B) Le local en référence au national 

Le choix de la forme monographique, pour aborder la question du pouvoir local et du pouvoir culturel, pose bien évidemment la question du statut du local dans la démarche engagée. Vincent Dubois, dans son ouvrage cité plus haut relatif à la recherche socio-historique, situe la question sous la forme d’une alternative : “ le local comme objet, ou le local comme site ”106, renvoyant la première proposition dans le champ d’un “ localisme ” qui aurait pour objet d’approfondir la connaissance d’un espace local, et non pas de saisir la question plus vaste des politiques culturelles locales. La seconde proposition, en revanche, le local comme site, implique de “ le considérer moins sous l’angle de ses spécificités que sous celui des observations généralisables dont il peut être l’occasion. 107 .

Ainsi, dans notre approche du cas d’Annecy, nous prendrons en compte de manière constante l’élaboration de politiques publiques dans le domaine culturel et socioculturel. Tout d’abord en raison de la période considérée, car elle correspond, pour ce qui est le début au moins, au moment fort de la production par l’Etat de nouvelles normes d’action, à travers des programmes d’équipements, à travers la reconnaissance de la professionnalisation nécessaire des acteurs, par la formulation d’une ambition politique dans le cadre du Plan. Est-ce que, par exemple, la ville entre dans ce que Erhard Friedberg et Philippe Urfalino ont appelé le “ jeu du catalogue ”108, qui pousse les municipalités à se doter de l’ensemble des outils d’une politique culturelle ? Nous nous appuierons à cet effet sur les travaux multiples entrepris sous l’égide du Comité d’histoire du ministère de la Culture, relatifs aux politiques culturelles.

Dans le même sens, il nous faudra référer cette action municipale à celle des grands mouvements associatifs, en particulier les fédérations d’éducation populaire, qui ont contribué dans une très large mesure à la constitution d’une politique du ministère de la Jeunesse et des Sports, et qui ont souvent fourni un cadre organisationnel aux collectivités. Cette direction de recherche a été suivie au sein de l’Institut national de l’éducation populaire, à travers une série de colloques et de publications des Cahiers de l’Animation jusque dans les années 80109. Ces travaux nous fourniront, avec ceux, classiques, de Jacques Ion et Jean-Pierre Augustin110, les bases de références relatives à ce secteur d’activité.

Notes
106.

Vincent Dubois, Institutions et politiques culturelles locales  ( …), op.cit., p. 36

107.

Ibid, p. 36

108.

Friedberg Erhard et Urfalino Philippe, Le jeu du catalogue, les contraintes de l’action culturelle dans les villes, Paris, La documentation française, 1984.

109.

L’INEP, établissement public de formation et de recherche du ministère de la Jeunesse et des Sports, disposait jusqu’à la fin des années 80 d’un Département des études de la recherche et des publications qui a assuré les premiers travaux de recherche sur cette histoire. Raymond Labourie et Geneviève Poujol en étaient les principaux responsables.

110.

Augustin Jean-Pierre et Ion Jacques, Des loisirs et des jeunes. Cent ans de groupements éducatifs et sportifs, Paris, Les Editions Ouvrières, 1993 ; Ion Jacques, La fin des militants ?, Paris, Les Editions de l’Atelier, 1997 ; Augustin Jean-Pierre et Gillet Jean-Claude, L’animation professionnelle. Histoire, acteurs, enjeux, Paris, L’Harmattan, 2000.