I. 3. La métaphore ou “l'entre-deux signifiant”160.

La métaphore n'est rien d'autre qu'une comparaison réduite à sa plus simple expression étant dépourvue du comparé, du modalisateur comparatif et de la motivation de la comparaison. L’absence de ces derniers éléments, dans la métaphore, justifie sa difficulté d'interprétation. La métaphore se présente donc comme un véritable condensé de sens s'inscrivant dans le fonctionnement polysémique du langage. D'ailleurs le recours au style figuré requiert la participation active du lecteur qui, face à la double articulation du texte, s'efforce de dévoiler les mystères du sous-entendu. Cette figure de rhétorique, plus que les autres, participe du processus de sublimation de la réalité opérée par la parole poétique. Henri Meschonnic a remarqué que la métaphore a fait de la poésie une pensée par l'image161. Sa présence fondamentale dans le langage poétique rapprocherait ainsi la poésie de l’art figuratif, plus précisément de la peinture162.

Les œuvres analysées dans ce contexte se présentent comme une source inépuisable de métaphores. Nous allons tout d'abord analyser les métaphores isolées, c'est-à-dire, celles dont le champs sémantique ne s'étend pas sur les autres vers ou bien phrases. Comme pour les comparaisons, nous allons faire un classement selon la fonction qu'elles ont dans le texte soit-il un poème ou bien un récit. Nous avons constaté donc la présence de métaphores soumises à quatre types de processus, tels le processus d'humanisation, celui de concrétisation, celui d'animalisation et, plus rare, le processus de réification. Parfois ils se juxtaposent en contribuant à enrichir le texte au niveau sémantique. Cependant cette confusion recherchée finit par avoir aussi des effets dépaysants, comme le témoigne cette strophe où l'on assiste à l'enchaînement de deux processus, tel le processus d'animalisation et celui d'humanisation:

‘en rêve nous avons vu s'ouvrir
et se refermer les ailes de la grande nuit
paupières géantes sur l'œil de l'univers
(DM, p. 106)’

La nuit, d'abord assimilée à un oiseau immense se transforme soudain, par le procédé stylistique de la métaphore filée, en un être humain en donnant vie à un tableau surréaliste.

Dans les vers suivants l'on assiste plutôt à la juxtaposition du processus d'humanisation et de celui de concrétisation163:

‘c'est l'aube
qui s'habille de partances
et incline la tête
(PN, p. 29)’

L'aube est humanisée selon une technique à laquelle les auteurs nous ont déjà habitués et le mot abstrait “partances” devient concret grâce à la présence du verbe “s'habiller” permettant l'identification sous-entendue entre “partances” et vêtements.

Ce qui frappe davantage en lisant un poème de Saïd est la tendance à rendre vivante et tactile son écriture par le recours constant aux processus d'humanisation et de concrétisation164. Cette pulsion à tout humaniser atteint chez Saïd sa plus grande expression dans le poème où le protagoniste est la lettre “i” qui, sous sa plume, acquiert des traits humains165:

‘le sourire des ponts
naît de l'âme des eaux

un ciel couleur perle voile
ou dénude leur miroitement

la nuit vient le monde s'efface
soudain la lettre i se jette
de tous les ponts de la ville

seul le point de la lettre
flotte sur les eaux
(PM, p. 52)’

Le rapprochement entre ce poème et celui de Nadir s'intitulant Célébration de la lettreest inévitable. En effet, l'auteur y humanise, lui aussi, une lettre, à savoir, l'aleph. Le choix de la première lettre de l'alphabet arabe est un clin d'œil explicite à Borges, l'un de ses “sémaphores” littéraires:

‘Dans le parc déserté, labyrinthe végétal
L'Aleph marche
Ombre solitaire et aveugle.
Le Minotaure de pierre
avalé ses fils sans pitié,
Mais dans l'ordre alphabétique
(Sainte conscience professionnelle!)
Le cyprès s'apitoie
Et gobe, de travers, la lune.
Points d'exclamation
Points de suspension...
(LC, p. 37) ’

Saïd, aussi bien que Nadir, utilise très souvent les deux processus d'humanisation et de concrétisation pour apprivoiser des concepts abstraits166. En particulier, chez Saïd nous avons remarqué une véritable obsession dans ses efforts pour rendre tangible le silence comme si elle voulait le faire devenir la matière constitutive de ses poèmes. En effet le silence est l'un des vocables les plus récurrents dans ses œuvres167. Chez Saïd cette “musique secrète de l'âme”168 crée le poème et vice-versa car elle ne donne jamais de réponses aux nombreuses questions existentielles qu'elle (se) pose dans ses poèmes. Face à ce dépaysement total l'auteur semble trouver des certitudes dans l'affirmation suivante:

‘le silence est la vérité du monde
et mon plus beau poème
(PM, p. 18)’

Tout reste suspendu comme dans un rêve. La seule réponse possible devient alors le silence qui n'est que l'ombre même du poème. Mais il y a aussi le silence de la page qui est représenté par les espaces blancs. Voilà ce qu'elle affirme à ce propos:

‘«Les espaces, blancs, qui simultanément, séparent un texte et le relient aux précédents, lui permettent aussi d'émerger du silence – présent entre les mots, les vers, les strophes et jusque dans les marges, blanches elles aussi. [...] A mes yeux, ces blancs, ces silences, déterminés (mais seulement en partie) par les mots, suggèrent également un au-delà du poème, qui trouve sa résonance, son écho, chez le lecteur, celui-ci ayant toute liberté pour recréer le poème, d'y apporter sa part de lumière»169.’

Après le silence, Saïd laisse transparaître de ses poèmes une certaine angoisse pour l'écoulement inexorable du temps qu'elle essaie d'apprivoiser toujours par le biais des deux mêmes types de processus170. Le jour et la nuit non plus n'échappent, chez les deux écrivains, aux différentes tentatives de les humaniser, les concrétiser ou bien, les animaliser171. Dans ce poème, qui contient un carpe diem invitant le lecteur à profiter de la vie, l'auteur soumet le jour et la nuit au processus d'humanisation:

‘la nuit desserre les dents
sur un rie de nuit

demain les arbres
pour commenter la nuit

son rire de nuit

ouvrez les yeux
rien n'est perdu
le jour commence

le jour se pare
de nos couleurs
(UA, p. 70)’

Chez les deux écrivains, il y a quatre manières d'amorcer le processus d'humanisation: d'abord par le choix d'un verbe qu'on utilise d'habitude pour les êtres humains. C'est le cas des vers suivants où l'on assiste à la concrétisation des deux concepts abstraits172:

‘le temps aussi
nous lapide et piétine
les archives du silence
(SF, p. 27)’

Ensuite, le processus d'humanisation peut se produire par le rapprochement d'un terme appartenant au champs lexical du corps173. Ou bien, l'auteur peut associer à un substantif quelconque, un adjectif, un sentiment ou bien une qualité, qui seraient plus appropriés à une personne174.

Nadir se sert beaucoup lui aussi de ces types de métaphores mais, chez lui, le processus d'humanisation est atteint plutôt grâce à d'autres stratagèmes tels, l'apostrophe ou l'utilisation fréquente de la lettre majuscule pour des concepts abstraits, des animaux, des objets, des éléments naturels, etc.175. En tout cas, la présence des processus d'humanisation et de concrétisation chez Saïd fait partie, à juste titre, des traits les plus originaux de son style tandis que chez Nadir la métaphore, avec ses différents types de processus, contribue tout simplement à la création d'un langage poétique.

Le processus de concrétisation, après celui d'humanisation, est l'un des stratagèmes le plus utilisés chez les deux écrivains. Ils s'en servent lorsqu'ils veulent visualiser un sentiment ou bien une notion abstraite176. Ce processus vise à des effets éclairants, comme le montrent bien les vers suivants:

‘et dans ces rêves lents à éclore
nos rugissements d'arbres crucifiés
d'infinies échelles de plénitude
et de souffrance le rire cynique
de lendemains toujours meilleurs
(PM, p. 77)’

Enfin, l'on trouve, encore que moins souvent, quelques cas de processus d'animalisation qui révèlent une volonté de surprendre toujours le lecteur par la création de métaphores bizarres, comme les deux suivantes, qui partagent le même type de rapprochement177:

‘la mer se révèle troupeau serré
aux crinières des poèmes
(GL, p. 114)’ ‘de sourds galops d'abîme
résonnent
sur des espaces de troupeaux lointains
(MI, p.117)’

Pour conclure avec l'analyse des processus les plus fréquents chez les deux écrivains, il y a le processus de réification qui est le moins utilisé178. Cependant, Saïd s'en sert, de temps en temps, pour exprimer ses jugements personnels. C'est le cas des vers suivants où l'auteur laisse transparaître son point de vue amer sur la condition de l'homme:

‘nous sommes autant de grains
dans la meule du monde
(MT, p. 68)’

Ces vers lapidaires témoignent d'une prise de conscience de la condition misérable de tout homme qui se trouve écrasé par le poids même de son destin179.

La poésie saïdienne est toujours in fieri, ou mieux elle se métamorphose sans cesse. Dans ses recueils il n'y a pas de fin donc mais prélude au poèmes ou aux recueils suivants dans une chaîne infinie d'échos d'un vers à l'autre ou bien d'une strophe à l'autre grâce au stratagème des métaphores filées qui abondent chez elle180. Selon le champs sémantique auquel elles appartiennent nous avons constaté la présence de six types de métaphores filées chez Saïd. Il y a d'abord une grande quantité de métaphores qui renvoient curieusement à l'art de tisser181. Cela peut-être vient de la définition même du mot “texte” qui étymologiquement est un tissu. Ce type de métaphores filées ont des effets dépaysants, comme si l'auteur s'amusait, de temps en temps, à confondre son lecteur. C'est le cas de ces vers qui appartiennent à un poème décrivant des scènes de mort :

‘d'aiguille en fil blanc
je remonte à la course
des paysages éventrés recousus poing à poing
(PN, p. 54)’

Directement associé à ce groupe l'on trouve celui des métaphores qui se rapportent à l'écriture et au langage mêmes. Ce lien entre parole et art de tisser est explicité très habilement par Nadir dans le chant XIII qui compose le Livre Premier du recueil L'Athanor. Dans ce poème l'auteur plonge les origines de la Parole dans le mystère:

‘A l'ombre de l'Olivier
Nous fîmes éclore les Jumeaux dissemblables
Et leur donnâmes une araignée pour tisser une toile.
Les Jumeaux répartirent les fils entre leurs dents.
Ils ouvraient et fermaient leurs mâchoires,
Croisant les fils de chaîne
Tandis que de leurs langues, ils poussaient le fil de trame.
Ainsi fut brodée, robe inaugurale,
La première Parole.
(LA, p. 19)’

Cependant, ce type de métaphores filées est plus récurrent dans les œuvres de Saïd où la réflexion sur l'écriture devient souvent matière même de poésie. En effet, dans ses recueils l’auteur avoue par-ci par-là sa passion pour l'acte scriptural et les nombreuses raisons qui l'ont poussée à écrire en transformant ses poèmes en de véritables manifestes de l'écriture poétique. Ainsi, le champ lexical de l'écriture envahit le poème pour tisser des métaphores très suggestives où les mots s'animent:

invisibles les mots rêvaient le poème

‘qu'une main de lumière
calligraphiait au revers de la nuit
(GL, p. 99)’

Ensuite, il ne manque pas de nombreuses métaphores renvoyant de quelque manière au feu, à l'oiseau ou, plus en général, au vol, au règne végétal et à la mer.

Le feu est l'un de nombreux symboles de métamorphose chez Saïd, car il transforme les paysages décrits dans ses strophes. C'est le cas de ce petit poème où la métaphore filée “ignée” permet de relier des vers obscurs et apparemment sans aucun lien entre eux:

‘désert ébloui
sous un ciel d'échardes

la saison incendiaire
ordonne ses couleurs de sang

feux vivants dans le naufrage
majuscule des miroirs

s'enflamment les fantômes
écartelés d'autres planètes
(NA, p. 43)’

Après cet élément originaire et pur qui représente, par ses caractéristiques, l'essence même de la poésie saïdienne, il y a un autre groupe de métaphores filées qui reviennent souvent dans les recueils. Il s'agit des métaphores renvoyant à l'oiseau ou plutôt au vol. Comme le feu, le vol aussi tisse son réseau de correspondances par son champ lexical en devenant le fil conducteur de plusieurs poèmes, tel le suivant qui développe une description très condensée:

‘partout l'aile courbe
de la lumière

cherche sa voie

parfois elle se pose
en vol sur les choses

les fait revivre
dans son sillage
(LA, p. 42)’

Ces vers montrent bien l'habileté de Saïd dans la transfiguration d'un évènement, parfois banal, par le simple recours au style figuré. Par contre, dans les strophes qui suivent, Nadir recourt à la métaphore filée associée au règne végétale pour donner vie à un rapprochement tout à fait inattendu:

‘La Méditerranée sera ce que ses peuples bourgeonnants en
feront:
L'équinoxe des printemps
Le soleil nouveau, au prix du jour.

Et que fleurissent les Andalousies et les Alexandries
nouvelles dans un espace reconnu, un temps accordé, une
filiation assumée, dans l'évidente bonté de la justice et la
paix calme de l'olivier. (LC, p. 23)’

Malgré la présence de la métaphore végétale, la mer reste l'indiscutable protagoniste de ce poème entièrement consacré à elle182. Et justement la mer suggère le dernier groupe des métaphores filées comme la suivante où le rapprochement entre chevelure / mer nous renvoie directement à Baudelaire:

‘La vague ample de ta chevelure
Et, dans mon âme, le désir de la noyade
(Ibid., p. 11) ’

La mer invite au voyage qui est rendu possible par la navigation. L'errance par mer inspire à Saïd cette métaphore très suggestive:

‘quand la barque du ciel
chavire dans les sillons

les cordages de la lumière
s'inversent (UA, p. 22)’

Comme l'a bien souligné la poétesse même, le navire, dans le Coran, est synonyme de salut mais, plus généralement, il est cette matrice qui conduit à une renaissance183. Cela révèle, chez Saïd aussi bien que chez Nadir, une attention particulière au choix des mots qui n'est jamais laissé au hasard.

Après avoir passé en revue tous les différents types de métaphores les plus fréquentes chez les deux auteurs, en faisant là où il était possible, une classification thématique, nous allons analyser dans le prochain paragraphe la dernière figure fondée sur une analogie.

Notes
160.

La définition appartient à Claudine Normand qui a consacré un essai sur cette figure de rhétorique ambiguë. Il s'agit de Métaphore et concept, PUF, 1976, p. 139.

161.

Meschonnic H., Critique du rythme: anthropologie historique du langage, Ed. Verdier, 1982, p. 479.

162.

Dans la troisième partie de notre étude nous allons consacrer un paragraphe à ce lien très fort entre poésie et image dans les œuvres des deux auteurs.

163.

Voilà d'autres exemples caractérisés par l'enchaînement des mêmes processus: “au flanc des steppes de l'exil” (SS, p. 46); “l'air vil pleure / son boisseau de chagrins” (MI, p. 31); “je vois la mort / poudrer ses linceuls de silence” (Ibid., p. 112); “dans mon corps veille / l'arbre multiple de la mémoire” (SF, p. 39).

164.

Voilà des exemples qui témoignent de cette vitalité de l'écriture saïdienne: “entre les lignes / les mots / qui te regardent / maladroits” (PN, p. 37); “les mots eux-mêmes / ne frapperont plus à ma porte” (DM, p. 91); “les mots rêvent leur image” (DS, p. 35); “l'enfance des mots” (PM, p. 54); “la pâte active des mots” (MI, p. 75).

165.

Il faut ajouter que le processus d'humanisation est très évident aussi dans ses recueils de contes et de fables tunisiennes où, non seulement les animaux prennent la parole en tant que protagonistes des histoires, mais aussi les éléments du paysage.

166.

Les métaphores suivantes sont soumises soit au processus d'humanisation soit à celui de concrétisation pour rendre tangible une notion abstraite: “la chevelure du doute” (SF, p. 114); “les paumes du destin” (PN, p. 48);“les paupières jumelles du sommeil” (DS, p. 47); “la pensée est une vieille femme” (PM, p. 94); “ses rubans de douleur” (MI, p. 42); “la grande plaine du quotidien” (NA, p. 46); “les couteaux de l'imposture” (SS, p. 51).

167.

À titre d'exemple, nous présentons des métaphores humanisant ou bien concrétisant le silence: “les chairs usées du silence” (NA, p. 90); “le silence est sable” (UA, p. 103); “le silence caresse / les blancs sur la page” (Ibid., p. 113); “la face du silence”(DS, p. 96); “les deux mains du silence” (PM, p. 56); “les braises du silence” (Ibid., p. 57); “son enveloppe de silence” (Ibid., p. 58); “des vertèbres pâles du silence” (Ibid., p. 76); “le cumul des silences”(MI, p. 45); “violon de silence” (Ibid., p. 115); “des clochettes de silence” (SF, p. 43); “un masque de silence” (GL, p. 48).

168.

La définition appartient à l'auteur même (Poésie entre deux rives, intervention à l'Université de St. Andrews, Ecosse, sept. 2000).

169.

Ibid.

170.

En voilà quelques exemples éclaircissants: “visage éparpillé du temps” (NA, p. 20); “aux chairs de l'instant” (SF, p. 43); “la grimace du temps” (MT, p. 39); “la barque du temps” (PM, p. 29); “l'échelle double du temps” (Ibid., p. 88); “les yeux du temps” (Ibid., p. 94); “un pain d'éternité” (GL, p. 40); “le coffret du temps” (Ibid., p. 114); “une poignée de futur” (MI, p. 13). Même chez Nadir il y a des tentatives d'apprivoiser le temps comme le montrent bien les métaphores suivantes: “Et le passé habiller d'arc en ciel / L'avenir” (LA, p. 90); “Les heures s'égouttèrent dans la clepsydre du temps” (LP, p. 170).

171.

À ce propos , voilà quelques autres exemples: “la nuit revenue / furieuse à jamais indocile / nous arrache / à nos naissances” (UA, p. 57); “le bec aigu de la nuit” (Ibid., p. 74);“le jour a beau planter / ses griffes / dans chaque matin qui revient” (Ibid., p. 76); “le jour radieux / pousse le cri muet / de sa splendeur” (MT, p. 26); “L'œil du jour illumina l'univers” (LS, p. 166); “le bouclier rond de la nuit” (FO, p. 42); “le pain clair des jours” (NA, p. 64); “long chapelet de nuits / où s'égrène l'épi éclaté des jours” (SF, p. 75).

172.

Il s'agit d'un stratagème très utilisé par les deux auteurs. À ce propos, voilà d'autres exemples de métaphorisation entraînée par un seul verbe: “un feu se surprend à mourir” (MT, p. 51); “des navires se détournaient / des remparts / pour contempler la mer” (SF, p. 34)“les quatre points / cardinaux / interrogent / les revenants d'un lointain / exil” (Ibid., p. 37); “l'attente épouse la solitude” (DS, p. 26) “la mort un temps m'a courtisée” (Ibid., p. 88); “une chèvre médite dans la cour” (DM, p. 98); “Le Miroir psalmodiait la gloire passée” (SS, p. 8); “La Montagne s'assoupissait dans l'intimité constellée” (Ibid., p. 43); “Un coquillage qui se souvient de la mer” (LA, p. 90).

173.

Voilà des exemples significatifs: “dans les bras de la nuit” (FO, p. 24); “dans l'œil / du vent” (Ibid., p. 47); “le visage du monde” (MI, p. 63); “aux lèvres filandreuses des nuages” (Ibid., p. 88); “le nombril ondoyant de la terre” (Ibid., p. 125); “les lobes de lune” (PN, p. 39); “les os du vent” (UA, p. 52); “la poitrine de l'univers” (DM, p. 37); “Les mille doigts incandescents / Du Disque adoré” (SS, p. 51); “chevelure du palmier” (LA, p. 69).

174.

Voilà quelques exemples de métaphores créées par la présence d'un adjectif “humanisant”: “larmes / avides” (SF, p. 20); “la solitude rétive (Ibid., p. 31); “dans un vol d'oiseaux incléments” (Ibid., p. 96); “des matins fidèles” (Ibid., p. 97); “des murs surpris” (NA,p. 9); “un fruit cruel” (UA, p. 26); “gradins cyniques” (Ibid., p. 83); “l'horizon est patient” (MT, p. 10); “galets pensifs” (Ibid., p. 68); “aubes indécises” (SS, p. 13); “Le vent parcimonieux” (Ibid., p. 23); “les fleuves impassibles” (LA, p. 83). Dans les exemples qui suivent, par contre, le processus d'humanisation est amorcé par la présence d'un sentiment: “sur la terre en colère” (PN, p. 26); “orgueil désintéressé du vent” (NA, p. 72); “j'ai la tristesse des dunes” (DM, p. 81); “dans l'indifférence du ciel et de la terre” (PM, p. 12); “l'exultation des sables” (LA, p. 7); “Dans l'évidente bonté de l'olivier” (Ibid., p. 72).

175.

Voilà quelques exemples d'humanisation obtenue par la simple présence de la lettre majuscule: “Sur toute terre, sur toutes eaux, dans l'Obscur et dans / l'Eclat” (LC, p. 7); “Le Miroir t'oppose son évidence” (SS, p. 15); “Message flamboyant de Vérité” (Ibid., p. 51); “Nous avions rendez-vous avec l'Aube” (LA, p. 11). Par contre les exemples qui suivent sont tous des apostrophes, l'autre procédé stylistique typiquement nadirien: “Mer et ciel confondus, t'enserre le bleu, Colline.” (LC, p. 27); “Afrique, mon continent d'ambre” (Ibid., p. 29); “Aleph, mon expression et mon tourment” (Ibid., p. 34).

176.

Voilà des exemples de métaphores soumises aux plus disparates formes de concrétisation: “les béquilles de l'espoir” (MI, p. 22); “pyramide des remords” (Ibid., p. 24); “l'urne du vide” (NA, p. 82); “les édifices d'amour” (SF, 74); “le cristal inaltéré du souvenir” (LC, p. 25); “pétales de tendresse” (SS, p. 50).

177.

Voilà d'autres métaphores aux effets surprenants: “à l'aile violente / du deuil” (UA, p. 118); “la terreur se construit / un nid confortable (MT, p. 33); “de grandes pieuvres de vide” (MI, p. 81); “Sous les griffes du vent, sous l'étirement du soir” (LA, p. 11).

178.

En voilà quelques exemples: “je suis porte / je suis fenêtre / ouvrant sur l'infini” (GL, p. 26);”des enfants de poussière” (SF, p. 15); “nos corps de pierre” (MT, p. 27); “son doigt de marbre” (SS, p. 13).

179.

Il est curieux de remarquer que Nadir revient sur la même image rapprochant l'homme du grain dans les vers suivants: “J'écoute le vent raconter la sagesse dogon / Et que l'homme soit le grain de l'univers!” (SS, p. 63).

180.

Il faut dire qu'elles ne manquent non plus chez Nadir même si elles y apparaissent moins souvent.

181.

Voilà d'autres exemples appartenant à ce groupe:“je tissais la toile abrupte / de mon destin” (DS, p. 33); “j'ai tissé un tapis avec la laine du souvenir” (Ibid., p. 88); “La lune amusée ne dit rien mais n'en pensa pas moins: «A chacun ses illusions et ses mythes. Ceux que je tisse ont, au moins, l'avantage d'être en fils de lumière argentée...»” (AM, p. 47)

182.

Il s'agit justement de Célébration de la mer (LC, p. 23).

183.

Saïd A., «Fragments de mer en fuite», Qantara, Paris, n° 16, juin 1995, p. 26.