4.6. Le type de cadeau en évolution

Certains types de cadeaux, qui se développent de plus en plus, transgressent les principes que l'on vient d'évoquer.

On peut voir apparaître de plus en plus de chèques-cadeaux dans les magasins où les slogans de vente sont du type : « faites plaisir, laissez choisir » (NafNaf) ou « c'est vous qui offrez, c'est lui qui choisit » (Fnac), « le cadeau c’est moi, le choix c’est toi » (Fnac), ou encore « Le vrai plaisir … c’est de recevoir les cadeaux dont on a vraiment envie » (Carrefour).

Les chèques cadeaux transgressent la règle du secret du prix puisque le receveur le connaît et la règle de l'objet-surprise puisque le receveur va choisir lui-même. Mais l'affluence de ce nouveau type de cadeau nous montre que cela convient aux offreurs qui préfèrent sans doute s'assurer du plaisir du receveur, même s’ils doivent nier les principes de bienséance que les guides de savoir-vivre nous conseillent.

Le risque d'erreur dans le choix du cadeau est nul, donc l'offreur ne peut pas perdre la face mais on peut se demander si, pour le receveur, le plaisir n'est pas d'un autre ordre étant donné que cela représente un évitement du choix. La prise de risque pour la relation est minimisée par l’absence de choix mais cette même absence de choix peut être offensante pour le receveur. Cela dépendra vraiment de la relation entre l’offreur et le receveur, leur statut, leur âge et le type de lien qui les unit.

Le second exemple est le cadeau de mariage. En effet, de nos jours la majorité des futurs mariés constituent des listes de mariage dans lesquelles ils signalent aux invités les cadeaux qu'ils souhaiteraient. Ici, plusieurs règles sont transgressées : celle du prix, de l'objet-surprise et celle que nous rappelle Montant qui est que « le receveur ne doit pas réclamer un cadeau » (1998 : 454).

On retrouve donc dans ce cas les mêmes changements dans l'attitude de l'offreur que pour l'exemple précédent, mais en plus le receveur prend de lui-même une position différente car c'est lui qui prend l'initiative du cadeau. Même si le cadeau de mariage est motivé par un caractère d'obligation, c'est le receveur qui s'assure du plaisir qu'il éprouvera puisque c'est lui qui choisit le cadeau. De plus, le receveur n’est pas obligé de prendre le cadeau choisi par l’offreur. L’offreur fait un choix fictif car le receveur utilise ensuite la somme d’argent comme bon lui semble sans forcément choisir ce que les offreurs auront choisi dans la liste. Ces listes se font aussi de plus en plus pour les naissances et le principe est exactement le même. De plus, internet permet aujourd’hui de démocratiser et de faciliter ce type d’échange.

Ces deux exemples nous montrent à quel point la pression que peuvent ressentir les participants lors de l'offre est importante et qu'elle nous pousse doucement à l'éviter pour que chacun sauve sa face de manière indirecte. L'existence de plus en plus fréquente de ce type de cadeau nous prouve que chacun y « trouve son compte », c'est le plaisir du receveur qui prime, quitte à transgresser les règles imposées par la bienséance.