VI. Le mystère des nombres.

Depuis l'antiquité les nombres n'expriment pas seulement des quantités mais aussi des idées et des forces car chaque nombre a sa propre caractéristique et sa spécificité. D'ailleurs «Le nombre est un signe dont l'interprétation livre le secret»316. L'interprétation des nombres constitue une science symbolique très ancienne qui remonte à Platon. Selon ce philosophe grec la numérologie était le plus haut degré de la connaissance aussi bien que l'essence de l'harmonie cosmique et intérieure. Car «La vérité est disséminée dans le nombre et la lecture du nombre est la voie vers la connaissance»317. D'après l'animisme les nombres appartiennent au domaine du mystère; en effet, lorsqu'on les prononcent ils éveillent des forces établissant un courant, tel un fleuve souterrain et invisible.

Comme pour les couleurs, il y a des nombres qui reviennent d'une manière obsédante dans les œuvres analysées. Les deux auteurs semblent exploiter les côté obscur des chiffres pour plonger davantage leurs textes dans le mystère. Pour ce faire ils puisent souvent à leurs traditions pas nécessairement liées à l’islam. En effet dans le recueil saïdien L'une et l'autre nuit, une dizaine de poèmes commencent curieusement par des chiffres, de un à dix. Interrogée à ce propos au cours d'un entretien, Saïd justifie ce choix par les mots suivants:

‘«Cet ensemble de dix poèmes m'a été inspiré par les paroles rituelles des paysans berbères du Maghreb qui, il n'y a pas si longtemps, au moment de mesurer le grain, prononçaient à chaque mesure une phrase commençant par un chiffre de un à seize. La dixième part était réservée aux pauvres. Arrivés à seize, ils recommençaient à compter à partir de un...»318. ’

Les chiffres accompagnent donc souvent les rituels où ils acquièrent des pouvoirs magiques.

Nadir parvient à faire ressortir ce pouvoir incantatoire des nombres par le biais de l'anaphore, comme le montre bien ce poème où le chiffre sept se répète sans cesse tout au long des vers319:

‘COMPLAINTE

7 portes de bronze cloutées d'airain
Et, par delà, le poudroiement des routes praticables.
7 clefs d'or et d'émeraude suspendues
Dans l'air immobile du temps.
(Et nulle main ne saurait les atteindre)
7 rumeurs plaintives de serrures vierges
Rêvant à un hymen de sang et de volupté.
7 yeux ouverts
Phosphorescence dans la nuit.
7 nénuphars voguant
Sur la face placide du lac assoupi.
7 cris, de rouille, assourdis.
Mais le serrurier se terre
Dans sa surdité emmurée. (SS, p. 12) ’

Il s'agit d'un chiffre qui revient souvent dans ses poèmes aussi bien que dans ses récits320. D'ailleurs dans la Célébration du nombre le sept est considéré comme le “Signe magique du monde” (LC, p. 44). Ce chiffre possède un fort pouvoir dans de nombreuses cultures. Dans le Coran, il est utilisé à titre allégorique, pour signifier une multitude bien numériquement supérieure. Au nombre sept sont associés les Cieux, les planètes et les houris. Dans la pratique de l'islam il y aurait sept lectures et sept sens allégoriques du Coran. Le sept est le nombre sacré par excellence, symbole de perfection. En effet, pour les soufis sept seraient les voiles à déchirer correspondant aux sept différentes étapes du chemin mystique qui mène jusqu'à Dieu321. Le fait que ce chiffre ait une forte valeur symbolique est témoigné par ce poème où le sujet poétique recourt justement à ce nombre pour scander quelques phases de sa vie322:

au septième jour de ma naissance
je parlai le langage
du monde d'où je venais
témoignai de l'ombre
qui était l'ombre
d'une autre lumière
que personne ne voyait

au septième mois de ma naissance
ma bouche prit la forme du vide
je criai pour dire le vrai
et ce que le présent m'avait appris
du passé du futur
mais personne n'entendait

la septième année de ma naissance
je rêvai ce qui avait été
sur la page quadrillée du monde
je traçai lettre après lettre
pour me souvenir
de ce qu'il me faudrait oublier
et de ce qui déjà mourait en moi
(PM, p. 30)’

Un autre chiffre au fort pouvoir symbolique est le trois323. En effet, dans toutes les civilisations et religions il exprime la totalité et l'accomplissement. On lui attribue un caractère magique et mystique324. Le trois indique la rivalité surpassée; il exprime le mystère d'une synthèse, d'une réconciliation ou bien d'une union. Ce nombre indique aussi les niveaux de la vie humaine, matérielle, rationnelle, spirituelle ou divine, mais aussi les trois phases de l'évolution mystique: la purification, l'illumination et l'union avec Dieu.

Dans ce petit poème Saïd recourt aux deux chiffres les plus riches au niveau symbolique, à savoir le sept et le trois, pour donner à ses vers une touche ésotérique:

l'ange masque
les sept regards
de l'infini cosmique

les trois clés du ciel
ouvrent sur un feu

un oiseau meurt
sans raison (GL, p. 37)’

Mais le nombre qui caractérise davantage les poèmes saïdiens est sans aucun doute le deux.Symbole d'opposition, de lutte, de réflexion, ce chiffre indique l'équilibre réalisé ou bien les menaces latentes. C'est le nombre de toute ambivalence et de tout dédoublement aussi bien que métaphore du dualisme qui préfigure le changement, le mouvement. Le deux exprime un antagonisme manifeste, une opposition contraire et incompatible ou bien complémentaire et féconde.Chez Saïd ce nombre apparaît pour indiquer l'entre-deux, le dédoublement identitaire de l'être maghrébin immigré, ou bien tout simplement de quelqu'un dont les parents appartiennent à deux nationalités différentes. En effet, tel que l'affirme l'auteure même, «naître femme d'une mère occidentale et d'un père musulman [...] C'est devoir assumer une différence de plus. C'est vivre déchirée entre deux cultures, deux appartenances, deux fidélités, deux langues, deux “codes”...»325. Et ce dédoublement sur plusieurs niveaux transparaît d'une manière obsédante de ses vers, comme en témoigne ce poème qui, dans sa brièveté parvient quand même à exprimer le sentiment de vide existentiel qui accompagne tout immigré326:

il est deux rives
à nos paroles
à nos silences
toujours un désir
pour éveiller le désir

depuis toujours mon rêve
avait ce visage

blessure d'absence
comme un blanc soudain
dans le récit
nourri d'incendies
(DS, p. 53) ’

Un autre chiffre très utilisé par les deux écrivains est le mille, qui apparaît souvent dans les textes analysés pour donner vie à une hyperbole327. Comme ce nombre indique généralement une quantité indéterminée, Saïd et Nadir s'en servent pour enrichir leurs descriptions et leurs récits en les soumettant à cet art de l'excès qui est d'ailleurs typique des œuvres maghrébines d'expression française328.

Même si le cinq est un chiffre très recourrant dans la société arabo-musulmane on le trouve rarement chez les deux écrivains329. Pour cette civilisation le cinq est tout d'abord le chiffre protecteur contre le mauvais œil. Ce dernier en culture arabe aussi bien qu'en culture berbère est une croyance fortement enracinée dans la conscience collective. Saïd exprime bien cette conviction par ce petit poème éclairant:

cinq maudit le mal

pomme claire
nourrie de la sève des doigts

un instant le ciel vacille
un instant
nos ailes s'embrasent

à la vue de tous
(UA, p. 21)’

En outre, ce nombre scande la vie de tout muslim car cinq sont les prières de la journée, les ablutions, les biens pour la dîme, les éléments de l'hajj, les types de jeûne. Cinq sont aussi les clés coraniques du mystère et les doigts de la main de Fatima. Voilà pourquoi ce chiffre a acquis même un pouvoir incantatoire. Pour Pythagore il indique l'union car il est le chiffre du centre, de l'harmonie et de l'équilibre. Lorsque Nadir le définit en tant que «Signe amoureux du monde.» (LA, p. 32), peut-être se souvient-il de cette interprétation.

Pour ce qui concerne d'autres chiffres, ils n'apparaissent parfois qu'une ou deux fois dans les œuvres analysées pour dépayser le lecteur, comme le montrent bien les vers suivants où le choix d'un nombre spécifique finit par accroître l'opacité du texte330:

huit cercles blancs
dans la profondeur de l'espace

danse des comètes
dans la transparence de l'univers

flammes pures
à l'ombre de la terre

se lève le soleil
rouges naissances

sortie au jour de signes
errant à l'envers

il leur faut retrouver
la forme mythique du soleil
(GL, p. 35)’

Le huit est universellement considéré comme le chiffre de l'équilibre cosmique; dans le poème précédent il est associé à la figure géométrique symbolisant la perfection et cela indique que le choix de ce chiffre n'est pas du tout casuel, la poétesse voulant mettre l'accent sur l'harmonie de l'univers.

Si les deux écrivains recourent souvent aux nombres et mettent en relief leur pouvoir sur la réalité, cet intérêt est beaucoup plus explicite chez Nadir qui parvient même à donner une signification très personnelle et originale aux chiffres de un à neuf dans un récit s'intitulant, à juste titre, Le Chiffre. L'auteur se cache derrière un personnage androgyne qui, grâce à son imagination bouillonnante, parvient à donner aux nombres un caractère concret. Dans ce passage les métaphores s'enchaînent pour visualiser des concepts aussi abstraits que les chiffres:

‘Bien vite, elle sut compter et elle passait le plus clair de son temps à tracer sur le sable les neuf nombres. A chacun, elle inventait une figuration et une personnalité propres, une vie particulière. Ainsi le premier nombre, eka, lui semblait être un maillon, le premier maillon d'une chaîne. Elle le voyait fortement arrimé à une colonne gigantesque, axe primordial du monde: le ciel éteint et rallumé, les forêts et les marées, la terre dans la succession des travaux et des jours, les bêtes et les plantes, les vivants et les morts, une chaîne infinie grâce à laquelle perdure le monde.
Le second nombre, dvi, lui paraissait être une corde. Non pas la stupide corde qui sert aux petites filles à sauter et à jouer, mais une corde de soie, douce et solide, qui sert à nouer et à relier: la mère et le père, la vache et le taureau, le soleil et la lune, la fleur et le pollen.
Le troisième nombre, tri, était le résultat du précédent: le bébé dans les langes, l'agneau fragile sur ses pattes, le croissant de lune et le bourgeon sur la branche.
Le quatrième, catur, représentait à ses yeux une niche, une cahute dans la forêt, un havre: une maison protectrice de la mousson, le toit du ciel qui retient la chute des astres.
Le cinquième, panca, était une main, la mère de sa mère caressant ses cheveux; et un souffle de la brise faisant onduler les champs de blé.
Le sixième, sat, était une toupie tournant sur elle-même jusqu'à l'extrême vertige.
Le septième, sapta, était au contraire une statue immobile dans une attitude de majesté. Métamorphose chiffrée de la figure du Bouddha, elle y voyait la nacre pure de la perle, la transparence des voiles et l'éclat de la rose.
Le huitième, asta, était comme le dédoublement des choses, une enfilade de miroirs répercutant, sans fin, l'écho des visages.
Le dernier enfin, nava, était comme l'autre bout de la chaîne, le dernier maillon. Mais à quel axe, à quelle colonne se rattachait-il? Elle ne le voyait pas, ne pouvait même pas le deviner ou l'imaginer... (LP, pp. 72-73)’

Cependant le chiffre qui fascine davantage Nadir est le zéro, protagoniste indiscutable de ce récit où tout gravite autour de ce nombre enveloppé de mystère. Dans le passage suivant, où le narrateur donne une suite de définitions du zéro, on perçoit tout l'effort de l'auteur dans la tentative d'expliquer la nécessité de l'existence de ce nombre très particulier:

‘Elle leur parla de la possible existence d'un dixième nombre qui pourrait être, à la fois, le comble du vide et la plénitude du plein, comme la chambre vide autour de laquelle s'étaient construites les pyramides: un nombre qui, par son essence, nierait tous les autres mais qui, par ses effets, les porterait au zénith de leur puissance. Un nombre qui serait l'alpha et l'oméga, la mesure des choses, de toutes les choses et, en même temps, leur négation. Un nombre qui serait le Chiffre de l'Univers, sa marque évidente et pourtant énigmatique. (Ibid., p. 81)’

Les deux auteurs exploitent donc tous les moyens (en l'espèce les chiffres avec leurs différentes significations) pour transformer leurs œuvres en de véritables “forêts de symboles”, qui ne se révèlent qu'au lecteur le plus attentif.

Dans le dernier chapitre nous nous occuperons de ce trait typique de la modernité littéraire qu’est l’intertextualité, tantôt évidente tantôt sous-entendue, comme si les deux auteurs s’amusaient à jouer avec leur lecteur en l’invitant à découvrir cette suite de devinettes que peut devenir la rencontre, explicite ou implicite, de deux textes d'origine différente.

Notes
316.

Ben Taleb O., «Errance et connaissance: aux sources de l’écriture nadirienne», dans Regards sur la littérature tunisienne contemporaine, cit., p. 147.

317.

Ibid., p. 148.

318.

Saïd A., «Ma part de nuit», cit., pp. 90-91.

319.

Voilà deux autres exemples montrant l'emploi anaphorique du chiffre chez Nadir: “Le lendemain, Kadath reprit sa marche... // Six jours, il marcha. / Six jours, il appela l'Araignée. / Six jours, il relança son défi. / Mais rien, sinon l'écho de sa voix démultipliée, ne répondit à ses appels, à ses appels, à ses défis et à son attente, d'heure en heure plus angoissée.” (AM, pp. 47-48); “Se dressent les Sept Portes du Couchant / Sept Portes de bronze cloutées d'airain. / Et, derrière chacune d'elles, / Ichtyosaures sereins / Les Sept Dormants d'Ephèse.” (LA, p. 37).

320.

Nous donnons quelques exemples éclairants à ce sujet: “Il passa sept années, errant sur la face des mers et des terres connues.” (LP, p. 167); “Le septième jour, son désespoir ne connut plus de limites, car voici que commençait à apparaître la stature impressionnante de la Porte de bronze par quoi finissaient les Gorges. Il était parvenu à l'ultime étape de sa marche.” (AM, p. 48); “D'abord il s'étonna que l'Araignée ― car ça ne pouvait être qu'Elle dans ces immenses solitudes où pendant sept jours, mis à part le Chauve possédé entr'aperçu la première nuit, il n'avait rencontré âme vive ― puisse avoir cette apparence chétive presque frêle.” (Ibid., pp.48-49); “Au bout de sept jours, le vizir sortit de son cabinet de travail.” (Ibid., p. 72); “Sept jours après la célébration du mariage, les deux anciens prétendants se retrouvèrent avec quelques amis pour des agapes bien arrosées.” (Ibid., p. 94); “Les battues durèrent sept jours” (Ibid., p. 95); “Mais sous le premier masque, apparut un second. Et ainsi de suite, sept fois...” (Ibid., p. 112).

321.

“Au dessous du masque, il y a encore un masque. Ainsi, par sept fois, le Visage se dérobe.” (LC, p. 51); “Et au bout de l'ascension maintenue / Voici que t'apparaissent les Sept voiles initiatiques. ” (Ibid., p. 52).

322.

Ce chiffre est très fréquent aussi chez Saïd. Voilà quelques exemples extraits de ses poèmes aussi bien que de ses contes: “dans le calendrier inépuisable du temps / j'accède au septième jour de toi” (DS, p. 29); “nous suivrons du regard d'invisibles navires / en comptant jusqu'à sept à sept reprises” (Ibid., p. 47); “il reste sept portes à franchir” (Ibid., p. 107); “un jour de juillet j'ouvre les yeux / dans la ville aux sept portes” (PM, p. 39); “trahie la parole / sept fois proférée” (Ibid., p. 90); “gardiens des signes de l'aube / les sept noms de la lune / ont été récités / pour faire venir l'absente” (GL, p. 52); “Dès que mon fils eut sept ans, je réunis les grands de mon royaume et tentai de leur expliquer les avantages du pouvoir héréditaire.” (LS, p. 33); “Il a beau expliquer qu'il a charge de sept filles, qu'il lui est déjà difficile de les nourrir, Haroun ne veut rien entendre, un calife ne revient jamais sur ses décisions.” (Ibid., p. 66); “Grandioses furent les réjouissances, qui ne durèrent pas moins de sept jours et sept nuits et dépassent toute description” (Ibid., p. 90).

323.

C'est un nombre qui revient très souvent dans les textes analysés. À ce propos, nous donnons quelques exemples éclairants: “trois vieilles femmes mâchonnent / des pierres en surveillant le siècle” (PM, p. 87); “lèvres serrées / contre le poing de la nuit / sur trois consonnes oublieuses” (Ibid., p. 90); “saurons-nous en finir / avec l'incendie qui ravage / notre nuit trois fois maudite” (GL, p. 77); “lorsque au terme du chemin / se présentent trois voies j'hésite / à emprunter celle des hommes” (GL, p. 113); “rêver ces noms par trois fois oubliés” (MI, p. 76); “Après les trois jours de deuil rituels, le Conseil de l'Ile se réunit pour la consécration du nouveau prince régnant.” (LP, p. 93); “dans trois ans, jour pour jour, à trois heures de l'après-midi au détour de telle rue de la ville de Samarkande, quoi qu'il fasse, où qu'il tente de fuir pour différer, voire pour annuler, ce rendez-vous, elle le retrouverait pour une dernière étreinte” (AM, pp. 139-140); “Trois roses dans ta paume, écloses” (LA, p. 59).

324.

“3 trois 3 / Signe mystique du monde.” (LA, p. 30).

325.

Saïd A., «Éléments d'origines», cit., p. 46.

326.

À ce propos, voilà d'autres exemples où l'écrivaine utilise ce chiffre pour mieux exprimer sa condition d'instabilité perpétuelle: “j'avais deux visages je vivais dans deux mondes” (DS, p. 12); “j'étais cette étrangère qu'accompagnait le soir / deux fois étrangère entre nord et sud” (Ibid., p. 87); “on a effacé mon nom de tous les registres / jusqu'aux épousailles des deux rives” (Ibid., p. 90); “nous avons lutté / pour conquérir notre être / trouver le Lieu / le meilleur des deux mondes” (Ibid., p. 99); “elle est les deux côtés du seuil et le seuil même / et l'étranger familier qui le franchira” (PM, p. 21); “toujours entre deux départs / nous portons nos décombres / précieux comme des enfants” (GL, p. 75); “alliance entre deux lieux / j'avance sur le fil de la vie” (Ibid., p. 112); “j'absorbe et questionne / nos silences nomades / failles d'espace / entre deux ailleurs” (SF, p. 40); “de lourds cheveux de femme / forment les deux rives / où je demeure” (Ibid., p. 67); “nous sommes deux à vivre / sur deux rives semblables” (Ibid., p. 79); “en marche plus loin encore / qu'entre deux lieux le lieu rêvé” (DM, p. 70); “je me tiens dans l'entre-deux / interrogeant toute vie” (MT, p. 96); “et pris entre les feux de deux déserts troubles / qui cherche à sa démarche / l'infime / et l'infini tracé” (PN, p. 17).

327.

Voilà quelques exemples d'hyperboles obtenues par le biais de ce nombre: “je suis mille je suis une” (DS, p. 29); “j'assiste à nos résurrections / vierge de la mémoire / de qui vécut mille vies” (PM, p. 64); “le moyen de transmuer le vil métal en or rutilant plus doux à la caresse que la plus satinée des peaux de femme, plus agréable, dans son tintement, à l'ouïe que les mille fontaines de Fez” (LP, pp. 25-26); “Mille fois, je réexaminai le texte de cette conclusion. Ma retranscription devait être erronée. Une des sept collines de mon île s'appelait, effectivement, depuis toujours, la colline du Septentrion.” (LP, p. 91); “Les rues étaient désertes et l'on ne distinguait dans la vague rumeur du silence que le chant cristallin des mille fontaines de marbre qui étaient l'orgueil de la cité asiate.” (AM, p. 141); “Il y eut un long sifflement / Et l'éclat de mille soleils...” (LA, p. 82).

328.

Nous donnons par la suite des exemples où le nombre mille est utilisé pour suggérer une quantité indéfinie: “et nous serons toujours / d'un pays et de mille” (SF, p. 41); “l'image a mille points d'éclat / où s'incrustent les cicatrices / de l'ombre” (Ibid., p. 66); “éternel étourdi des mille nuits du siècle” (PN, p. 17); “l'insolation à mille feux où s'abreuvent ses / écarts” (Ibid., p. 23); “Comment retrouver mon visage / Dans les mille éclats de la brisure?” (LC, p. 39); “Quand l'Un se fracasse / Dans les mille brisures du Multiple.” (Ibid., p. 51); “Alors t'apparaît, non Sa face attendue, mais / un Miroir / Resplendissant de mille reflets.” (Ibid., p. 52); “S'embrasent quand les caressent / Les mille doigts incandescents / Du Disque adoré” (SS, p. 51).

329.

Voilà le peu d'exemples contenant ce chiffre: “Ton nom au goût de miel / Macuilxochitl, la déesse aux Cinq Fleurs” (LA, p. 58); “cinq flammes d'un feu froid / entre les mains du poète” (GL, p. 39); “les cinq doigts de ma main / brûlent comme des cierges” (Ibid., p. 80).

330.

À ce propos, voilà d'autres exemples significatifs: “tel un oiseau dévoré par ses plumes / tu leur impose tes douze volontés” (NA, p. 56); “seul avec la quatorzième pensée de la journée” (PM, p. 70);“dans le noir un enfant crie / pour la vingt-sixième fois” (MI, p. 39).