DIVERSITE DES ESPECES

Principales espèces : écologie et éthologie

La connaissance du mode de vie de certaines espèces actuelles, proches des espèces pléistocènes ou identiques à celles-ci, est indispensable à l’appréhension des techniques de chasse des hommes du Paléolithique. En effet, bien que la répartition actuelle des territoires soit incomparable avec les grands espaces sauvages recouvrant la France pléistocène, que la présence de l’homme soit sans cesse plus envahissante et que l’environnement paysager comme climatique ait été bien différent, certains comportements ont perduré. L’éthologie et l’écologie nous apprennent ainsi à différencier par exemple les espèces grégaires des espèces solitaires. De même, elles nous permettent d’apprécier les lieux et les environnements affectionnés par les animaux : forêts, steppes, climats froids ou tempérés… La communauté des espèces présentes au sein d’un site devient ainsi l’un des critères importants de la connaissance des paléoenvironnements. J’ai choisi d’effectuer cette approche pour les espèces les mieux représentées au sein des assemblages.

  • Le cerf élaphe, Cervus elaphus Linné, 1758

Classe : Mammifères

Ordre : Artiodactyles

Famille : Cervidés

Genre : Cervus

Espèce : Cervus elaphus

Le cerf a 22 dents lactéales et 34 dents définitives et ses formules dentaires sont : i 0/3 ; c 1/1 ; D 3/3 et I 0/3 ; C 0-1/1 ; P 3/3 ; M 3/3.

Le cerf élaphe est aussi connu sous le nom de cerf noble, de cerf d’Europe ou de cerf rouge. De taille moyenne à grande, sa hauteur au garrot peut dépasser un mètre cinquante et son poids 400 kg (Delpech & Guérin, in Guérin & Patou-Mathis, 1996). En France, les mâles actuels pèsent entre 150 et 200 kg et les femelles entre 80 et 110 kg. Un hiver rude peut entraîner une perte de poids de 10 à 15% chez les deux sexes, le mâle peut perdre jusqu'à 20 % de son poids pendant le brame et la femelle jusqu'à 15 % de son poids pendant la période d'allaitement. Les bois mesurent de quatre-vingts à un mètre vingt de long et sont ramifiés. Le trophée d’un cerf à sa maturité pèse en moyenne 4,5 à 6 kg (deux bois). Les bois apparaissent à l’âge de neuf mois seulement chez les mâles. Ils poussent au début de l’été, perdent leur velours en août, et tombent en février-mars pour les plus vieux et beaucoup plus tard, en mai-juin pour les plus jeunes (Macdonald & Barett, 1995). L’évolution des bois avec l’âge se déroule ainsi : le faon naît en mai-juin. Au début de l’année suivante (fin de l’hiver, début du printemps) il porte le nom de hère lorsque les pivots deviennent visibles (bosses frontales). Il devient daguet de première tête quand ses dagues (bois non ramifiés) grandissent dans le velours, à partir de juillet. Elles sont terminées fin août et perdent leurs velours pendant la première quinzaine de septembre. Le daguet est alors âgé d’un an et demi. À l'âge de deux ans, le mâle prend le nom de cerf et sera ensuite qualifié par le nombre total de pointes de sa ramure (huit-cors, dix-cors, etc...) ou le nombre de refaits, c'est à dire de renouvellements des bois, qu'il a subis (deuxième tête, troisième tête, etc...). Dans les cas les plus courants, le cerf de deuxième tête est un six-cors. Il a perdu ses dagues à la fin avril et se refait en mai-juin. Il restera en velours jusqu’à la première quinzaine d’août. Les cerfs de troisième tête sont souvent des huit cors, dix cors pour « les troisièmes têtes de grand avenir ». Puis des dix-douze cors pour la quatrième, cinquième tête. Le «grand vieux cerf» est une dixième-douzième tête. Il lui faut au moins dix ans pour que sa ramure atteigne son apogée. De dix à quatorze ans seul le poids de la ramure continuera à croître légèrement. C’est à partir de quatorze-quinze ans que les bois commencent à dégénérer en perdant des cors, on dit alors qu’ils ravalent. La longévité maximale du cerf est de vingt-cinq ans, mais en moyenne il ne vit généralement pas plus de seize ans (Riglet, 1977 ; Peyre-Mandras, 1990).

Cette espèce est apparue sous sa forme actuelle pendant le Pléistocène moyen. Plusieurs sous-espèces sont connues durant le Pléistocène, et des variations chronologiques de taille ont été mises en évidence dans la même région. Ainsi, en Aquitaine, les cerfs du Würm ancien étaient plus petits que ceux du Pléniglaciaire (Prat & Suire, 1971). Au Würm ancien, un cerf de petite taille proche de l’élaphe ordinaire a été défini dans le Sud-Ouest de la France, cette petite forme a été appelée Cervus elaphus simplicidens Guadelli, 1984.

Le cerf préfère généralement les milieux forestiers et implique donc un climat plutôt doux et humide (périodes interglaciaires) favorisant leur développement. Cependant, contrairement au chevreuil qui est plus dépendant du milieu forestier, l’espèce a pu exister à l’état relictuel sous des conditions bien plus rigoureuses, comme l’atteste sa présence sur de nombreux sites où l’analyse palynologique révèle des taux de boisement très faibles. Durant certaines périodes, il a donc pu être un animal relativement steppique, se réfugiant néanmoins dans des zones où les conditions d’exposition et d’humidité étaient favorables aux espèces arborescentes (Gonzales & Pépin, 1996). Il reste néanmoins, pour le Pléistocène supérieur, le chef de file du groupe des animaux forestiers (Delpech et al., 1983)

Le cerf, animal sédentaire, est toutefois capable de parcourir de très grandes distances. Il affectionne les forêts de plusieurs milliers d’hectares, les prairies, les landes et les broussailles, en plaine et en montagne, où il entre en concurrence avec les chamois et les bouquetins. Il se nourrit en général à la lisière des forêts. Il consomme les jeunes pousses, les écorces, les bourgeons et les rejets d’arbres, les buissons, ainsi que les jeunes graminées (50 %). En automne, il y ajoute des fruits durs (glands, faînes et châtaignes), le genêt et la bruyère. L’hiver il recherche les feuilles de ronce, de lierre et les pousses de résineux (Varin (Ed.), 1980 ; Delpech & Guérin, in Guérin & Patou-Mathis, 1996). Les cerfs aiment également brouter l’herbe tendre. Comparé aux chevreuils et aux chamois, très sélectifs sur le plan du régime alimentaire, le cerf est l’herbivore le plus éclectique. Il affectionne plus les milieux ouverts (notamment pendant l’hiver) que le chevreuil, principalement cantonné aux milieux fermés. Il s’alimente généralement de façon plus marquée à l’aube et au crépuscule, il peut également se nourrir pendant la nuit. Le rythme de vie du cerf, plus actif en été qu’en hiver, consiste en une succession de phases brèves de nutrition et de repos. Le cerf aime se reposer la journée dans un endroit caché où il se couche. Au sein d’un même massif, le modèle de déplacement annuel peut aller de la sédentarité totale à la migration saisonnière (de 15 à plus de 160 km entre le domaine d’automne-hiver-printemps et le domaine d’été), voire à l’émigration. Les domaines vitaux des mâles (pouvant aller jusqu’à 6000 hectares) sont généralement deux fois plus importants que ceux des femelles, et comportent, en plus des domaines de repos et d’alimentation, le domaine de rut. Dès les premières chutes de neige le domaine vital diminue, se situant à proximité immédiate des stations d’alimentation.

Au niveau social, les femelles et les jeunes de moins de trois ans (hères ou daguets et bichettes) forment des hardes menées par une biche âgée (matriarcat). Ces regroupements de familles, pouvant aller en milieux ouverts jusqu’à plusieurs dizaines d’individus, s’effectuent durant une longue période s’étalant de la fin juillet jusqu’au printemps. Les mâles à leur apogée sont solitaires, quelquefois accompagnés d’un «écuyer», tandis que les plus jeunes vivent en petits groupes d’une dizaine d’individus. Les hardes de mâles ont la même cohésion que celles des femelles. Elles rassemblent une majorité de jeunes et de cerfs d’âge moyen (5 à 8 ans). Cette organisation sociale est brièvement perturbée pendant le rut qui a lieu en septembre-octobre. Les mâles de plus de sept ans se constituent alors un harem (ou harpail) de biches (les plus importants sont composés d’une quinzaine de biches avec leur faon) et le défendent contre leurs rivaux. Le reste de l’année, mâles et femelles vivent séparément. Quand une harde se repose, toutes les directions sont surveillées. Un individu qui s’enfuit provoque aussitôt la fuite de la harde. Un cerf isolé s’oriente dos au vent, surveillant à vue la zone qui lui fait face et olfactivement ses arrières.

La maturité sexuelle est acquise à partir de deux-trois ans, mais les mâles ne peuvent pas s’accoupler avant cinq-six ans. Les biches peuvent être gravides à l’âge de deux ans et deviennent stériles à seize-dix-sept ans (bréhaignes). Les cerfs de deux à cinq ans qui entrent en rut ont très peu de chance de faire une saillie. Les cerfs de cinq à sept ans, ayant pourtant des stratégies élaborées, ne peuvent pas encore former un harem. Le rut dure trois à quatre semaines. Durant cette période les duels, assez rares, entraînent parfois la mort d’un des adversaires. Durant cette période, le cerf est beaucoup moins méfiant, se laissant parfois approcher de très près par l’homme. C’est une bonne période pour le chasser. La vue du cerf n’est pas très perçante et ne lui permet pas de différencier les couleurs. Il distingue assez bien les mouvements. A la fin du rut les cerfs sont épuisés, amaigris et affamés. Ils cherchent alors de la nourriture et se reposent beaucoup. La mise bas a lieu au printemps, pendant les mois de mai-juin. C’est à cette période que les biches gravides et les bichettes et daguets de l’année d’avant se séparent. Les biches partent alors mettre bas seules, dans un endroit isolé qu’elles défendent, pour réapparaître plus tard accompagnées de leur jeune faon et rejoindre la harde. Les faons naissent approximativement (à 15 jours près) autour du premier juin. Les tous premiers jours après la naissance, le jeune faon ne peut pas suivre sa mère, qui l’abandonne quelque temps pour se nourrir. La mortalité est alors de plus de 50 %. La biche allaite son petit pendant huit mois (jusqu’en février-mars de l’année suivante) (Mardyla, 1981).

Deux périodes privilégiées pour la chasse au cerf se démarquent, la chasse à l’affût au printemps le long des pistes habituellement fréquentées par les hardes de femelles et de jeunes lors de leur recherche de nourriture au sein de la végétation renaissante, et à l’automne, à l’approche ou à l’affût à proximité des lieux de regroupements pour le rut. Les animaux sont à cette période beaucoup moins méfiants, n’hésitant pas à se montrer en plein jour (Martin & Le Gall, 2000).

  • Le chevreuil, Capreolus capreolus (Linné, 1758)

Classe : Mammifères

Ordre : Artiodactyles

Famille : Cervidés

Genre : Capreolus

Espèce : Capreolus capreolus

Le chevreuil a 20 dents lactéales et 32 dents définitives et ses formules dentaires sont : i 0/3 ; c 0/1 ; D 3/3 et I 0/3 ; C 0/1 ; P 3/3 ; M 3/3.

Cette espèce est connue en Europe depuis le début du Pléistocène moyen avec une forme, Capreolus capreolus suessenbornensis Kahlke, 1956, plus grande que l’actuelle. Il est bien répandu au Pléistocène supérieur sous une forme identique à l’actuelle (Delpech & Guérin, in Guérin & Patou-Mathis, 1996).

Le chevreuil est un Cervidé de petite taille : sa hauteur au garrot peut atteindre quatre-vingt-dix centimètres pour un poids de 40 kg, la plupart du temps leur poids oscille entre 15 et 30 kg. Le mâle est appelé brocard, la femelle chevrette et le faon chevrillard, à partir de six mois. Les bois, réservés aux mâles, longs de vingt-cinq centimètres en moyenne, n’ont pas plus de trois andouillers et se développent verticalement. Ils poussent en hiver (janvier-février), perdent leur velours de mars à juin et tombent en octobre-novembre. Ils donnent très peu d’indications sur l’âge de l’animal. Aux environs de son septième mois, le chevrillard mâle laisse apparaître sa première tête, deux pivots osseux qui seront la base, sans meules, des deux dagues qu'il portera a un an. Le chevreuil, plus sédentaire que le cerf, garde son territoire de février à septembre. Il vit dans les forêts peu denses possédant des clairières et dans les prairies alentours, en plaine et en montagne. C’est sous ce rapport, un animal très sélectif. Il se nourrit le plus souvent au crépuscule, de feuilles, de pousses, d’écorces, de fruits des arbres et d’arbustes. Les graminées tiennent une place relativement modeste dans son alimentation (Varin (Ed.), 1980). Il apparaît donc plus lié au milieu forestier que l’Elaphe. Comme le sanglier, auquel il est très souvent associé, on le rencontre rarement en nombre très important dans les associations tempérées et humides du Pléistocène (Delpech et al., 1983)

Les jeunes de l’année et une chevrette se regroupent en une unité sociale pouvant compter également un brocard (chevreuil âgé d’1,5 ans dont les bois ne sont pas ramifiés). En hiver, plusieurs de ces groupes familiaux peuvent s’associer. Les mâles ont des territoires distincts qui se chevauchent rarement. Les brocards sont généralement solitaires en dehors du rut. La maturité sexuelle est atteinte entre quatorze mois et deux ans. Les mâles sont polygames. Le rut se déroule pendant les mois de juillet-août (gestation différée). Il existe un rut secondaire en septembre-octobre, mais seules un petit nombre de femelles sont fécondées durant cette période (gestation immédiate dans ce cas). Les petits (1 ou 2) naissent à la fin du printemps (mi-juin).

La plupart des Chevreuils ont moins de onze ou douze ans. Dans la nature, un mâle vit ordinairement sept à huit ans, une femelle un peu plus. Le maximum de longévité est de quinze ans. Une population comporte sensiblement plus de femelles que de mâles.

  • Le daim, Dama dama (Linné, 1758)

Classe : Mammifères

Ordre : Artiodactyles

Famille : Cervidés

Genre : Dama

Espèce : Dama dama

Le daim a 20 dents lactéales et 32 dents définitives et ses formules dentaires sont : i 0/3 ; c 0/1 ; D 3/3 et I 0/3 ; C 0/1 ; P 3/3 ; M 3/3.

Le genre Dama est de taille moyenne et se caractérise par ses bois palmés (mâles âgés). Il n’est pas connu en Europe avant le Pléistocène moyen, période pendant laquelle apparaît Dama clactoniana. Le genre existe aujourd’hui en Europe et au Proche et Moyen-Orient avec deux espèces, respectivement Dama dama (Linné, 1758) et Dama mesopotamica (Brooke, 1875) ; (Delpech & Guérin, in Guérin & Patou-Mathis, 1996). Le daim est surtout répandu dans les pays à climat tempéré. On ne le rencontre pas en altitude élevée. Il préfère rester à couvert en hiver dans des forêts hautes et touffues, à l’abri de la neige et du vent. En été, le daim recherche un habitat riche en fourrés. Il préfère d’une façon générale les forêts de feuillus à celles de résineux. Il fréquente également les prairies herbeuses (Henry, 1980). Comme le chevreuil, le daim est territorial (« campements de base » réguliers), mais à la différence de cet autre Cervidé ne défend pas son domaine contre ses congénères. Son régime et son rythme journalier sont sensiblement les mêmes que ceux du cerf et du chevreuil (herbe et produits forestiers). L’ouïe et l’odorat du daim sont, comme chez les autres Cervidés, très développés. Sa vue est excellente, la meilleure de tous les Cervidés (Macdonald & Barett, 1995). Le daim présente des dimensions intermédiaires entre celles du chevreuil et du cerf. Sa hauteur au garrot est comprise entre quatre-vingts centimètres et un mètre dix chez les mâles. Leur poids moyen est de 45 à 80 kg pour les mâles et de 25 à 50 kg pour les femelles. Les bois tombent en avril-mai et repoussent immédiatement. Ils perdent leur velours en août-septembre. Au cours des six premiers mois, le daim est appelé faon, puis les six mois suivants il devient «hère». Le daim fait sa première tête au cours de sa deuxième année (mai-juin). Le jeune mâle devient alors un daguet. On parle de daim, en précisant le nombre de têtes, à partir de deux ans. Le bois atteint son apogée entre sept et neuf ans. La longueur est alors de soixante-quinze à quatre-vingt-dix centimètres pour un poids pouvant aller jusqu’à 3,5 kg par bois (Henry, 1980).

Les sexes sont en groupes séparés comme chez les autres Cervidés. D’un côté les groupes de femelles accueillent aussi les faons et les jeunes de l’année précédente (groupes de 5 à 7 têtes au total). Les jeunes mâles restent ainsi avec les femelles pendant environ vingt mois avant de rejoindre les groupes de mâles adultes dans des espaces différents. De l’autre côté les mâles se regroupent en hardes, à l’exception des plus vieux qui vivent parfois en solitaires. En hiver ces groupes se réunissent pour former des troupes mixtes pouvant aller jusqu’à plus d’une centaine d’animaux. Dans certaines populations, notamment celles de milieux ouverts, on observe des troupes mixtes toute l’année. En cas de danger les hardes de femelles s’enfuient en restant groupées tandis que les mâles s’éloignent en se dispersant. Tandis que les cerfs élaphes se constituent des harems, les daims s’assemblent sur des «leks» (arènes) et attirent les femelles en criant. Au cours du rut, les daims en concurrence se battent très fréquemment. Comme pour le cerf, au cours de ces duels l’un des deux mâles peut trouver la mort. 90 % des copulations ont lieu sur le «lek» en octobre-novembre. Le rut dure quatre à cinq semaines mais chaque mâle est en rut environ huit jours (plus pour les vieux daims). Les naissances ont lieu en juin-juillet. La maturité sexuelle est atteinte entre sept et quatorze mois pour les mâles, mais la hiérarchie les empêche de se reproduire avant trois ans ou même plus tard, de même pour les femelles qui sont matures à seize mois mais qui ne se reproduisent pas avant l’âge de deux ans (Henry, 1980). Le daim vit au maximum seize ans dans la nature (normalement beaucoup moins) et trente-trois ans en captivité (Macdonald & Barrett, 1995).

En ce qui concerne la chasse, il est préférable de tuer les femelles en hiver et les mâles à la fin de l’été, période pendant laquelle ils sont en excellent état. Pendant le rut, leur venaison est immangeable. Après, ils sont amaigris par les efforts fournis. Pendant une chasse à courre, le daim fuit moins longtemps que le cerf et s’arrête plus souvent, mais il est en revanche plus rusé, cherchant à se dérober en revenant sur ses voies et en les emmêlant. La chasse à l’approche du daim est plus difficile que celle du cerf du fait de sa très bonne vue. Il voit souvent le chasseur avant qu’il ne soit à portée de fusil. Lors d’une chasse en rabat, celui-ci doit être serré mais sans grand bruit jusqu’à cent mètres des tireurs. La chasse à l’affût est la meilleure méthode car les daims tiennent bien leurs passages.

  • Le renne, Rangifer tarandus (Linné, 1758)

Classe : Mammifères

Ordre : Artiodactyles

Famille : Cervidés

Genre : Rangifer

Espèce : Rangifer tarandus

Le renne, comme le cerf, a 22 dents lactéales et 34 dents définitives et ses formules dentaires sont : i 0/3 ; c 0-1/1 ; D 3/3 et I 0/3 ; C 0-1/1 ; P 3/3 ; M 3/3.

Le renne est le seul représentant du genre Rangifer Frisch, 1775, H. Smith, 1827. L’apparition de l’espèce en Europe semble dater du Pléistocène moyen. Son extension au Pléistocène supérieur est considérable, il atteint la péninsule ibérique, l’Italie et le sud de la Russie. Sa distribution actuelle est circumpolaire. Il existe plusieurs formes de renne selon l’habitat : le renne de toundra, le renne de forêt et le renne américain ou caribou. L’espèce est adaptée au froid, ses phalanges latérales sont fonctionnelles pour les longues marches dans la neige, et consomme des lichens pendant l’hiver. C’est le seul Cervidé qui soit grégaire et non territorial et aussi le seul à présenter des bois chez les deux sexes. Les rennes de toundra vivent en avant de la limite des arbres dans les régions arctiques et se réfugient l’hiver au voisinage de la taïga, effectuant en grands troupeaux de vastes migrations annuelles. Les rennes de forêt vivent par petites hardes dans les bois de conifères et n’effectuent que des migrations locales (Delpech & Guérin, in Guérin & Patou-Mathis, 1996). Sa taille est moyenne, hauteur au garrot de un mètre vingt pour un poids pouvant aller de 70 à 200 kg pour un mâle et de 40 à 150 kg pour une femelle. Les animaux perdent 25 % de leur poids durant l’hiver. Outre de lichens, son régime est fait de graminées et autres plantes herbacées. En été et en hiver, de petits groupes se forment (une trentaine de têtes) conduits par un animal dominant, assez âgé, dont les bois sont les plus imposants, encadrant les grands rassemblements des migrations du printemps (dizaines de milliers d’individus) et de la fin de l’automne pour les rennes de toundra. Lors de la migration de retour vers les terrains d’hivernage, mâles et femelles se séparent. Il existe différents types de petits groupes d’été et d’hiver, ceux réunissant les mâles matures, ceux composés exclusivement de femelles et de jeunes et ceux regroupant les jeunes animaux de un à deux ans et les jeunes adultes. Les mâles rejoignent les femelles pour le rut, fin septembre-octobre, et se constituent un harem. La chute des bois débute après le rut chez les mâles (décembre-janvier) pour repousser début mars, et après la mise bas pour les femelles (de mai à mi-juin), chez elles la repousse est immédiate. Les bois des femelles sont la réplique en plus petit de ceux des mâles. La période de chute entraîne la disparition du rang social. La maturité sexuelle des femelles est normalement atteinte à dix-huit mois, tandis que les mâles ne participent pas à la reproduction avant leur troisième année. Les petits, allaités durant six mois, restent avec leur mère de un à trois ans. La longévité peut atteindre dix-huit – vingt ans (Flavigny & Nicolle, 1992), mais plus fréquemment celle des femelles est de quatorze – quinze ans en milieu sauvage et celle des mâles de neuf – dix ans (Macdonald & Barrett, 1995).

  • Les bouquetins, Capra ibex (Linné, 1758) et Capra caucasica (Güldenstaedt & Pallas, 1783)

Classe : Mammifères

Ordre : Artiodactyles

Famille : Bovidés

Genre : Capra

Espèce : Capra ibex, Capra caucasica

Le bouquetin a 20 dents lactéales et 32 dents définitives et ses formules dentaires sont : i 0/3 ; c 0/1 ; D 3/3 et I 0/3 ; C 0/1 ; P 3/3 ; M 3/3.

Le genre Capra est représenté en Europe par quatre espèces : le tour du Caucase occidental Capra caucasica, le tour du Caucase oriental Capra cylindricornis, le bouquetin alpin Capra ibex et le bouquetin ibérique ou bouquetin pyrénéen Capra pyrenaica. Seuls les bouquetins du Caucase et les bouquetin des Alpes rencontrés dans les faunes étudiées nous intéressent dans ce travail (Crégut-Bonnoure & Guérin, in Guérin & Patou-Mathis, 1996).

La lignée de Capra ibex constitue un excellent marqueur chronologique pour le Sud de la France. On observe en effet dans le domaine méridional deux morphotypes dentaires différents. Le premier est caractérisé par des troisièmes prémolaires inférieures sans métaconide et regroupe des populations de la fin du Riss et du Würm ancien (morphotype de l’abri des Pêcheurs (Ardèche), Capra ibex cebennarum). Dans le deuxième type, le métaconide des troisièmes prémolaires inférieures est isolé en colonette. Il regroupe des populations de la fin du Würm récent (morphotype de l’Adaouste (Bouches-du-Rhône). Les populations du début du Würm récent occupent une position intermédiaire entre ces deux extrêmes (Crégut-Bonnoure, 1992a). L’origine de l’espèce est encore obscure. Il semble cependant que les ancêtres de la sous-famille des Caprinés soient originaires d’Asie (Chaix  & Desse, 1994). Elle apparaît probablement en Europe à la fin du Pléistocène moyen dans des gisements rissiens comme Rigabe et le Lazaret dans les Alpes-Maritimes, Petralona en Grèce et Camburg en Allemagne. Le bouquetin alpin est un animal vivant dans des lieux à forts dénivelés (plus sensible au dénivelé des pentes qu’à l’altitude) qui, à son arrivée, se serait installé préférentiellement sur la bordure alpine. La dégradation climatique du Riss final l’a poussé dans des zones de moyenne montagne : Provence sub-alpine, Massif central, Sud-Ouest de la France. De façon générale, il est plus abondant à l’Est du Rhône où il représente l’un des gibiers que préfèrent les hommes du Paléolithique, tandis qu’il ne constitue qu’un élément mineur de l’alimentation carnée des groupes humains du Sud-Ouest de la France. Le dernier interglaciaire a été en partie responsable de sa raréfaction (Crégut-Bonnoure, 1992a).

Le bouquetin du Caucase est signalé en Transcaucasie avant le dernier glaciaire (Barychnikov, 1989). Son immigration en France se situerait, en l’état actuel des connaissances, à l’Eémien : il est présent dès la couche u de Saint-Marcel-d’Ardèche, dans la couche XV de l’Abri Moula (Crégut-Bonnoure, in Defleur et al., 2001) ainsi qu’au Portel et à Soulabé. L’installation de l’espèce en France semble avoir été favorisée par l’absence ou le faible nombre de bouquetins alpins dans les Pyrénées au début du Würm. Cette espèce est l’ancêtre du bouquetin ibérique. La forme Capra caucasica praepyrenaica est un très bon marqueur biostratigraphique (Crégut-Bonnoure, 2002). La morphologie générale du bouquetin du Caucase est nettement plus robuste et plus grande que celle de l’ibex et son crâne est caractérisé par des chevilles osseuses à section sub-ovalaire, implantées obliquement sur le frontal et régulièrement divergentes vers l’extérieur et l’arrière. La troisième molaire inférieure n’a pas d’aile métastylaire mais un métastyle subvertical ; la troisième prémolaire inférieure présente un métaconide dilaté (Crégut-Bonnoure, 1992a).

Trois mois après sa naissance les bouquetins se dotent d’une paire de cornes qui grandissent tout au long de la vie. Elles sont plus longues chez les mâles. Les cornes constituent donc un élément majeur pour la détermination des sexes. Le poids du mâle adulte varie entre 75 et 110 kg, et celui de la femelle entre 40 et 50 kg. Son régime est fait de plantes herbacées, de graminées et de lichens. Le Bouquetin a besoin d'un domaine vital très étendu pour satisfaire l'ensemble de ses exigences. Son habitat varie, selon l'âge et le sexe, entre deux et vingt kilomètres carrés. Il est composé d'au moins trois domaines saisonniers qu'il utilise régulièrement chaque année :

  • celui d'hiver (qui inclut aussi les places de rut) fréquenté de novembre à mars : dès le mois de novembre (décembre lorsque l'hiver est clément), le Bouquetin des Alpes recherche les secteurs rapidement déneigés où il pourra trouver sa nourriture. Il s'agit donc généralement de versants rocheux abrupts, exposés au Sud (adrets). Il fréquente aussi les flancs et les crêtes ventées de haute altitude. A cette période, les déplacements journaliers sont donc importants. Les boucs ne se joignent aux étagnes qu’en novembre, pour le rut, qui dure quatre à cinq semaines, de fin novembre à mi-janvier. Celui-ci est annoncé par le rassemblement des mâles de deuxième année et la dispersion des plus âgés, seuls ou en petits groupes de deux ou trois. Lors du rut proprement dit, de grandes hardes mixtes se constituent. Toutefois ces bandes ne sont pas homogènes et les sujets peuvent facilement passer d'un groupe à l'autre. Dans les colonies fortement peuplées, plus de cent animaux peuvent se rassembler sur une portion du territoire. Le rut terminé, les bouquetins rejoignent leurs quartiers d'hiver. Les hardes se désagrègent en groupes plus restreints où toutes les combinaisons sont possibles. Les groupes mixtes se maintiennent surtout lorsque les animaux sont contraints par la couverture neigeuse à se rassembler sur des stations-refuges, plus petites.
  • celui de printemps, d'avril à juin : à cette période, le Bouquetin des Alpes recherche l'herbe nouvelle. Les animaux se rassemblent donc en vastes hardes (organisation sociale de l’hiver rompue) dans les combes herbeuses et ensoleillées au bas des vallées où la repousse de la végétation a débuté en premier. Puis, au fur et à mesure du déneigement (donc de la repousse et de la croissance de l'herbe), ils gagnent de l'altitude. Fin mai, les étagnes s'isolent dans les secteurs les plus sauvages et les plus escarpés pour mettre bas.
  • celui d'été, de juillet à octobre : en juillet, les Bouquetins rejoignent les parties les plus hautes de leur habitat, où ils séjourneront jusqu'à la fin de l'automne. La migration saisonnière terminée, ils se déplacent beaucoup moins. Le territoire estival, le plus étendu, peut représenter plus de 70 % de l'espace vital total. A cette période la ségrégation sexuelle est de mise. Les femelles et les jeunes jusqu’à trois ans (éterles et éterlous) constituent à partir des mois de juin-juillet des chevrées pouvant compter jusqu’à quatre-vingts têtes. Les groupes des mâles sont plus petits et plus soudés, rassemblant seulement une dizaine d’individus. Les très vieux boucs sont solitaires.

Globalement, les domaines vitaux des mâles adultes sont plus grands que ceux des étagnes et des jeunes mâles. D’une façon générale, le domaine de prédilection de cette espèce rupicole correspond donc aux versants rocheux escarpés, plutôt exposés au Sud, peu boisés et entrecoupés de vires herbeuses et de falaises.

Le bouquetin est également une espèce polygame. La maturité sexuelle des mâles est atteinte vers dix-huit mois, deux ans pour les femelles. Pour ces dernières, la meilleure productivité se situe entre trois et treize ans avec un maximum aux alentours de huit ou neuf ans. Les mâles peuvent se reproduire jusqu'à l'âge de seize – dix-sept ans et les femelles jusque vers quatorze – quinze ans. Les naissances se font en mai ou en juin, après cinq mois de gestation, généralement dans des endroits inaccessibles. La femelle allaite son cabri jusqu’à la mi-septembre (2 à 3 mois). Le bouquetin a une espérance de vie de vingt-trois ans.

La principale activité des Bouquetins au cours de la journée (animaux diurnes) est l'alimentation. Les autres activités sont le repos, durant lequel se déroule la rumination, et les déplacements. Son besoin important en sel l’oblige à trouver des salines. L’ibex est un animal calme et flegmatique. Ses mouvements sont la plupart du temps effectués au ralenti, sans hâte ni précipitation. Le reste de la journée est consacré aux relations sociales, à l'observation et chez les jeunes, aux activités ludiques. Ainsi, les jeunes mâles consacrent beaucoup de temps à des joutes qui leur permettent de se situer au sein de la harde. Ces confrontations ont lieu toute l'année mais surtout au printemps. Les boucs adultes effectuent également ces combats qui leur permettent d'acquérir un rang hiérarchique élevé, indispensable pour participer à la reproduction. Ces animaux ne craignent ni le soleil ni le froid et les mâles, notamment, peuvent rester sept à huit heures à la même place. Cette inertie, jointe à la couleur de sa robe, lui permet de passer inaperçu au regard des hommes. Il possède une excellente vue et une ouïe et un odorat très subtils. Il a une bonne mémoire et un grand sens de l’orientation. Cependant, il emprunte toujours les mêmes passages, ce qui le rend vulnérable à une chasse à l’affût. La chasse à l’approche est recommandée de la fin de l’été au début de l’automne mais la découverte d’un individu peut prendre plusieurs heures. La chasse à la battue est de loin la plus meurtrière mais elle requiert une parfaite connaissance de la topographie.

  • L’aurochs, Bos primigenius Bojanus, 1827

Classe : Mammifères

Ordre : Artiodactyles

Famille : Bovidés

Genre : Bos

Espèce : Bos primigenius

L’aurochs a la même formule dentaire que le bouquetin, à savoir 20 dents lactéales et 32 dents définitives : i 0/3 ; c 0/1 ; D 3/3 et I 0/3 ; C 0/1 ; P 3/3 ; M 3/3.

Ce grand bœuf sauvage d’Europe, d’Asie occidentale et d’Afrique du Nord avait l’allure d’un taureau de combat en beaucoup plus grand et plus lourd : les mâles pouvaient atteindre deux mètres au garrot (les femelles 1,70 m) et leur poids les une tonne. Les grandes cornes des mâles avaient une double courbure, d’abord vers l’extérieur et le haut, puis vers l’avant. Les femelles, d’un bon tiers plus petites, avaient des cornes en lyre pointant vers le haut. Le dimorphisme sexuel est très marqué chez l’aurochs, les différences de poids entre les mâles et les femelles étant très importantes. Il apparaît en Europe au début du Pléistocène moyen, son origine remonterait au Pliocène dans le sous-continent indien avec l’espèce Bos planifrons. Excepté en Grande-Bretagne où il est fréquent, dans le Pléistocène d’Europe continentale il apparaît plus rarement que le grand bison des steppes, exception faite de quelques sites comme Biache-Saint-Vaast (Pas-de-Calais) et Lunel-Viel (Hérault) où il est représenté respectivement par 196 et plus de soixante individus. En revanche, contrairement au bison, il a franchi la barrière Pléistocène/Holocène pour être exterminé il y a plus de trois cents ans par les hommes modernes. Son habitat est la prairie-parc (Crégut-Bonnoure & Guérin, in Guérin & Patou-Mathis, 1996). L’aurochs fréquentait les prairies en bordure de cours d’eau, les pâturages à la lisière des bois, les forêts claires, dans la plaine et au pied des montagnes. Il est rarement associé dans les liste fauniques aux animaux de la steppe comme les chevaux, les bisons ou les rennes. Il consommait aussi bien des herbacées que des feuilles : à la belle saison, rameaux, bourgeons, feuilles, herbages (majoritairement) ; en automne et en hiver, en plus des herbages en proportions décroissantes, des glands, des feuilles sèches, et des branchages (Van Vuure, 2005). Il était surtout dépendant de l’eau. L’aurochs était particulièrement abondant sous les climats tempérés et humides, supportant moins bien que le bison des steppes des conditions trop rigoureuses. Cette espèce vivait généralement en hardes de femelles et de jeunes conduites par un taureau dominant qui tenait les autres mâles à l’écart. Ce sont des animaux à mœurs plutôt nocturnes ; les mâles étaient particulièrement agressifs, ce qui devait rendre leur chasse dangereuse. Les modes de reproduction sont les mêmes que ceux du bison (cf. infra). La longévité du bœuf sauvage est estimé à quinze ans. A la différence du bison des plaines, il n’effectuait pas de grandes migrations. Reconstitué à partir de diverses races primitives, le bœuf sauvage existe actuellement dans plusieurs parcs d’Europe. Dans la nature, du fait de l’agressivité des mâles, bisons et aurochs ne peuvent pas partager le même territoire. Ceci a été observé lors d’expérimentations dans des réserves actuelles (Auguste & Patou-Mathis, 1994).

  • Le bison, Bison priscus (Bojanus, 1827)

Classe : Mammifères

Ordre : Artiodactyles

Famille : Bovidés

Genre : Bison

Espèce : Bison priscus

Sous-espèce : Bison priscus priscus (Bojanus, 1827) et Bison priscus mediator Hilzheimer, 1918

La formule dentaire du bison est la suivante : 20 dents lactéales et 32 dents définitives, soit i 0/3 ; c 0/1 ; D 3/3 et I 0/3 ; C 0/1 ; P 3/3 ; M 3/3.

Le grand bison des steppes ou Bison priscus est une espèce aussi grande et lourde que l’aurochs, cette espèce d’Europe et d’Asie du Nord avait des cornes bien plus longues que les bisons actuels. Contrairement à celles de l’aurochs, elles avaient une courbure simple vers l’extérieur et le haut. En l’absence de crânes ou de chevilles osseuses, il est difficile de le distinguer du bœuf sauvage, d’où la fréquence des dénominations « Grand Bovidé indéterminé » dans les listes fauniques. Certains caractères anatomiques propres aux troisièmes molaires inférieures ou aux vertèbres thoraciques et les proportions d’os comme les canons, permettent toutefois de les reconnaître (Guérin & Valli, 2000). La première espèce connue en Europe est B. tamanensis N. Verestchagin, 1959 du Villafranchien d’Ukraine méridionale, du Caucase du Nord et de Transcaucasie. Plusieurs sous-espèces de Bison priscus ont été distinguées dont la forme la plus fréquente Bison priscus priscus, qui s’étend de l’Europe occidentale à la Sibérie et celle trouvée à la Baume Flandin (détermination E. Crégut-Bonnoure), Bison priscus mediator. Aussi grand que Bison priscus priscus mais aux cornes plus courtes, plus massives et à plus forte courbures, ce dernier avait la même répartition géographique mais habitait des paysages plus forestiers. Tandis que le premier existe depuis la fin de l’avant-dernier interglaciaire jusqu’au début de la dernière glaciation, le second apparaît au début du Pléistocène moyen et disparaît en Europe à l’extrême fin du Pléistocène entre 13 000 et 10 000 ans BP (Crégut-Bonnoure & Guérin, in Guérin & Patou-Mathis, 1996).

Actuellement, deux espèces subsistent, le bison européen ou Bison bonasus et le bison américain des plaines, Bison bison. L’écologie du Bison priscus priscus correspondrait à celle du bison des plaines, tandis que celle du Bison priscus mediator, à celle du bison forestier européen. Dans les deux cas, l’accouplement a lieu à la fin de l’été (fin juillet-août-début septembre). Les femelles sont fécondables dès l’âge de deux ans et les mâles sont fertiles à partir de dix-huit – vingt-quatre mois, mais en général les bisons ne se reproduisent pas avant quatre ans. A partir de douze ans, la fécondité des femelles décline. La gestation est de neuf mois et les naissances se font donc pour la plupart en mai-juin. Les petits sont sevrés au bout de six mois. Le poids d’un bison d’Amérique actuel équivaut pour les mâles à 700-800 kg (jusqu’à une tonne pour certains), pour une taille au garrot pouvant atteindre deux mètres, et pour les femelles, plus petites, à 450-500 kg. L’abattage d’un jeune mâle de trois-quatre ans fournit une carcasse de 250 à 350 kg. Le bison est un animal grégaire qui vit, contrairement aux idées reçues, en groupes plutôt restreints et instables d’une à plusieurs dizaines d’individus, généralement conduits par une femelle, fréquemment remplacée. Les jeunes mâles immatures se regroupent tandis que les individus âgés mènent une existence solitaire. Les femelles et leurs petits restent ensemble (clans d’une vingtaine d’individus) et sont rejoints par les mâles plus âgés (groupes d’une dizaine de mâles de plus de 4 ans) au moment de la reproduction. Comme les rennes, les bisons des plaines se réunissent lors des migrations (Agabriel et al., 1998). Les bisons d’Europe, à l’équivalent des aurochs, vivent sur une surface voisine de 25 à 35 km², sans jamais effectuer de grands déplacements. Les troupeaux de bisons des plaines se nourrissent d’herbe et de plantes herbacées, en hiver, ils cherchent sous la neige les mousses et les lichens. Les bisons forestiers ont une nourriture un peu plus diversifiée, comprenant, en plus des plantes herbacées, des feuilles et des rameaux d'arbres à feuilles caduques. Les bisons utilisent leur excellent odorat pour détecter un danger.

  • Le cheval, Equus germanicus Nehring, 1884 et autres chevaux de type « caballin » et Equus hydruntinus Regalia, 1904

Classe : Mammifères

Ordre : Périssodactyles

Famille : Equidés

Genre : Equus

Espèce : Equus hydruntinus et Equus germanicus ou autres espèces de type caballin

La formule dentaire du cheval est la suivante : 28 dents lactéales et 40 dents définitives, soit i 3/3 ; c 0-1/0-1 ; D 3/3 et I 3/3 ; C 0-1/0-1 ; P 3/3 ; M 3/3.

La petite espèce Equus hydruntinus appartient aux chevaux de type « sténonien ». Elle se caractérise par la petitesse de ses dents, une morphologie dentaire caractéristique et la gracilité de son squelette post-crânien. Apparu au cours du Pléistocène moyen, ce petit Equidé persiste jusque dans l’Holocène. L’autre espèce, plus fréquent dans nos gisements, est le cheval de type caballin Equus germanicus de taille moyenne et classique de la première partie du Pléistocène supérieur. L’espèce disparaît aux environs de 30 000 ans BP (Guérin, in Guérin & Patou-Mathis, 1996).Tous les chevaux vivent dans des territoires ouverts comme la prairie, la steppe et la savane ; certains se trouvent dans des paysages comportant quelques arbres, c’est notamment le cas de l’hydruntin, généralement associé à une faune de type tempérée forestière. Avec le bison, c’est le seul grand ongulé d’espaces ouverts qui se développe lors des périodes froides et sèches (Delpech et al., 1983). Tous les chevaux, herbivores non ruminants, se nourrissent principalement de nourritures fibreuses (herbes…), se contentant mieux que les ruminants d’un fourrage de piètre qualité, la quantité étant plus importante. L’activité alimentaire occupe, selon les saisons, de la moitié aux deux tiers du temps des chevaux (in Bignon, 2003). Ils ont en revanche un besoin quotidien en eau. La distance par rapport à un point d’eau est donc un facteur déterminant quant à la mobilité d’un troupeau de chevaux au sein d’un territoire.

En ce qui concerne l’éthologie du cheval de Przewalski, seul cheval sauvage actuel, juments et poulains vivent en petit groupe familial ou harem (jusqu’à 20 individus) mené par un étalon dominant. Les jeunes entre un et trois ans, à la différence des juments et de l’étalon qui établissent des liens stables, quittent le groupe de façon régulière (Goldberg, 1998). En général, les chevaux ne sont pas territoriaux, se déplaçant continuellement. Les juments sont fertiles à deux ans mais ne se reproduisent généralement pas avant quatre ans. Pour les étalons, ils deviennent matures entre deux ans et demi et trois ans (c’est généralement à cette période que les jeunes mâles sont expulsés du harem, se regroupant en groupes de mâles célibataires). Cependant, sous l’influence des mâles dominants, la plupart des jeunes étalons ne copulent pas avant l’âge de cinq ans. Les pics de reproduction pour les femelles se situent entre cinq et sept ans (leur fertilité baissant à partir de 20 ans) et pour les mâles entre neuf et dix ans. Les accouplements se font le plus souvent à la belle saison (printemps-été) et la durée de gestation est de trois-cent-quarante jours environ, soit onze mois. Bien que des naissances peuvent avoir lieu tout au long de l’année, elles se situent dans la majorité des cas à la fin de l’hiver et au début du printemps. Cette espèce peut vivre une trentaine d’années. Les chevaux sauvages sont extrêmement vigilants et méfiants, leur ouïe et leur vue excellentes rendant leur approche difficile (Boyd & Houpt, 1994 ; Harbury, 1994).

Pour ce qui est de l’éthologie des ânes sauvages africains (Equus africanus), et asiatiques (Equus hemionus ; Equus kiang), les mâles sont territoriaux et dominent pendant plusieurs années de vastes domaines (Bignon, 2003).

  • Le loup, Canis lupus Linné, 1758

Classe : Mammifères

Ordre : Carnivores

Famille : Canidés

Genre : Canis

Espèce : Canis lupus

La formule dentaire du loup est la suivante : 32 dents lactéales et 42 dents définitives, soit i 3/3 ; c1/1 ; D 4/4 et I 3/3 ; C 1/1 ; P 4/4 ; M 2/3.

De véritables loups apparaissent à partir de l’avant dernier inter-glaciaire puis, à la fin du Riss, des loups dont la taille augmentera régulièrement jusqu’à la fin du Pléistocène s’installent sur l’ensemble de l’Europe occidentale (Crégut-Bonnoure, in Guérin & Patou-Mathis, 1996). Le loup européen actuel mesure entre soixante-dix et quatre-vingts centimètres de hauteur au garrot, son corps est long de un mètre quarante environ et son poids peut atteindre 80 kg. C’est un animal ubiquiste, c’est en effet l’un des Carnivores qui présente la plus vaste répartition géographique. Sa grande plasticité écologique lui a permis d’occuper aussi bien les zones montagneuses que les plaines, les forêts comme les toundras, et même les zones semi-désertiques. Toutefois la forêt est l’environnement qui lui convient le mieux, lui offrant des refuges et lui permettant de chasser à couvert le gibier essentiel à sa survie. Une meute possède un territoire exclusif qui peut aller d’une cinquantaine à plus d’un millier de km², selon l’abondance des proies et le nombre d’individus. Les loups solitaires occupent plutôt les zones situées entre les territoires. La tanière est le lieu où les louves mettent bas mais également le lieu de refuge contre les intempéries et les prédateurs. Le plus souvent elle est orientée au sud, s’ouvre sur une pente peu abrupte et se situe à moins de quatre cents mètres d’un point d’eau. Elle est fréquemment réutilisée d’une année sur l’autre. Les loups sont des animaux sociaux organisés en petites cellules familiales où règne une hiérarchie bien définie, dominée par deux chefs, un mâle et une femelle. Seul ce couple est généralement autorisé à se reproduire, contrôlant ainsi les naissances au sein de la meute. Les loups chassent de façon collective. Pour repérer leur proie, les loups utilisent trois façons : la repérer à l’odeur, la surprendre par hasard ou la suivre à ses traces. Puis une fois repérée, les loups s’en approchent le plus près possible, lentement et à contre-vent. Dès qu’ils sont remarqués par la proie, si celle-ci décide de s’enfuir, comme c’est la cas pour les cerfs et les caribous, plutôt que de faire front comme le font les bisons et les élans, les loups les poursuivent immédiatement sur plusieurs centaines de mètres. S’ils sont distancés, les loups abandonnent assez rapidement, pas plus de quelques minutes de course. En cas de surplus d’abattages, les carcasses sont moins exploitées et peuvent donc profiter à des charognards. En fonction de la taille de la meute et de la diversité et de l’abondance des proies présentes dans l’environnement, les loups peuvent adopter une chasse spécialisée pour une espèce particulière. Généralement, les ongulés typiques d’une région ou d’un habitat constituent la base du régime alimentaire du loup ; mais il chasse aussi des proies plus petites, tels que le lièvre, le lapin, la marmotte, parfois le renard et les petits rongeurs. Il semblerait que les loups préfèrent à des espèces aux mœurs solitaires vivant dans des milieux fermés, des animaux grégaires dans un environnement plus ouvert. Les espèces telles que bouquetins et chamois, aptes à s’enfuir dans des milieux rocailleux et abrupts en font des gibiers plus difficiles d’accès. Ils tuent principalement les jeunes individus et les individus malades, moins opposants et plus faciles à capturer, mais exceptionnellement sont capables, en meutes, d’abattre des proies adultes de la taille des élans. La taille des proies peut donc varier selon plusieurs critères : premièrement selon la taille de la meute et sa disposition physique et deuxièmement selon la disponibilité du gibier et sa vulnérabilité (Landry, 2001 ; Hénault & Jolicoeur, 2003). A la fin de l’hiver, la condition physique des ongulés se dégrade, accentuant le nombre des proies tuées. Le besoin annuel en proie pour un loup canadien a été estimé à environ 25 cerfs/biches par an (Landry, 2001).

  • Le dhôle, Cuon alpinus europaeus Bourguignat, 1868

Classe : Mammifères

Ordre : Carnivores

Famille : Canidés

Genre : Cuon

Espèce : Cuon alpinus europaeus

La formule dentaire du dhôle est la suivante : 32 dents lactéales et 40 dents définitives, soit i 3/3 ; c1/1 ; D 4/4 et I 3/3 ; C 1/1 ; P 4/4 ; M 2/2.

Le dhôle, encore appelé chien sauvage ou chien rouge est un Carnivore de la taille d’un petit loup aux membres trapus. Il n’excède pas cinquante centimètres au garrot et un mètre de long. Il vit également en groupes familiaux de cinq à douze individus et s’attaque à des proies de la taille d’un rongeur à celle d’un cerf. L’espèce vit actuellement de l’ouest de l’Asie à la Chine. Il se distingue du loup par ses oreilles arrondies, son museau plus court et par ses dents. L’espèce Cuon alpinus a immigré en France il y a environ 100 000 ans et disparaît vers 20 000 ans. C’est un élément rare de la faune européenne du Pléistocène supérieur. Il affectionnait les zones montagneuses couvertes de forêts épaisses induites par les climats tempérés (Crégut-Bonnoure, 1992b, in Guérin & Patou-Mathis, 1996).

  • L’hyène, Crocuta crocuta spelaea (Goldfuss, 1832)

Classe : Mammifères

Ordre : Carnivores

Famille : Hyaenidés

Genre : Crocuta

Espèce : Crocuta spelaea

La formule dentaire de l’hyène est la suivante : 30 dents lactéales et 34 dents définitives, soit i 3/3 ; c1/1 ; D 4/3 et I 3/3 ; C 1/1 ; P 4/3 ; M 0-(1)/1.

La morphologie de l’hyène des cavernes est très proche de celle de l’hyène tachetée actuelle. Elle en diffère cependant par sa taille plus conséquente (deux fois plus grande). Chez les Crocuta actuelles la massivité est déjà importante : hauteur au garrot de soixante-dix à quatre-vingt-dix centimètres, longueur de un mètre vingt à un mètre quarante et poids de 50 à 80 kg. Crocuta spelaea apparaît en France au Riss et disparaît à la fin du Pléistocène. Elle est plus abondante à l’Ouest du Rhône. Son poids est estimé à plus de 100 kg. Ses mœurs étaient proches de celles de l’hyène tachetée actuelle. Elle s’abritait dans des cavités naturelles, abondantes en contexte karstiques, qui lui servaient de repaires. Elle est très ubiquiste et a connu une vaste répartition géographique (Crégut-Bonnoure, in Guérin & Patou-Mathis, 1996). Les hyènes sont presque exclusivement des charognards, mais peuvent être également d’excellentes chasseuses. Elles consomment les parties des carcasses les plus dures, généralement délaissées par les autres Carnivores. Elles ingèrent les os dont elles assimilent les matières organiques. Les cornes, sabots et autres parties non assimilables sont régurgités. Elles ont des mâchoires très puissantes et une dentition spécialisée pour le broyage des cartilages et des ossements. Ses excréments, abondamment chargés en phosphate, sont souvent parfaitement conservés.