D. Une « apparence de défaut » dans les rapports avec le destinataire

« Excusez cette apparence de défaut dans nos rapports. Je ne saurai jamais m’expliquer » : il me faut citer de nouveau cette adresse liminaire des Douze petits écrits – qui au-delà de Paulhan s’adresse à l’ensemble des destinataires potentiels – car elle caractérise de manière significative les ambiguïtés de la relation de Ponge à son public. Elle signale l’importance du destinataire, en lui donnant une place privilégiée, et simultanément le maintient à distance. De ce « je ne saurai jamais m’expliquer » initial, Jean-Marie Gleize donne le commentaire suivant :

‘C’est bien pourquoi il y a littérature. Le lecteur est, sera, pour Francis Ponge, toujours là, à portée de voix, proche. Mais aussi toujours loin, absent, séparé de celui qui parle par le défaut des langues, et l’immense embarras de la communication127.’

Dans les années vingt cette relation se joue dans le cadre d’un rapport de forces, dont les deux pôles sont d’une part la revendication du rôle de bouffon et d’autre part, paradoxalement, l’aspiration à s’imposer.

Notes
127.

J.M. Gleize, Francis Ponge, op. cit. p. 34.