Contexte historique

L’un des précurseurs le plus importants des recherches archéologiques en Ardèche est Jules de Malbos. Il fouilla quelques cavernes qui lui avaient servi de refuge sous la Révolution. Il publia ses recherches en 1838-1839. Ses principaux successeurs furent J. Ollier de Marichard (1824-1901), L. Chiron (1845-1916) et P. Raymond (1859-1944). C'est à l’instigation de ce dernier et de E. Rivière, qu'un comité de dix savants s'est réuni à Paris le 7 décembre 1903 et a établi les statuts de La Société Préhistorique de France. En 1904, paraît le premier numéro du Bulletin de la Société Préhistorique de France. Cette phase ancienne des recherches a été marquée par la publication des ouvrages principaux de ces trois chercheurs ardéchois, respectivement : « Recherches sur l’ancienneté de l’homme dans les grottes et monuments mégalithiques du Vivarais » (1869), « La Préhistoire dans le Vivarais » (1896) et « L’arrondissement d’Uzès avant l’histoire » (1900) (Combier, 1967, 1976). Des recherches plus méthodiques et intenses reprirent en 1937. Loin d’être exhaustifs, nous ne citerons ici que les travaux concernant les sites ayant livré des niveaux du Paléolithique moyen. Les premières récoltes organisées de faune et d’outillage furent notamment conduites par P. et A. Huchard à la grotte du Figuier. Les travaux de M. Veyrier fournirent des coupes stratigraphiques détaillées de plusieurs remplissages. De 1954 à 1957, à la Baume Flandin (commune d’Orgnac-l’Aven), trois chercheurs, L. Gautier, S. Gagnière et C. Hugues, habituellement focalisés sur la préhistoire vauclusienne, entreprennent des fouilles dans les niveaux moustériens de la salle. Leurs travaux aboutirent à une publication au Congrès Préhistorique de France organisé à Poitiers en 1958 (Gagnière et al., 1958). Des années cinquante aux années quatre-vingts, R. Gilles, correspondant de la circonscription des Antiquités Préhistoriques de la région Rhône-Alpes, se consacra à la prospection de nouveaux gisements dans lesquels il fit des fouilles méthodiques approfondies d’une très grande qualité. C’est notamment le cas de l’Abri du Maras et de la grotte Saint-Marcel, qui comptent parmi les gisements paléolithiques moyens les plus importants d’Ardèche. Exception faite de la grotte du Figuier, J. Combier entreprit à la même période des fouilles prolongées dans tous ces sites moustériens, ainsi que dans les gisements d’Orgnac 3 et de Balazuc. Ses travaux conduisirent à un travail d’ensemble sur le Paléolithique de l’Ardèche (Combier, 1967). Dans les années quatre-vingts, des investigations dans plusieurs gisements ardéchois eurent également lieu dans le cadre du bilan sur la dynamique sédimentaire des porches de grottes et d’abris-sous-roche du Bas-Vivarais entrepris par E. Debard (1988). Ce travail de doctorat permit entre autre la reconstitution paléoclimatique et chronologique de nombres de remplissages de sites étudiés dans ce travail. Une large partie des collections mises à notre disposition provient des travaux de ces chercheurs (collections du Musée d’Orgnac, de J. Combier et de la mairie de Saint-Cécile-les-Vignes dans le Vaucluse). L’autre partie vient des fouilles plus récentes organisées par M.-H. Moncel dans les sites de Payre (1990-2003) et dans les sites d’Ardèche méridionale tels que l’Abri du Maras, la Baume Flandin, l’Abri des Pêcheurs et la grotte du Figuier (2005-2007) (collections du musée d’Orgnac).

Parallèlement aux premières recherches en Ardèche, E. Arnaud publia en 1869 l’un des premiers articles conséquent sur la préhistoire vauclusienne. Cet article est presque entièrement consacré aux recherches qu’il mena à la Baume des Peyrards en 1866-1867. Le Moustérien est reconnu dans ce site en 1883 par G. et A. de Mortillet. A la suite de cette attribution, H. Nicolas fouilla plusieurs sites de cette période en Vaucluse (Caromb, Sablons, Moirmoiron, Baume Troucade et grotte de la Masque) qu’il publia de façon détaillée dans de nombreuses revues nationales et locales. En 1904, dans le premier Bulletin de la Société Préhistorique de France, F. Moulin publie une monographie remarquable sur « l’abri moustérien du Bau de l’Aubesier » qu’il fouille depuis trois ans. Celle-ci sera suivie d’une courte discussion sur l’intérêt de ce site et sur son attribution avérée à « l’époque du Moustier », faisant intervenir P. Raymond, A. de Mortillet et E. Rivière. En 1910, M. Deydier & F. Lazard publient leurs nouvelles recherches sur le site de la Baume des Peyrards. Tout comme F. Moulin au Bau de l’Aubesier, ces deux auteurs feront une étude détaillée et minutieuse des coupes stratigraphiques. Par la suite, verront le jour plusieurs ouvrages synthétisant les travaux de cette période riche en intiatives privées. En 1911, M. Deydier 1 publie « Le Préhistorique aux environs du Mont Ventoux », dans lequel il mentionne les principaux sites moustériens du département déjà connus ainsi que les stations nouvelles découvertes autour et sur le Mont-Ventoux. En 1920, un ouvrage intitulé « La Provence Pléistocène » établit une synthèse des recherches préhistoriques dans la région, dans laquelle est fournie une carte détaillée situant les principaux gisements (Cotte, 1920). F. Lazard publiera quant à lui, en 1943, « Les environs d’Apt préhistorique », ouvrage qui recense les travaux et découvertes réalisés depuis un demi siècle dans le vallon de Buoux, le versant nord du Lubéron et le plateau des Claparèdes. Dans les années trente, les gisements de La Combette et de la grotte de Valescure sont découverts. En 1941, la loi du 27 septembre sur les fouilles archéologiques freinera les initiatives personnelles au profit de celles de l’Etat. A partir des années cinquante, sous l’impulsion de S. Gagnière, alors Directeur des Antiquités Préhistoriques, H. de Lumley entreprend plusieurs campagnes de fouilles ainsi qu’une étude approfondie des sites moustériens du Vaucluse dans le cadre d’un vaste travail de recherche sur Le Paléolithique inférieur et moyen du Midi méditerranéen dans son cadre géologique (Lumley, 1962, 1969). Parmi les nombreux sites vauclusiens abordés dans cette étude, la station de Bas Guillotte dans la vallée de l’Ouvèze, celle des Sablons dans la plaine de Carpentras, le Bau de l’Aubesier dans les gorges de La Nesque, la Baume Troucade dans la vallée du Cavalon et la Baume des Peyrards dans la montagne du Lubéron, ont particulièrement retenu l’attention de ce chercheur. Son analyse des séquences stratigraphiques des gisements de la Baume des Peyrards et du Bau de l’Aubesier lui permit d’établir les cadres chronologique, environnemental et culturel de toute la région, références qui sont encore aujourd’hui incontournables (Texier, 2004a).En 1986, A. Tavoso entreprend une campagne de fouilles à l’abri moustérien de La Combette. Celles-ci seront poursuivies par P.-J. Texier de 1987 à 1994. Parallèlement, une équipe québéquoise, dirigée par S. Lebel, entame en 1987 des recherches au Bau de l’Aubesier, tandis que J.-Ph. Brugal découvre en 1988 le gisement de plein-air de Bérigoule (Brugal et al., 1989 b). Il le fouillera en collaboration avec J. Jaubert et P.-J. Texier jusqu’en 1991 (Buisson-Catil, 1994). Les ossements de la Baume des Peyrards étudiés dans ce travail sont issus des campagnes de fouilles de M. Deydier & F. Lazard (collections du Musée Requien, Avignon) et de celles plus récentes de H. de Lumley (collections du CERP, Tautavel).

Notes
1.

Il est intéressant de noter que lors d’une fouille à Bonnieux en 1903, M. Deydier, aux côtés du Dr. P. Raymond et de deux autres préhistoriens, eut l’idée de la création de La Société Préhistorique Française.