Présentation du gisement

Géologiquement, le gisement appartient à l’ensemble jurassique calcaire de l’Ardèche qui borde les terrains cristallins du Massif Central au Nord-Ouest et les coulées basaltiques du plateau volcanique du Coiron à l’Ouest. La rivière La Payre prend d’ailleurs sa source dans le massif du Coiron, charriant avec elle des galets de basalte que les hommes ont collectés dans la vallée. L’ensemble de la falaise rocheuse bordant le petit canyon est plus précisément attribué au calcaire secondaire du Kimmérigien-Portlandien. Ce calcaire est riche en bancs de silex dont certains se situent à proximité du site. Ce silex diaclasé, inutilisable pour la taille, n’a pas été choisi par les Néanderthaliens. Ils lui ont préféré un silex de meilleure qualité, collecté à une dizaine de kilomètres au Sud et caractérisé par sa couleur marron «chocolat au lait» : le silex de Rochemaure (Ardèche). Le gisement fait partie, comme la plupart des sites de massif calcaire, d’un complexe karstique encore légèrement actif, et qui compte plusieurs petits abris ou fissures plus ou moins comblés par des sédiments venus du plateau par le réseau. Le remplissage est donc essentiellement dû à l’arrivée de ces sédiments allogènes. L’entrée du réseau subsiste aujourd’hui sous la forme d’un petit boyau résiduel de dix mètres de long et de un à deux mètres de hauteur et de largeur. Ce boyau, orienté plein Ouest fait figure de point origine pour le carroyage.

Le site se présente comme une petite terrasse, d’une vingtaine de mètres de longueur et d’une dizaine de mètres de largeur, dominant la falaise (fig. 15). Celle-ci est une succession en escalier de brefs paliers rocheux. Ces derniers s’élargissent et deviennent plus fréquents vers le sommet, et c’est dans cette partie supérieure que se situe le gisement de Payre. Il est composé de deux petits abris-sous-roche (seuls témoins rocheux n’ayant pas été détruits par l’érosion), dont l’un est l’entrée du boyau relié au réseau karstique (Payre II, à l’Est) et l’autre, plus petit, est contigu au boyau (Payre I, à l’Ouest). Payre I et Payre II sont un même gisement ; en effet la séquence stratigraphique est commune à toute la terrasse. Ils marquent l’emplacement d’une ancienne grotte composée de deux petites salles dont le plafond s’est effondré petit à petit au cours du remplissage, faisant de ce site une grotte puis un abri sous roche (habitat correspondant à la dernière occupation humaine, il y a environ 80 000 ans) et enfin une terrasse à l’air libre (fig. 16, 17 et 18). Les hommes, pendant les 120 000 ans environ que durèrent les occupations successives à Payre, sont donc revenus «régulièrement», en alternance avec des Carnivores, malgré l’évolution de l’aspect du lieu. Nous pouvons donc penser qu’ils ne recherchaient pas là un type particulier d’habitat mais peut-être de bonnes conditions de collecte de viande et de matières premières. Le versant sur lequel se trouve le site ayant été exploité en carrière, on ne peut malheureusement pas connaître la topographie des alentours au moment des occupations humaines.

Les fouilles se sont donc déroulées sur la terrasse en plein air. Environ quatre-vingt mètres carrés ont été fouillés. La fouille concerne cependant principalement une trentaine de carrés. Payre II, où le remplissage est le plus épais, a été l’endroit des investigations les plus importantes (Moncel, 1993 ; Moncel et al., 1993, 2002).