1.1.2. Émergence de centres substituables ou complémentaires au centre historique

Avant d’appréhender le lien entre la concentration des emplois dans des pôles périphériques et la répartition des groupes de populations, il est primordial de comprendre la nature des interactions entre firmes mais aussi entre firmes et ménages, et la relation entre les pôles et le centre historique (Fujita et Thisse, 2003). Il s’agit en effet, de savoir si les pôles secondaires sont concurrents au centre historique, ou si ils sont plutôt complémentaires. Dans le premier cas, les pôles périphériques reproduisent les mêmes activités de la centralité basées sur la proximité et l’interaction. Avec le temps, ils deviennent autonomes et indépendants du centre historique et vident ce dernier de ses activités les plus stratégiques, à l’image de ce qui s’est passé dans certaines edges cities aux Etats-Unis. C’est la thèse du déclin et la ghettoïsation du centre historique. Dans le deuxième cas, ces pôles d’emploi n’accueillent que certains types particuliers d’activités stratégiques qui se délocalisent du centre vers la périphérie. Chaque pôle spécialisé reste complémentaire au centre historique ou avec les autres pôles périphériques (Anas et al. 1998 ; Lacour et Puissant, 1999).

L’explication théorique de l’émergence des pôles secondaires dans les modèles de la NEG se base sur la précision des forces d’agglomération et de dispersion qui alimentent le processus d’auto-organisation à l‘échelle microéconomique ou la mise en avant du rôle des macro-agents. Pour faire apparaître des pôles substituables ou complémentaires à l’échelle intra-urbaine, les modèles à interaction spatiale (Fujita-Imai-Ogawa) combinent les externalités informationnelles et les coûts de transport, alors que les modèles inter-urbains (Fujita-Krugman-Mori) utilisent les forces d’agglomérations liées à la variété des produits et les coûts de transport des biens industriels et agricoles (Huriot et al. 2003). L’introduction de différents secteurs d’activité ou de fonctions dans le premier type de modèles permet de faire apparaître des pôles spécialisés à l’échelle intra-urbaine (Ota et Fujita, 1993). L’intervention des macro-agents peut donner lieu à des pôles secondaires (Henderson et Mitra, 1996), qui sont souvent complémentaires du centre historique (Gaschet, 2003).