2.3. En conclusion

Dans un contexte théorique non stabilisé et exclusivement américain, nous avons tenté d’analyser de manière empirique la relation entre la densité résidentielle et la ségrégation par les revenus des ménages dans le cadre des aires urbaines françaises. D’une part, la faible densité, élément longtemps associé à la suburbanisation des ménages riches aux États-Unis, ne semble pas liée à la ségrégation sociale au sein des aires urbaines françaises. Les résultats des corrélations laisseraient au contraire supposer l’inverse, car en moyenne, le niveau de ségrégation est plus important dans les aires urbaines les plus denses ou ayant des fortes densités périphériques. Cependant les tests de cette relation sur des groupes relativement homogènes de populations n’offrent aucune évidence quant à l’impact de la densité ou la densité périphérique sur le niveau de ségrégation d’une aire urbaine. D’autre part, il n’y a aucun effet de la densité centrale ni de son niveau de dilatation sur le niveau de ségrégation par rapport aux autres caractéristiques socioéconomiques de l’aire urbaine.

Cette analyse globale nous montre en premier lieu la complexité du phénomène de la ségrégation en France. Si la dimension historique de la ville à travers la concentration des logements de type HLM explique en bonne partie le niveau de ségrégation dans les aires urbaines moyennes (autour de 100 000 habitants), d’autres facteurs socio-économiques viennent contribuer au processus ségrégatif sur des villes de tailles plus importantes. La concentration des emplois qualifiés et des richesses peut accélérer d’autres mécanismes ségrégatifs à travers le marché foncier et immobilier, rendant plus difficile la mise en œuvre des potentielles politiques correctrices. Des analyses comparatives sur des formes urbaines contrastées seront en mesure d’approfondir l’analyse et de mettre en évidence les particularités et les similitudes des mécanismes ségrégatifs dans chaque ville (Cf. chapitre 5).

Enfin, les analyses présentées ici nous ont permis d’apporter une réponse, aussi partielle soit-elle, à la relation entre la densité de l’aire urbaine et son niveau de ségrégation et de remettre en cause certaines idées reçues, notamment celles des vertus supposées de la centralité à réduire les inégalités socio-spatiales de la ville.