A - Une mise en concurrence du comité d'entreprise et des délégués syndicaux

Cette contractualisation des droits du comité d'entreprise constitue réellement un bouleversement de la représentation des salariés (même si, pour le moment, les textes concernés se limitent aux questions d'emploi). En effet, il ne s'agit pas d'un simple affaiblissement d'une institution (1) au profit d'une autre, mais bien d'un nouveau mode de représentation, dont la forme a fait l'objet d'une négociation entre employeur et représentants des salariés. Si le processus aboutit à un accord, la contractualisation de la forme de la consultation aura des implications multiples (2).

Le changement fondamental ne réside pas dans le fait que les attributions du comité puissent être diminuées, car les négociateurs peuvent également choisir d'augmenter les moyens du comité d'entreprise. La transformation vient davantage du fait que les syndicats, par le biais de la négociation, ont la mainmise sur le comité, donc sur une partie des droits des salariés à la participation.
Ce n'est pas seulement le mode de représentation des salariés qui varie, mais bien la conception générale de la représentation des salariés dans l'entreprise.

Tout le paradoxe tient dans le fait que les négociateurs d'entreprise sont souvent décriés, leur légitimité est régulièrement remise en cause mais, avec cette mutation, ils deviennent le centre de gravité de la mise en œuvre du droit à la participation dans l’entreprise.

Ce changement du mode de représentation risque également d'ébranler le canal dual de représentation et peut amener à une forme d'institution unique de représentation des salariés qui n’est pas sans risque. Car, comme l’explique Sophie Jamy, "L'entrelacement des représentations élues et syndicales amorcé dans l'accord de méthode ou dans son pendant trouverait dans le Conseil d'entreprise son aboutissement : les légitimités distinctes des deux formes de représentation se trouveraient niées à travers un dispositif unique."589.

Avec ces textes, le législateur renvoie la détermination de la forme de la représentation à la négociation sur les questions de l'emploi et de la formation.
Cette négociation va bouleverser la forme des représentations, puisque le contenu des accords est centré sur les moyens de la participation à la gestion de l'entreprise et non sur les questions de fond du livre IV.

Quel que soit le sort qui sera réservé à ce nouveau mode de représentation, nous devons nous interroger sur les opportunités, les avantages qu’il peut apporter aux salariés : est-ce le gage d'une représentation plus efficace ?

Notes
589.

Sophie Jamy, L'accord de méthode, mémoire de DEA, PARIS X, 2004.