupe d’aires urbaines (Tableau 13).

Tableau 13 : Test de l’effet densité sur les aires urbaines moyennes (80-130 000 hab)
Variable Paramètres Ecart-type t student
Constante 0,305*** 0,046 6,577
Retraités -0,005*** 0,002 -2,775
Chômeurs 0,006* 0,003 1,703
HLM 0,005*** 0,001 4,381
Etrangers 0,004*** 0,002 2,112

R2 ajusté = 0,66 ; ***significatif à 1% ; *significatif à 10% ; n=48

Nous retrouvons, dans ce groupe, l’impact historique de l’inégale répartition spatiale de logements sociaux sur la ségrégation de la population dans les quartiers de la ville. Cependant, pour les grandes aires urbaines le phénomène ségrégatif devient plus complexe car d’autres d’éléments entrent en jeu et notamment ceux liés à la structure économique et à la métropolisation. Pour l’autre groupe d’aires urbaines (150 000 - 450 000 habitants), le niveau de ségrégation est essentiellement expliqué par la présence des retraités et des chômeurs (48 % de la variance). Si les chômeurs augmentent la ségrégation, les retraités ont tendence à la diminuer d’une manière linéaire, car l’effet de la densité au carré n’est pas non plus sigificatif.

Figure 31 : Part de logements sociaux et ségrégation dans les aires urbaines moyennes (80-130 000 hab)
Figure 31 : Part de logements sociaux et ségrégation dans les aires urbaines moyennes (80-130 000 hab)

Source : élaboration propre, Données INSEE-DGI, 2005 ; INSEE, RGP 1999

Enfin, la mesure de la densité à partir de la surface brute présente l’inconvénient de prendre en compte les terrains agricoles. La faible densité de Dijon ou Reims, par exemple, est surtout liée à leur faible densité périphérique, car leurs zones centrales sont parmi les plus denses en France. La distinction entre densité centrale (plus proche de la densité nette) et densité périphérique permet d’apporter plus de précisions, et de tester l’effet de chacune sur le niveau de ségrégation de l’aire urbaine. Il faut signaler que ces deux variables de densité sont très faiblement corrélées (R2 = 0,05 seulement) et leur introduction dans la même régression ne pose pas de problème de multicolinéarité.