Les modifications de surface par les hommes

J’ai observé très attentivement la surface de chaque os sous lumière rasante afin de quantifier le nombre de stries d’origine humaine. La morphologie (cf. chp. 3.3.2.2.2.), ainsi que la récurrence et l’emplacement des stries ont été les trois critères de distinction principaux. Bien que ce chapitre se limitera à l’énumération de données quantitatives, il est selon nous indispensable d’intégrer les stries de boucherie au sein du contexte archéologique et taphonomique général de chacun des sites étudiés, et ce, préalablement à l’étude de leur localisation, nécessaire à l’identification des principaux agents responsables des modifications osseuses et à l’analyse des stratégies bouchères (chp. 4.2.1. et 5.1.1).

Sans suffire à une interprétation du rôle des hommes dans l’histoire d’un habitat, elles sont une bonne indication de l’importance de leur impact sur les modifications des surfaces osseuses des carcasses d’herbivores. Excepté pour Payre, où seuls les herbivores ont fait l’objet de mon étude, dans tous les autres assemblages j’ai également observé les restes de Carnivores qui ont pu être exploités pour leur viande ou pour leur peau. Le nombre total de restes observables considérés dans l’étude des restes striés par l’homme (NRTs : Nombre de Restes Total striés par les hommes) comprend les restes crâniens (dents non comprises) et post-crâniens observables et les esquilles inférieures ou égales à cinq centimètres observables (NRTobs).

A la BAUME DES PEYRARDS, les différents niveaux a, b et c-d de l’ensemble supérieur présentent à peu près les mêmes proportions de restes striés, respectivement, 16,8 %, 21,6 % et 17,3 % (tab. 41, fig. 76 et photo 31). De façon générale, l’ensemble supérieur compte 18,2 % d’os marqués contre seulement 5,2 % dans l’ensemble inférieur. 23,9 % des ossements non localisés stratigraphiquement ont des marques de boucherie. Les niveaux rissiens (ensemble inférieur) semblent a priori avoir été moins fréquentés par l’homme que les niveaux du Würm I et II de l’ensemble supérieur.

A la grotte SAINT-MARCEL, les proportions sont largement plus élevées, dépassant les 40 % de restes striés dans les couches supérieures et inférieures (tab. 42 et fig. 77). Au sein de l’ensemble 7, celles-ci variaient entre 30 % et 50 %. Ces fortes proportions témoignent d’occupations humaines régulières ainsi que d’une exploitation intensive des carcasses par l’homme. A ce titre, la couche u semble une fois de plus s’individualiser du fait de son plus faible taux d’os striés (28,3 %).

Dans l’ensemble F de PAYRE, les proportions de restes présentant des marques de boucherie sont à peu près les mêmes dans les trois niveaux, avec une légère baisse dans le niveau Fc-d (tab. 43 et fig. 78). Elles correspondent exactement à 17,4 % et 18 % dans les niveaux Fa et Fb et à 15,6 % en Fc-d. Elles sont similaires à celles relevées dans l’ensemble supérieur de la Baume des Peyrards.

Dans ces trois principaux gisements, les proportions de restes striés par l’homme mettent largement en évidence leur présence au sein des sites, témoignant même de leur part dominante dans l’exploitation des carcasses.

En ce qui concerne les petits gisements, deux sites montrent pour certains de leurs niveaux des pourcentages mettant en évidence une grande intervention des hommes sur le stock osseux (tab. 44 et fig. 79). Ce sont le niveau 1 et l’ensemble supérieur du MARAS, avec 26,2 % et 29,2 % d’os striés et la couche moustérienne mise au jour à l’intérieur de la BAUME FLANDIN qui en comptent 26,2 %. Au sein de ces petits gisements, un deuxième groupe d’assemblages se dessine, comprenant des taux légèrement inférieurs à ceux relevés dans l’ensemble supérieur des Peyrards et dans l’ensemble F de Payre. Il s’agit de l’ensemble inférieur du MARAS et de la couche 3 de la BAUME FLANDIN, possédant respectivement 14,3 % et 13,2 % d’ossements portant des traces de boucherie. Enfin les taux relevés dans les trois derniers sites témoignent d’une fréquentation et d’une exploitation des carcasses par les hommes beaucoup plus éphémères. A la grotte du FIGUIER nous observons 7,4 % de restes striés, tandis que dans les sites des PECHEURS et de BALAZUC (niveaux 1 et 2-3) les pourcentages s’abaissent à 3,2 %, 3,7 % et 3,1 %.