III) La cogestion : le succès d’une formule politique

Progressivement la formule de la cogestion couvre différentes activités en relation avec la jeunesse. Ainsi l’UCPA (Union des Centres de Plein Air) est créée en 1965 par la fusion, sous la houlette de Maurice Herzog, de l’Union Nautique Française et de l’Union des Centres de Montagne, créés au lendemain de la guerre par les mouvements de jeunesse, avec une partie du patrimoine des chantiers de jeunesse de Vichy.628 Sa gestion est collégiale et associe plusieurs dizaines de mouvements et fédérations aux pouvoirs publics qui, en échange, appuient massivement son développement en faveur des loisirs sportifs de plein air par des investissements considérables, dans le cadre du Plan d’équipements sportifs et socio-éducatifs bien entendu. De même dans le domaine des voyages de jeunes sont créés GOGEDEP et ATITRA, sur le même principe, puis COTRAVAUX pour les chantiers de jeunes bénévoles. A chaque fois, le support de la loi de 1901 permet d’associer à l’Etat les grands mouvements associatifs de jeunesse et d’éducation populaire pour développer de nouvelles activités en faveur des jeunes. Les mouvements y trouvent une légitimation de leurs orientations par un engagement dans une action qui a incontestablement une dimension publique. En retour l’Etat gagne une démultiplication de ses moyens opérationels, et favorise, pour reprendre une expression très en vogue à ce moment, un “ foisonnement des crédits ”, par des participations multiples à tous les niveaux : ministères et organismes sociaux, conseils généraux et municipalités, comités d’entreprises, etc. La cogestion apporte en outre au secrétariat à la Jeunesse et aux Sports, par son mode participationniste, une légitimité démocratique certaine, à l’opposé du modèle dont Malraux s’était fait le chantre, basé lui sur la dimension charismatique de l’artiste et de l’œuvre. Ce modèle n’a fait l’objet d’aucune définition formelle de la part des services de l’Etat ; à l’inverse, le domaine du sport bénéficie en 1964, d’un  Essai de doctrine du sport  élaboré à la demande de Maurice Herzog, par une commission dont la présidence était assurée par Jean Borotra, le Commissaire général à l’éducation physique et aux sports de Vichy, de juillet 1940 à avril 1942629.

Notes
628.

Sur la genèse de cette fusion, l’ouvrage de Waks Fabienne et Marcé Antoine, UCPA 1965-2005. 40 ans de passion, Paris Textuel, 2005.

629.

Jean Paul Callède, dans Les politiques sportives en France. Eléments de sociologie historique, Paris, Economica, 2000, a restitué la postérité du Borotra de Vichy dans la construction politique du sport en France après la guerre.