Analyse des pratiques bouchères

A la BAUME DES PEYRARDS , où la qualité de conservation des surfaces osseuses permet l’observation de tous les types d’altérations, et où l’accumulateur principal des ossements d’herbivore est l’homme, les marques de boucherie se sont révélées très fructueuses en terme d’analyse des stratégies bouchères. L’étude sera entreprise selon les quatre grands ensembles stratigraphiques déterminés, à savoir l’ensemble inférieur, l’ensemble supérieur a, l’ensemble supérieur b et l’ensemble supérieur c-d (tab. 251).

Dans l’ensemble inférieur, nous avons vu que les herbivores sont principalement représentés par les segments osseux des extrémités des pattes. Dans cet ensemble, les seuls ossements présentant des marques de boucherie sont un radius de cerf, un métacarpien de chevreuil et deux fragments diaphysaires indéterminés. Aucun des trente ossements observables de bouquetin n’a montré d’exploitation de leurs chairs. Le radius de cerf montre quatre courtes stries fines peu profondes et obliques, placées juste sous la tubérosité du radius, au niveau de l’insertion du muscle brachial. Il s’agit sans doute ici des conséquences de la désarticulation du coude. Le métacarpien de chevreuil compte quant à lui neuf courtes stries très fines et superficielles, perpendiculaires au grand axe de l’os, situées le long de la partie distale de la gouttière palmaire. Ces stries peuvent quant à elles être associées au dépouillement. Les deux esquilles regroupent l’une, une quinzaine de longues stries fines et obliques, assimilées à la récupération des filets de viande des parties charnues, et l’autre, une seule strie très longue et oblique pouvant également provenir de ce type d’opération.

Il est important de noter ici que sur les six restes qui composent l’ensemble médian, la moitié, soit trois métapodes (deux de bouquetin et un de cerf), comptent chacun plus d’une quinzaine de stries provenant du raclage et de l’écorchement des bêtes.

Dans l’ensemble supérieur a, les bouquetins sont riches de 379 restes déterminés observables (333 post-crâniens lisibles et 46 ossements du crâne). Parmi eux, 59 portent des marques de boucherie, ce qui donne un taux de 15,6 % (tab. 254).

  • Crâne : le squelette crânien rassemble six ossements témoins d’opérations de boucherie. Deux sont des fragments de branche horizontale d’hémi-mandibule, avec quelques courtes stries fines sur leur face externe indiquant la récupération des muscles de la joue ou des opérations d’écorchement. Un autre est un fragment de mandibule qui présente une strie peu profonde de taille moyenne située au niveau de la fosse ptérygoïdienne, qui correspond au lieu d’insertion du muscle masticateur du même nom. Deux sont des os hyoïdes portant une dizaine de courtes stries peu profondes ou profondes, qui témoignent du détachement de la langue. Le dernier est un morceau de maxillaire avec sept stries très fines de taille moyenne, qui attestent également de la récupération des muscles de la joue.
  • Vertèbres cervicales : un atlas a livré un ensemble de stries extrêmement riche témoignant de deux types d’opération possible. Le premier groupe correspond à une cinquantaine de stries très fines de taille moyenne et non parallèles entre elles, localisées de part et d’autre de la face ventrale, et qui seraient assimilables à la séparation de la tête et au décharnement du cou (collet ou collier en nomenclature bouchère). L’autre groupe compte seulement une quinzaine de stries très fines assez profondes et non parallèles, qui longent, en face dorsale, le bord de la cavité articulaire pour le condyle occipital gauche, et qui sont par contre simplement la conséquence de la désarticulation du crâne d’avec la colonne vertébrale. Un fragment de vertèbre cervicale indéterminée affiche sept courtes stries fines et profondes au-dessus du processus articulaire caudal gauche, qui peuvent également indiquer des processus de décharnement des muscles du cou à l’endroit de leur insertion (intertransversaires dorsaux).
  • Vertèbres thoraciques : cinq vertèbres thoraciques présentent des groupes d’une dizaine de très fines stries peu profondes, courtes ou moyennes, obliques et parallèles, de part et d’autre de leur processus épineux (l’une porte une trentaine de ces stries). Ces marques ont été causées par la récupération des muscles du dos dans la partie supérieure de l’épine (l’insertion des muscles trapèze pour les premières vertèbres et grand dorsal pour les autres) et, pour la plus grande majorité, dans la partie médiane et inférieure (insertion du muscle épineux du thorax). En boucherie, ces parties correspondent aux morceaux de première catégorie que comptent les basses-côtes pour les cinq premières thoraciques, et l’aloyau pour les autres thoraciques, plus précisément le milieu de train-de-côtes (dessus de côtes et entrecôte).
  • Côtes : six fragments de côtes montrent des marques de boucherie réparties sur toute leur longueur, depuis la tête jusqu’à la partie distale. L’une des côtes appartient à un juvénile, et montre une dizaine de courtes stries fines au niveau du tubercule, qui témoignent de la découpe du muscle longissimus du thorax. La partie proximale des côtes appartient aux mêmes morceaux de boucherie que ceux récupérés à partir des thoraciques. Pour les autres, les stries sont très fines, peu profondes, obliques et parallèles, et se situent sur les faces externes dans leurs parties médiale et distale. Elles correspondent à la découpe des muscles dentelé ventral du thorax, oblique externe de l’abdomen et intercostaux. Ces muscles appartiennent au caparaçon qui comprend la poitrine, le tendron (chez les juvéniles, les cartilages de prolongement des côtes ou tendrons se laissent facilement couper au couteau), les plats de côtes et le flanchet.
  • Scapula : sur les six fragments de scapula striés, cinq présentent des incisions courtes, de largeur et de profondeur variables, groupées par petites dizaines et localisées autour de la cavité glénoïdale et quelquefois sur l’acromion. Ce sont des stries de désarticulation de l’épaule (scapula/humérus ; photo 96). Deux d’entre elles ont des marques plus longues et très fines, obliques et parallèles, situées dans la partie inférieure de la fosse infra-épineuse. Elles sont dues à des opérations de décharnement du muscle infra-épineux qui compose la partie supérieure de la raquette, autrement dit la macreuse, qui fait partie des viandes dures, propices au bouillon.
  • Humérus : Deux fragments de face antérieure ont des stries de boucheries. Ils correspondent à la partie diaphysaire médio-distale et comportent deux longues stries obliques et parallèles pour l’un, et une dizaine pour l’autre, témoignant de la récupération de la viande en lanières. Ces stries sont situées à l’endroit de l’insertion du muscle coraco-brachial, qui correspond toujours à la raquette et plus précisément à la macreuse à braiser. L’un d’eux contient une autre dizaine de stries plus courtes et perpendiculaires, situées le long du bord médial de la fosse coronoïdienne. Celles-ci ont dû être faites lors de la désarticulation du coude. Un autre segment, plus proximal, qui englobe la crête humérale, compte deux groupes d’une vingtaine d’incisions, présentes sous la crête sous la forme de courtes incisions obliques, et sur son côté latéral sous la forme de longues stries fines et parallèles au grand axe de l’os. Les premières stries correspondent à la découpe des tendons au niveau de la zone commune d’insertion musculaire (brachio-céphalique et pectoraux) ; les autres ont été causées par le décharnement en lanières du muscle brachial, qui appartient également à la macreuse à braiser.
  • Radio-ulna : quatre fragments diaphysaires de radio-ulna sont striés. Les marques, pour la plupart courtes, très fines et perpendiculaires (seules cinq stries sur une vingtaine sont longues et obliques, elles ont été observées le long d’une ulna), présentes le long des deux ulnas et sur le bord latéral d’un des deux radius, sont des témoins du décharnement des muscles extenseurs des doigts, qui forment le gîte de devant ou jarret (moins riche que le gîte des quartiers arrière). L’autre radius est composé de la partie diaphysaire proximale du bord médial. De part et d’autre de la tubérosité du radius on trouve quelques stries de taille moyenne, très fines et obliques, qui sont la conséquence de la découpe de la zone d’insertion du muscle biceps brachial pour la désarticulation du coude, ou pour le décharnement de ce muscle qui est appelé «jumeau nerveux » et qui est plutôt propre à être bouilli. Notons que les bouchers actuels donnent l’appellation de « boîte à moelle » aux morceaux précédemment cités, à savoir le jumeau à pot-au-feu, la macreuse à braiser et le gîte de devant (Thielin, 2001).
  • Métacarpe : deux fragments de diaphyse et une extrémité proximale sont incisés. Il s’agit pour les deux premiers respectivement d’une vingtaine et de quatre stries courtes, très fines, profondes et perpendiculaires situées le long de la gouttière palmaire, et issues de l’enlèvement de la peau. L’épiphyse comprend quant à elle sous la surface articulaire en face dorsale une dizaine de stries de même morphologie, mais obliques, qui peuvent résulter, soit de la séparation d’avec le carpe, soit du dépouillement.
  • Os coxal : trois restes de coxaux comptent une dizaine de marques de boucherie. Celles-ci se situent pour l’un dans la partie supérieure de l’acetabulum, au niveau de l’insertion du muscle droit de la cuisse et pourraient mettre en évidence la désarticulation coxo-fémorale (Valensi, 1991 ; Bez, 1995), ou tout simplement la récupération de ce muscle, qui appartient au tende de tranche de la cuisse et plus exactement au dessus de tranche. Il s’agit de courtes stries profondes et perpendiculaires. Les deux autres groupes de stries, localisés dans la partie interne de l’ilium au niveau de la grande échancrure sciatique, pourraient témoigner de l’éviscération (Valensi, 1991) ou du décharnement du muscle iliaque, qui est une partie du morceau de boucherie appelé araignée. Les stries sont plus longues, moins profondes, et obliques. De façon générale, mises à part les pièces issues de la jambe, la cuisse regroupe essentiellement des viandes tendres à cuisson rapide.
  • Fémur : sur les six fémurs marqués recensés, deux types de stries sont observés. D’une part, de longues stries fines et obliques, caractéristiques de la récupération de morceaux charnus en lanières, et d’autre part, des stries plus courtes et moins nombreuses qui révèleraient plutôt le détachement des zones tendineuses liées aux insertions musculaires. Toutes ces stries se répartissent le long de la partie diaphysaire de la face antérieure et correspondent au levage du muscle vaste intermédiaire. Ce muscle est une partie de la tranche grasse de la cuisse appelée le mouvant.
  • Tibia : neuf fragments diaphysaires portent des marques de boucherie. Quatre présentent de courtes stries profondes et perpendiculaires, le long du bord latéral, qui découlent du détachement du muscle fléchisseur latéral des doigts. D’autres stries plus longues et obliques se répartissent sur les cinq autres fragments le long des faces médiale et postérieure, résultant quant à elles de la découpe en lanières des muscles poplité et semi-tendineux. L’un de ces fragments compte également une trentaine de courtes stries fines et perpendiculaires dans la partie distale du bord médial. Le tibia constitue, avec les tarsiens, la base osseuse du gîte de derrière, qui fait partie des muscles les plus nerveux de la cuisse. Il est utilisé chez nous pour le pot-au-feu.
  • Tarse : un calcanéum porte trois courtes stries fines, peu profondes et obliques, sur le bord antérieur du côté interne, qui témoignent de la désarticulation des os du tarse ou de la découpe des insertions musculaires pour la récupération des chairs qui relient le tarse au tibia. Quoiqu’il en soit, ces os courts font partie du même morceau de viande que le tibia, à savoir le gîte de derrière. En terme anatomique, la région du tarse est désignée comme le jarret alors qu’en boucherie nous avons vu que le jarret correspond au morceau situé sous l’épaule.
  • Métatarse : trois segments de gouttière dorsale ont chacun sur leurs bords à peu près une dizaine de stries très fines, courtes ou moyennes, obliques et parallèles entre elles, qui sont la conséquence du dépouillement des bouquetins.
  • Phalanges : deux phalanges indiquent la récupération des peaux par la présence de nombreuses stries courtes, très fines et perpendiculaires, sur leurs faces palmaire et dorsale.

En termes de proportions de stries, les parties du squelette les plus fréquemment marquées sont les diaphyses de métapodes, suivies ici par les os hyoïdes, puis de façon à peu près équivalente, par les parties charnues des vertèbres thoraciques, des diaphyses fémorale et tibiale, des scapulas et de la partie distale des humérus, et enfin par d’autres, aussi riches ou plus maigres, regroupant dans l’ordre décroissant, les cervicales, les coxaux, les phalanges et le tarse, les diaphyses de radius, les métacarpiens proximaux, les hémi-mandibules, les diaphyses d’humérus et enfin les os du crâne et les côtes.

Le cerf de cet ensemble supérieur a compte 95 ossements déterminés lisibles (79 post-crâniens et 16 crâniens). 33 ont été marqués par des outils lithiques. Un peu plus du tiers, précisément 34,7 % du NRDtobs des cerfs ont donc été exploités par les hommes, ce qui est proportionnellement plus conséquent que ce que nous observons chez le bouquetin (tab. 254).

  • Crâne : parmi les cinq fragments d’hémi-mandibules striées, quatre présentent des stries très fines courtes ou moyennes et parallèles entre elles, en face linguale de la branche horizontale, témoignant du détachement des muscles mylo-hyoïdien et digastrique lors de la récupération de la langue (Valensi, 1991). L’un de ces restes compte également quelques stries en face vestibulaire au niveau de la quatrième prémolaire, qui sont des marques du dépouillement ou de la décarnisation de la joue. Enfin, le dernier est un morceau de processus coronoïde présentant sept stries courtes, très fines et obliques, le long du bord postérieur, qui seraient liées à la désarticulation de la mandibule.
  • Squelette axial : un fragment de troisième vertèbre thoracique présente, de part et d’autre de son processus épineux, une vingtaine et une petite dizaine de stries courtes, très fines, parallèles et obliques, qui trahissent le détachement des muscles épineux du thorax pour la récupération du morceau des basses-côtes. Un segment médian de corps costal a sur sa face externe une dizaine de courtes stries fines parallèles et obliques provenant de la décarnisation des muscles dentelé ventral du thorax et oblique externe de l’abdomen.
  • Scapula : un fragment proximal présente une vingtaine de stries longues, très fines et obliques en face médiale sous la cavité glénoïde, ainsi que respectivement six et cinq incisions courtes et profondes sur le bord antérieur et entre la surface articulaire et l’acromion. Le premier réseau indique le détachement du muscle subscapulaire. C’est un morceau plat qui, en boucherie, fait partie de la raquette et plus exactement du dessus de palette. Les deux autres groupes proviennent de la désarticulation scapulo-humérale. Les mêmes types de stries ont été observés sur les omoplates des cerfs du Lazaret (Valensi, 1991) et sur celles de petits Bovidés actuels à la suite des opérations de désossement et de désarticulation de l’épaule effectuées par J.-F. Bez (1995).
  • Humérus : nous avons dénombré quatre fragments de diaphyse et une extrémité distale striés. Trois de ces restes témoignent de la récupération des chairs (stries longues et obliques) de la face médiale comprenant les muscles grand rond, triceps et coraco-brachial. Un des segments de diaphyse porte une vingtaine de stries plus courtes, fines et obliques juste au-dessus de la fosse coronoïdienne. Il s’agit ici du détachement du muscle brachio-céphalique. Tous font partie de la macreuse à braiser. L’épiphyse distale montre sur la face interne de son épicondyle latéral quatre longues marques profondes et obliques qui ont été laissées lors de la désarticulation du coude.
  • Radius : une extrémité proximale porte cinq stries courtes en face antérieure et trois en face postérieure sous la surface d’insertion radio-ulnaire indiquant là encore la désarticulation du coude. Un fragment de diaphyse proximale affiche quatre longues stries en face antérieure qui seraient quant à elles dues à la décarnisation des muscles composant une partie du jarret.
  • Métacarpe : un morceau de gouttière palmaire compte sept courtes stries profondes et perpendiculaires au grand axe de l’os le long de son arête. Un autre fragment se situant au niveau distal de l’os présente en face palmaire et sur le côté de la diaphyse des stries courtes et perpendiculaires et d’autres plus longues et obliques. Ces marques sont celles de l’écorchage.
  • Fémur : trois segments diaphysaires ont des stries longues et obliques réparties en face latérale, postérieure (le long de la ligne âpre) et antérieure, qui ont été laissées lors de la récupération du muscle vaste intermédiaire composant le mouvant. Une extrémité distale de face postérieure montre des stries entre les deux tubérosités supracondylaires médiale et latérale et au-dessus du condyle latéral. Il s’agit peut-être des indices d’opérations de découpe des chefs médial et latéral du muscle gastrocnémien. Ces derniers appartiennent au nerveux de gîte, morceau inférieur de la semelle (ou gîte-noix).
  • Tibia : parmi les six restes portant des marques nous avons pu observer toutes les faces et bords de la diaphyse, depuis la récupération du muscle fléchisseur des doigts sur le bord latéral et la face postérieure, à celle du muscle semi-tendineux sous la crête, en face antérieure, et enfin à celle du muscle poplité en face médiale.
  • Tarse : deux talus et un grand cunéiforme ont quelques stries courtes, profondes et perpendiculaires, qui découlent de la récupération des muscles qu’ils ont en commun avec le tibia (muscle tibial crânial par exemple pour le cunéiforme), ou de leur désarticulation (photo 97).
  • Métatarse : trois restes présentent de courtes stries peu profondes, perpendiculaires ou obliques, le long de l’arête de la gouttière dorsale ou sur les côtés de leurs diaphyses, qui sont des témoins du dépouillement.

Les diaphyses humérale et fémorale et le tarse sont les parties des cerfs qui ont été les plus affectées par l’action des hommes. Les deux seules épiphyses distales métacarpienne et humérale sont striées. D’autres parties moins touchées comme les diaphyses tibiales, radio-ulnaires, métatarsiennes et métacarpiennes, les vertèbres thoraciques, les scapulas, les hémi-mandibules, témoignent néanmoins d’actions bouchères.

Sur les 21 restes déterminés de cheval observables (1 os du crâne et 20 post-crâniens), six sont striés, ce qui donne un taux de 28,6 % (tab. 254). Nous dénombrons un fragment de corps costal portant une quinzaine d’incisions courtes, très fines et obliques, en face externe, découlant de la récupération des muscles dentelé ventral du thorax et oblique externe de l’abdomen. Un fragment de scapula affiche deux longues stries très fines et obliques le long de la fosse subscapulaire qui témoignent du détachement du muscle du même nom. Deux coxaux gauches ont été marqués. L’un présente deux stries fines de taille moyenne sur le pecten du pubis et l’autre une quinzaine, de direction oblique, sur la face glutéale de l’aile de l’os ilium. Ces dernières sont la conséquence de la découpe des muscles fessiers moyen et accessoire qui composent le rumsteck. Cette pièce appartient à l’aloyau et non à la cuisse, mais pour des raisons de commodité j’ai systématiquement associé l’os coxal dans son entier à la cuisse. Enfin, deux tibias droits témoignent aussi d’opérations de découpe. L’un porte une courte strie très fine, peu profonde et oblique, dans l’angle proximo-latéral de la face postérieure, juste au niveau de la surface d’insertion du muscle fléchisseur latéral du doigt, et l’autre compte une cinquantaine de stries courtes ou moyennes, très fines et à directions variées, qui se situent de part et d’autre du bord latéral sur la partie médiane de la diaphyse. Ces stries correspondent là aussi à la découpe du même muscle, qui appartient comme nous l’avons vu au morceau nerveux du gîte de derrière.

Enfin, le chevreuil rassemble 3 ossements marqués par des outils sur ses 29 NRDtobs, ce qui représente seulement 10,3 %, à peu près un dixième de son échantillon (tab. 254). Ces trois restes sont deux processus épineux de vertèbres thoraciques et un segment de pubis. Les deux premiers montrent une dizaine de courtes stries très fines et obliques sur les deux faces de l’épine dorsale, indiquant la découpe des muscles épineux du thorax, qui correspondent à la couche profonde du milieu de train-de-côtes (pièce de l’aloyau) appelée communément en boucherie bovine l’entrecôte. Sur la face interne du pubis nous avons décompté cinq courtes stries fines et perpendiculaires pouvant témoigner de l’éviscération ou de la récupération du muscle obturateur externe qui, chez le bœuf, correspond au morceau prisé de l’araignée.

Dans l’ensemble supérieur b, les bouquetins comptent 124 restes déterminés lisibles (111 post-crâniens lisibles et 13 ossements du crâne). Parmi eux, 29 portent des marques de boucherie, ce qui donne un taux de 23,4 %, supérieur à celui de l’ensemble sous-jacent. Il s’agit seulement d’ossements post-crâniens (tab. 255).

  • Squelette axial : un fragment de vertèbre thoracique présente une dizaine de stries le long de la face droite de son épine dorsale, qui trahissent la découpe des muscles épineux du thorax. Une lombaire compte deux stries fines de taille moyenne à la base de l’épine dorsale : ces stries sont celles des opérations de récupération des muscles transversaires épineux appartenant au faux-filet. Une extrémité proximale de côte montre six marques très courtes situées juste sous le tubercule de la côte. Elles ont pu avoir été laissées lors de la découpe du muscle longissimus du thorax qui compte parmi les meilleurs morceaux de l’aloyau (entrecôte) ou lors de la séparation du train-de-côtes de la chaîne vertébrale. Deux courtes stries ont été observées sur la face interne de la partie distale d’un autre fragment costal. Ces marques sont quant à elles issues de l’éviscération.
  • Les membres antérieurs : sur la face latérale et le bord postérieur de la cavité glénoïde d’un fragment de scapula, une dizaine de courtes stries fines, profondes et perpendiculaires illustrent la désarticulation scapulo-humérale. Deux fragments diaphysaires d’humérus portent des stries qui témoignent de la découpe du muscle coraco-brachial et du chef médial du triceps brachial de part et d’autre de la tubérosité du grand rond, dans la partie proximale de la face médiale et de celle du muscle extenseur radial du carpe en face latérale. Les deux premiers font partie du morceau de l’épaule déjà rencontré appelé macreuse à braiser et le dernier appartient déjà au jarret ou gîte de devant. La récupération de ce morceau est également attestée par deux stries situées le long du bord latéral d’une diaphyse de radius, qui découlent de la découpe du muscle extenseur oblique du carpe. Enfin, sur le côté médial de la partie proximale de la face dorsale d’un métacarpien, six courtes marques obliques peuvent être la conséquence d’un dépouillement comme d’une décarnisation pour la récupération du muscle extenseur radial du carpe, qui vient s’insérer dans cette zone.
  • Les membres postérieurs : un morceau de coxal gauche a quatre courtes stries fines et perpendiculaires au niveau de l’insertion du muscle droit de la cuisse, qui trahissent la récupération du morceau de viande, ce qui favorise ultérieurement la désarticulation coxo-fémorale. Dix segments de fémur présentent une bonne cinquantaine de stries de décharnement en lanières (longues, fines et obliques ou parallèles) et de découpe des insertions tendineuses (plus courtes et serrées) réparties sur toute la circonférence de la diaphyse, depuis la découpe du muscle vaste intermédiaire, à celle des muscles insérés le long de la ligne âpre, qui sont le pectiné, l’adducteur de la cuisse et les chefs latéral et médial du gastrocnémien. Quatre diaphyses et une épiphyse distale de tibia témoignent également du décharnement de muscles en lanières et du détachement de leurs insertions (poplité et fléchisseur latéral des doigts), mais également de processus de désarticulation avec cinq incisions courtes et peu profondes relevées au niveau de la malléole médiale. Deux restes de métatarsiens et un de métapode indéterminé affichent quelques stries courtes ou moyennes et obliques le long de leur gouttière dorsale. Ces marques indiquent des opérations de dépouillement ou de récupération des tendons. L’écorchement est aussi attesté par une première phalange postérieure présentant quatre stries courtes, superficielles et obliques en face dorsale, juste sous l’extrémité proximale.

Parmi les 33 restes déterminés observables de cerf (2 crâniens et 31 post-crâniens) de l’ensemble supérieur b, neuf sont striés. Le pourcentage de NRs est donc de 27,3 % (tab. 255). Sur ces neuf restes, deux types d’opérations de boucherie ont été mis en évidence. Il s’agit majoritairement de décarnisation, mais un métatarsien et une deuxième phalange témoignent également de l’écorchement. Les stries de décharnement ont été observées sur deux thoraciques, quatre diaphyses tibiales et une humérale. Les deux thoraciques présentent des découpes de muscles différentes, l’une (huitième ou neuvième thoracique) a deux courtes stries à la base du processus épineux où s’insère le muscle transversaire épineux, et l’autre (quatrième ou cinquième thoracique) a cinq stries sur la face ventrale de son corps vertébral, qui correspondent à la découpe du muscle long du cou qui compose ce que l’on appelle le filet mignon en boucherie. Les fragments diaphysaires de tibia ont chacun une petite dizaine d’incisions courtes ou longues et obliques réparties sur la face postérieure et les bords médial et latéral (muscles fléchisseurs latéral et médial, poplité) et l’humérus en compte onze, de morphologie similaire, juste sous la tubérosité du grand rond (muscles triceps et coraco-brachial).

Trois restes striés de cheval, sur les onze observables (4 crâniens et 7 post-crâniens), indiquent l’action des hommes sur un peu moins d’un tiers (27,3 %) des ossements. Un fragment proximal de face postérieure de tibia montre trois longues stries fines au niveau de l’insertion du muscle poplité, et deux autres os, une diaphyse de métapode et un côté de deuxième phalange, attestent par une dizaine de marques du dépouillement d’un animal.

Cinq diaphyses d’os longs de chevreuil, sur les huit post-crâniens lisibles, montrent des opérations de boucherie, ce qui livre une proportion de NRs très forte, de 62,5 %. Deux métapodes présentent plus d’une dizaine de stries de directions variées réparties le long des gouttières plantaire et palmaire indiquant le dépouillement. Deux fémurs et un tibia attestent de la récupération en lanières des parties charnues de la cuisse (stries longues, fines et obliques) ainsi que, pour les premiers, de la découpe des insertions musculaires le long de la ligne âpre (courtes stries perpendiculaires).

Une diaphyse tibiale de chamois montre aussi la découpe des muscles de la cuisse avec deux courtes stries observées le long du bord latéral. Le chamois compte seulement trois restes osseux observables en b.

Dans l’ensemble supérieur c-d, les bouquetins comptent 675 restes déterminés observables (608 post-crâniens lisibles et 67 ossements du crâne). Parmi eux, 106 portent des marques de boucherie, ce qui donne un taux de 15,7 % d’os de bouquetins striés, à peu près identique à celui de l’ensemble supérieur a (tab. 256).

  • Crâne : l’emplacement des stries sur trois hémi-mandibules indique la découpe des muscles de la joue et de la lèvre inférieure et trois stries fines sur un morceau de pariétal marqué montrent une opération d’écorchement (photo 98).
  • Squelette axial : une vertèbre cervicale indéterminée présente des stries en arrière de son processus articulaire crânial, qui témoignent de la découpe du muscle intertransversaire dorsal pour la récupération de la viande ou la désarticulation du cou (position inconnue de la vertèbre). La récupération des filets et faux-filets est attestée par des marques présentes sur les apophyses transverses d’une lombaire et à la base du processus épineux de deux autres. Parmi les onze côtes marquées, trois l’ont été durant l’éviscération sur leur face interne et les autres attestent du décharnement sur leurs faces externes et le long de leurs bords antérieur et postérieur.
  • Les membres antérieurs : une seule scapula prouve le désossement de la partie supérieure de l’épaule par la présence de deux longues stries fines et obliques dans la fosse infra-épineuse, correspondant à la macreuse gélatineuse en boucherie. Trois des dix humérus marqués sont des indices de la désarticulation de l’épaule, scapulo-humérale avec cinq courtes stries fines sous l’extrémité proximale en face postérieure, et du coude avec une dizaine de stries le long de la crête épicondylaire et au-dessus de la fosse coronoïdienne. Ces marques peuvent aussi avoir été laissées au cours du décharnement des muscles, brachial dans la partie proximale et respectivement extenseur du carpe et brachio-céphalique pour les segments distaux. D’autres incisions moins ambiguës ont été dénombrées sur les sept autres fragments, le long de la diaphyse, pour le détachement du muscle anconé au-dessus de la fosse olécrânienne et des muscles triceps et coraco-brachial pour la face médiale. Six radius présentent des marques de décharnement le long de la face antérieure, deux diaphyses ulnaires ont quelques stries indiquant la découpe des muscles extenseurs des doigts et un olécrâne en compte cinq sur la partie proximale du bord antérieur qui sont la conséquence, là aussi, de la désarticulation du coude. Trois longues stries fines et parallèles ainsi qu’une dizaine, plus courtes et obliques ont été observées le long des gouttières dorsale et palmaire de deux métacarpiens. Elles proviennent du dépouillement.
  • Les membres postérieurs : trois coxaux témoignent de la décarnisation du bassin (stries longues et moyennes, fines et obliques) : du muscle fessier profond par des incisions en face latérale en arrière de l’acetabulum (rumsteck), du muscle obturateur externe par des marques le long du bord du foramen obturé et du muscle iliaque par la présence de stries sur la face médiale de l’ilium (araignée). Un coxal présente quatre courtes stries très fines et obliques sur la zone d’insertion du muscle droit de la cuisse au-dessus de l’acetabulum. Ces marques participent de l’opération de désarticulation coxo-fémorale, mais peuvent également découler de la récupération du morceau prisé de la cuisse dont fait partie ce muscle, à savoir le rond de tranche grasse. Cette partie appartient aux morceaux charnus supérieurs de la cuisse qui sont regroupés sous le terme « tranche grasse » et qui se composent également des muscles du fémur : muscle vaste latéral (le plat) et muscles vastes intermédiaires et médial (le mouvant, dont nous avons déjà parlé). Vingt-six segments de fémurs affichent d’ailleurs une centaine de stries réparties tout autour de leur diaphyse. Parmi ces restes, dix-neuf comptent des stries caractéristiques de la découpe en lanières de ces chairs de la cuisse sur les faces médiale et latérale et le long du bord antérieur, et sept du détachement des zones d’insertion tendineuse (stries plus courtes et souvent perpendiculaires) le long de la ligne âpre sur la face postérieure et le long du bord antérieur. L’un de ces fragments compte une trentaine de ce type de marques le long de l’arête latérale de la ligne âpre : découpe des muscles vaste intermédiaire, gastrocnémiens et adducteur de la cuisse. Dix-huit diaphyses tibiales présentent des marques de boucherie qui révèlent quant à elles le détachement des muscles des gîtes noix (ou semelle) et de derrière, qui s’insèrent en partie sur le tibia. Il s’agit pour le premier morceau du muscle semi-tendineux du bord antérieur, et pour le second des muscles fléchisseurs médial et latéral des doigts et poplité en face postérieure. Quatre épiphyses distales affichent de courtes stries fines le long de deux malléoles et sur les faces antérieures au-dessus de la surface articulaire. Ce sont sans doute des marques issues d’opérations de désarticulation du tarse ou de récupération des tendons distaux des membres. Les mêmes tâches sont également attestées par des marques situées le long du bord antérieur d’un calcanéum et sur la face médiale d’un talus. La récupération des tendons, mais également le dépouillement, sont indiqués sur six fragments de métatarsiens. Si les hommes ont voulu récupérer des tendons de la façon la plus complète possible, leurs incisions ont dû se porter sur les extrémités des os. Par exemple, deux épiphyses distales montrent au-dessus de la poulie en faces dorsale et latérale de courtes incisions perpendiculaires pouvant témoigner de cette découpe. Il est cependant pratiquement impossible de discerner avec exactitude les marques laissées par cette tâche de celles laissées par l’écorchement. Les deux étapes sont d’ailleurs sûrement concomitantes. Sur les quatre autres restes, quelques dizaines de stries se répartissent pour la plupart le long des gouttières dorsales, trahissant plutôt la séparation des peaux. Enfin, cinq phalanges, une première, trois deuxièmes et une troisième affichent aussi des témoins du dépouillement le long de leur diaphyse.

Globalement, la répartition des marques de boucherie met en évidence l’exploitation plus importante des quartiers arrière charnus en ce qui concerne la décarnisation (diaphyses fémorales et tibiales, vertèbres lombaires et coxaux) et des extrémités des pattes (tarsiens, métapodes et phalanges) pour le dépouillement et la récupération des tendons. Crâne, collier et membres antérieurs rapportés à l’habitat ont été proportionnellement moins affectées par les opérations bouchères.

28,6 % des 77 NRDtobs de cerf (8 crâniens et 69 post-crâniens lisibles) sont striés, ce qui représente 22 ossements. Ils appartiennent tous au post-crâne (tab. 256).

  • Squelette axial : deux vertèbres thoraciques présentent chacune plus d’une dizaine d’incisions courtes et multidirectionnelles situées le long des deux faces de leur processus épineux. Elles se situent à l’emplacement de l’insertion du muscle épineux du thorax formant les morceaux charnus des basses-côtes et du milieu de train-de-côtes.
  • Membres antérieurs : une scapula affiche six stries courtes et moyennes, profondes et obliques le long du col, sur le bord postérieur, conséquences de la découpe du chef long du muscle triceps brachial composant la macreuse à biftecks (masse charnue située dans l’angle de flexion de l’articulation scapulo-humérale). Deux fragments proximaux de diaphyse humérale comptent chacun une dizaine de longues stries sur les faces postérieure et latérale témoignant de la découpe du muscle brachial. Celle des muscles anconé et brachio-céphalique est attestée par des marques présentes sous la crête humérale et au sommet de l’épicondyle médial en face postérieure de deux autres morceaux. Tous appartiennent aux parties charnues inférieures de la raquette, à savoir la macreuse à braiser. Et enfin, sur les deux faces de l’épicondyle latéral d’une épiphyse distale d’humérus nous avons pu observer deux groupes de marques courtes et perpendiculaires, et longues et obliques, découlant de la désarticulation du coude et du détachement du muscle extenseur radial du carpe. Cette dernière opération a dû être nécessitée par la séparation du jarret qui est composé de ce muscle. Inversement, deux courtes stries perpendiculaires ont été recensées sous la tubérosité d’un radius, en face antérieure, à l’endroit de l’insertion du muscle brachial, déjà décharné au niveau de l’humérus.
  • Membres postérieurs : six diaphyses fémorales comptent chacune environ une dizaine de stries longues ou moyennes, fines et obliques, présentes le long du bord antérieur et générées par la découpe en lanières du muscle vaste intermédiaire. Un segment diaphysaire distal de face antérieure compte six courtes stries perpendiculaires entre les deux lèvres de la trochlée. Ces marques sont celles de la désarticulation tibio-fémorale. Quatre morceaux de diaphyse tibiale, illustrant chacune l’une des quatre faces de cet os, comprennent quelques stries obliques de taille moyenne, résultant de la décarnisation du gîte de derrière, composé sur cet élément des muscles fléchisseurs des doigts, du poplité et du semi-tendineux. Un calcanéum a deux courtes stries fines et perpendiculaires sur sa face latérale, pouvant témoigner de la désarticulation ou de la récupération des tendons. Enfin, un métatarsien affiche deux groupes de stries, l’un situé le long de la gouttière dorsale et découlant de l’écorchement, et l’autre, juxtaposé à un point d’impact, assimilé plutôt à un raclage du périoste.

Parmi les morceaux de cerf rapportés sous l’abri, à l’exception des deux restes de lombaire, tous ceux qui sont abondamment charnus présentent des marques de décarnisation. Les plus marqués sont en effet les diaphyses des segments supérieurs des membres (stylopodes et zeugopodes) et les vertèbres thoraciques.

Exactement la moitié des ossements de chevaux observables ont été striés par les hommes, précisément 24 sur 48 NRDtobs (9 crâniens et 39 post-crâniens ; tab. 256). Parmi ces marques, nous pouvons observer différentes étapes de la mise en pièces et de la décarnisation, à commencer par la désarticulation scapulo-humérale, grâce à la présence de deux fines stries sur la face latérale le long de la cavité glénoïde d’une scapula. Ensuite quatre humérus trahissent la récupération des chairs de l’épaule par leurs dizaines de stries longues et courtes, obliques et perpendiculaires, situées pour la plupart le long de la face postérieure mais également sur la tubérosité du grand rond. Il s’agit là du détachement des muscles grand rond et grand dorsal et pour celles de la face postérieure, de l’anconé, du chef médial du triceps brachial et du brachial. Les mêmes opérations de décharnement sont également remarquées sur deux radio-ulnas. L’un porte deux stries perpendiculaires et de taille moyenne sur sa face postérieure proximale, témoignant du détachement des insertions du même muscle brachial, et l’autre une dizaine de courtes stries fines dans la partie distale du bord latéral, dans la zone du muscle extenseur oblique du carpe. Les muscles obturateur interne et iliaque de la face interne du coxal ont été récupérés sur deux ossements portant respectivement trois et quinze stries en arrière de l’acetabulum et au niveau de l’aile de l’ilium. Ces muscles sont ceux des parties à cuisson rapide de la bavette et de l’araignée. La viande de la cuisse a également été prélevée sur deux fémurs au niveau de la face antérieure de part et d’autre du foramen nourricier. Les stries sont regroupées par dizaines sur l’un et seulement au nombre de quatre pour l’autre ; elles sont longues, fines et obliques, et sont situées sur les zones d’insertion des muscles petit et grand adducteur de la cuisse, pectiné et vaste intermédiaire. De même que pour l’épaule, le gîte de derrière a été aussi exploité. Dix tibias montrent des traces de boucherie. Parmi eux, quatre ont des incisions dans leur partie proximale témoignant de la séparation des deux segments supérieurs de la cuisse. Situées sur les zones d’insertion tendineuses du muscle tibial crânial en face latérale et des fascia lata juste au-dessus de la tubérosité, ces incisions participent aussi de leur décarnisation. Les six autres tibias comptent des stries typiques de cette opération bouchère, réparties en face médiale et postérieure dans leur partie médiane. Les muscles ainsi détachés sont le fléchisseur latéral des doigts et le poplité. Enfin, le dépouillement est attesté sur deux métapodes (photo 99) et une première phalange qui comptent de très nombreuses marques, pour les premiers sur le côté de leur diaphyse, et en face postérieure pour la phalange. L’un des métapodes rassemble jusqu’à une trentaine d’incisions.

Mises à part les neuf mandibules de cheval et la vertèbre thoracique qui ne montrent aucune marque de boucherie, toutes les autres parties des carcasses rapportées à l’habitat ont été exploitées par l’homme, et ce pour au moins la moitié de leurs restes.

Sept ossements de chevreuil, sur les 20 NRDtobs, affichent des stries (tab. 256). Ce sont essentiellement des stries de découpe de la viande. Une cervicale présente néanmoins des marques au-dessus de sa facette articulaire gauche pouvant attester de la désarticulation du cou. Pour les autres, les incisions concernent les segments diaphysaires d’un humérus, d’un fémur et de trois tibias, et le processus épineux d’une vertèbre thoracique.

Trois restes de chamois sur quatre sont marqués par des outils. Deux faces postérieures et un bord antérieur de trois fémurs indiquent la découpe des parties les plus charnues de la cuisse.

23 ossements striés appartenant à des bouquetins proviennent des couches indéterminées de l’ensemble supérieur. Parmi eux, une hémi-mandibule compte une dizaine de stries sur la face linguale au niveau de la symphyse intermandibulaire. Ces marques correspondent à la découpe des muscles génio-hyoïdien et génio-glosse qui a lieu lors de l’enlèvement de la langue. Pour le squelette axial, une vertèbre lombaire présente des stries à la base de son processus épineux, qui met en évidence la récupération des filets, déjà relevée dans les ensembles b et c-d. Carpe et tarse témoignent de leur désarticulation par cinq courtes stries sur l’extrémité dorso-latérale d’un scaphoïde, ainsi que par une trentaine de marques réparties sur deux talus (deux faces) et un calcanéum. Huit épiphyses d’os longs témoignent également de la mise en pièces. Il s’agit d’une tête fémorale avec trois stries juxtaposées à la fovea capitis, de deux extrémités distales d’humérus portant des marques de désarticulation du coude au-dessus de la fosse olécrânienne et sur la face latérale de la trochlée, de trois poulies métacarpienne et métatarsienne marquées en face latérale dont deux comptent également une trentaine et une dizaine de stries issues du dépouillement et réparties autour de la diaphyse distale, d’un radio-ulna proximal avec trois stries sous son relief latéral d’insertion pour la découpe du muscle extenseur du doigt latéral, et d’une épiphyse distale de tibia portant une vingtaine de marques sur la malléole et sur ses faces postérieure et antérieure. Rappelons que cet ensemble supérieur indéterminé avait fait l’objet d’un ramassage sélectif des pièces, ce qui expliquerait la déficience des fragments diaphysaires et donc l’absence d’indices de décarnisation sur les os longs. Enfin, trois premières phalanges striées et six deuxièmes sont des indices de l’écorchement.

Sur les 586 restes striés de bouquetin de l’échantillon des indéterminés, nous dénombrons douze crâniens et 574 post-crâniens. Presque un quart de cet assemblage est marqué, précisément 22,5 % du NRDtobs (tab. 257).

  • Crâne : cette partie compte quatre faces latérales de branches horizontales d’hémi-mandibules et un reste de maxillaire au niveau du foramen infra-orbitaire avec une petite dizaine de stries témoignant de la découpe des muscles digastrique, mylo-hyoïdien et masseter pour la décarnisation de la joue et l’écorchement du crâne. Six fragments crâniens, dont quatre indéterminés provenant de la voûte, un zygomatique sous-orbitaire et un temporal droit, présentent également des traces d’écorchement. Un fragment intéressant regroupant un rocher rattaché à un morceau de crâne compte des stries sur la face interne, en arrière du processus jugulaire, pouvant peut-être résulter du détachement de l’atlas ou de la récupération de la cervelle.
  • Squelette axial : 84 ossements du tronc indiquent des opérations de boucherie. Nous observons notamment le prélèvement des filets et faux-filets sur huit lombaires. Celui des muscles épineux, transversaire épineux et longissimus du thorax composant le milieu de train-de-côtes (entrecôte) sur quinze processus épineux et transverses de vertèbres thoraciques. Un tubercule costal strié met aussi en évidence la découpe du muscle longissimus. Un corps vertébral de thoracique appartenant à un juvénile présente trois courtes stries en face ventrale qui témoignent quant à elles du détachement des filets (muscles long du cou et petit psoas). Parmi les 54 côtes incisées, 40 attestent de l’éviscération et 34 de la décarnisation des muscles de l’abdomen. Cinq vertèbres cervicales et un axis présentent des stries en arrière des processus articulaires pour les premières, et sous la surface articulaire crâniale pour l’axis. Il s’agit du détachement des chairs du collier (muscles long du cou) et de la désarticulation du cou.
  • Membres antérieurs : une tête humérale et une extrémité proximale de face postérieure striées indiquent la désarticulation scapulo-humérale. Dix fragments diaphysaires distaux ont de courtes stries situées aux emplacements stratégiques lors de la désarticulation du coude, le long des épicondyles latéral et médial, et au-dessus de la fosse olécrânienne. Deux olécrânes et quatre fragments proximaux de radius confirment cette étape du dépeçage. Quatre fragments scapulaires, 43 diaphyses humérales et 58 radio-ulnaires révèlent le désossement de l’épaule. La séparation des métacarpiens d’avec le carpe et les phalanges est attestée sur huit extrémités proximales de métacarpiens et trois distales. L’écorchement peut aussi être en partie responsable de ces marques. Cette opération est de toute façon confirmée sur 14 segments diaphysaires de cet os.
  • Membres postérieurs : sur les douze morceaux de bassin, huit coxaux indiquent la désarticulation coxo-fémorale. Quatre têtes fémorales et trois parties proximales de face médiale incisées vérifient cette étape. La désarticulation du genou est illustrée par la présence d’une dizaine de courtes stries le long de l’arête externe de la fosse supra-condylaire latérale d’un fémur et par des marques courtes, profondes et perpendiculaires sur trois diaphyses proximales de tibia. Celle du tarse est confirmée par des marques similaires sur sept épiphyses distales de tibia (photos 100 et 101). Quant à la décarnisation de la cuisse, quatre fragments de coxaux, 130 de diaphyses fémorales et 120 de tibias témoignent du décharnement en lanières et du détachement des zones d’insertions tendineuses. Comme pour les membres antérieurs, les métatarsiens ont été quelquefois séparés des membres : trois extrémités proximales et deux distales portent des traces de boucherie. Ces dernières, proches des extrémités, peuvent participer de la mise en pièces mais également du dépouillement ou de la récupération des tendons. Deux calcanéums portant quelques marques le long de leur bord antérieur vont dans le sens du dépeçage de ces parties. Enfin, 27 diaphyses métatarsiennes et 24 phalanges striées (13 premières, 10 deuxièmes et 1 troisième) confirment l’enlèvement des peaux (photo 102). Quatre métapodes incisés, dont trois poulies, viennent compléter ces opérations de désarticulation et de dépouillement. Les marques laissées le long des diaphyses métapodiennes, qu’elles soient des membres antérieurs ou postérieurs, ne sont pas toutes courtes et perpendiculaires. Elles sont au contraire souvent de taille moyenne à longue, multidirectionnelles, très fines et peu profondes. Elles font aussi penser quelquefois au raclage de ces parties dans le but de nettoyer le périoste avant la fracturation. Lors de mon expérimentation sur la jeune daine, j’ai pu observer que le détachement progressif de la peau sur ces extrémités maigres laissait souvent de nombreuses marques fines et obliques sur toute la longueur de la diaphyse (photo 93).

Les pièces du squelette les plus marquées par les outils sont les vertèbres thoraciques, les fémurs, tibias, deuxièmes phalanges et métapodes. Ces derniers, étant moins charnus, sont plus facilement concernés par l’action des outils. Les coxaux, vertèbres lombaires, humérus, radio-ulnas, premières phalanges suivent ensuite, devant les côtes, les crânes, les omoplates, le tarse et les troisièmes phalanges. Certaines parties sont totalement dépourvues de marques, ce sont le carpe, la patella, les sésamoïdes, les épiphyses proximale de tibia et distale d’humérus, le sacrum, les rochers et les hyoïdes.

Les seuls restes d’aurochs témoignant d’une action humaine proviennent des niveaux non-stratifiés de l’ensemble supérieur et de l’échantillon indéterminé. Il s’agit d’un segment d’hémi-mandibule portant une trentaine de stries en faces externe et interne de la branche horizontale. Ces marques sont celles de la découpe de la langue et des muscles de la joue. Un fragment médian de corps costal présente trois stries courtes et profondes en face médiale. Elles indiquent probablement l’éviscération d’une bête. Enfin, trois segments du membre antérieur (1 scapula et 2 ulnas) révèlent la désarticulation du coude et de l’épaule ainsi que la découpe des muscles extenseurs des doigts, insérés le long de la diaphyse ulnaire. En ce qui concerne les ossements des autres espèces issus de ces deux échantillons non localisés, seules les opérations de boucherie non évoquées jusqu’ici seront prises en considération. La description précises de tous les stades de traitement des carcasses pour de tels niveaux n’aurait aucun intérêt en ce qui concerne l’évolution ou la constance des pratiques humaines. Nous pouvons d’ailleurs observer une exploitation bouchère globale pratiquée à peu près dans les mêmes proportions que dans les autres ensembles osseux. Commençons par les espèces les moins communes. Par exemple pour le chamois, duquel jusqu’ici l’exploitation n’avait concerné que les quartiers arrière, l’ensemble indéterminé a fourni quatre segments issus des trois os longs du membre antérieur, indiquant le désossement de l’épaule. Quatre fémurs, deux tibias et un coxal illustrent les opérations de décharnement de la cuisse et deux métapodes et une phalange révèlent le dépouillement d’au moins un animal.

Les ossements striés de chevreuil des niveaux indéterminés livrent un nombre important d’humérus marqués, par rapport aux autres assemblages où ce sont les membres postérieurs qui sont les plus touchés. Toutefois la seule opération non encore remarquée sur ce petit Cervidé consiste en la désarticulation des sabots illustrée par quelques courtes stries présentes sur la surface articulaire de deux troisièmes phalanges.

Pour le cheval, l’ensemble supérieur indéterminé a fourni un seul reste marqué, et le grand échantillon non localisé 26. Pour le premier, il s’agit d’un olécrâne présentant une quinzaine de stries de taille moyenne, obliques et très fines, situées sur le bord postérieur sous la tubérosité. Elles attestent de la découpe des muscles tenseur du fascia antébrachial et du fléchisseur profond du doigt (chef ulnaire) lors de la désarticulation du coude. Pour les autres, outre un reste distal de corps costal strié sur sa face externe illustrant le détachement des muscles du thorax et de l’abdomen déjà observé dans l’ensemble supérieur a, le squelette axial offre également deux fragments de vertèbre cervicale et thoracique. La première est affectée de trois stries très fines en arrière de son processus articulaire caudal, révélant sûrement la désarticulation ou le décharnement du collier par incision des muscles complexus et longissimus du cou. La vertèbre thoracique, appartenant à un juvénile, montre de part et d’autre de son corps vertébral quelques fines marques parallèles, qui sont la conséquence de la récupération soit du muscle long du cou pour les premières, soit du petit psoas pour les dernières. Ils appartiennent aux morceaux prisés du filet mignon des basses-côtes ou des filets. Un coxal affiche des marques sur ses deux faces, de part et d’autre de la grande échancrure sciatique, à l’endroit de l’insertion des muscles fessier accessoire et obturateur interne. Ce sont les parties charnues qui composent la partie supérieure de la cuisse (ou arrière de l’aloyau) appartenant au rumsteck. Humérus, fémurs et tibias se partagent tous les autres restes striés de cet ensemble. Hormis une extrémité distale de tibia affichant deux courtes stries profondes sur la face latérale de la cochlée tibiale résultant de la désarticulation tibio-tarsale, tous les autres segments sont diaphysaires et découlent de la décarnisation (récupération de la viande en lanières et découpe des tendons au niveau des insertions musculaires).

Les cinq restes striés de cerf de l’ensemble supérieur indéterminé sont riches d’informations. Un processus styloïde d’ulna avec deux courtes stries fines en face médiale est lié à des processus de désarticulation du carpe. Une scapula avec des incisions en face latérale sous la cavité glénoïde atteste de la désarticulation de l’épaule. Une face médiale de fémur comprenant six stries obliques dans sa partie proximale montre le décharnement de la cuisse, et une extrémité distale de métacarpien présente dix courtes stries perpendiculaires issues du dépouillement. Enfin, un fragment d’extrémité d’andouiller de bois de cerf affiche incontestablement 18 courtes stries profondes et parallèles (chp. 5.2.2. ; photos 150 et 151). Elles sont pour le moment restées ininterprétées. Concernant les 98 ossements marqués de cerf provenant de l’échantillon indéterminé, quelques-uns ont pu compléter les opérations bouchères observées jusque là (tab. 257). Un prémaxillaire droit affiche notamment deux longues stries parallèles illustrant l’écorchement du crâne. Au sein du squelette axial, exception faite d’un processus épineux de vertèbre thoracique et de deux restes de côtes incisés sur leur face externe résultant de la décarnisation déjà remarquée à ces endroits dans les ensembles supérieurs a, b et c-d, un fragment distal de corps costal strié sur sa face interne révèle quant à lui l’éviscération d’au moins une bête. Une troisième phalange porte trois courtes stries de désarticulation sur la face axiale à l’extrémité proximale. Sur les 88 os longs striés, toutes les opérations bouchères inventoriées auparavant sont documentées, du dépouillement des pattes à la désarticulation des trois segments et à leur décharnement. Globalement 40,2 % des 244 NRDtobs des cerfs de cet échantillon sont striés. Les coxaux et les diaphyses des os longs supérieurs des membres (stylopodes et zeugopodes) sont les segments les plus touchés par la boucherie. Viennent ensuite, côtes, vertèbres thoraciques et métapodes.

A l’exception de l’ensemble inférieur, dans toute la séquence, bouquetins, cerfs, chevaux, chevreuils, chamois et aurochs témoignent d’actions bouchères récurrentes et variées. Du dépouillement au décharnement, en passant par la mise en pièces ou l’éviscération, toutes les étapes sont documentées. Partout, les meilleurs morceaux ont été largement striés, assurant le rôle primordial qu’ont eu les hommes sur ces carcasses d’herbivores.

A la grotte SAINT-MARCEL, environ 30 % à 50 % de l’assemblage osseux de l’ensemble 7 présente des marques de boucherie. En ce qui concerne l’exploitation du cerf, plusieurs étapes dans le traitement des carcasses avaient pu être mises en évidence (Daujeard, 2004, 2007a) :

  • L’éviscération : 21 % des fragments de côtes montrent des stries caractéristiques de l’éviscération. Situées sur leur face interne, elles sont courtes, fines, profondes et parallèles.
  • Le dépouillement : c’est une étape préalable au traitement des carcasses. 23 % des métapodes, soit 112, montrent de courtes stries profondes et perpendiculaires au grand axe de l’os, indiquant les opérations d’enlèvement de la peau (photo 103). Celles-ci sont accompagnées des marques laissées sur quelques phalanges 1 et 2, sur un calcanéum ainsi que sur des maxillaires, des hémi-mandibules et sur deux fragments d’orbite.
  • La mise en pièces et la désarticulation : l’analyse des méthodes de désarticulation des os longs est entravée par l’extrême rareté des extrémités de ces os. La quasi-absence du squelette axial gêne également l’analyse des stratégies de désarticulation du tronc. Néanmoins le matériel a révélé diverses actions anthropiques concernant la mise en pièces de l’animal, comme la désarticulation de l’épaule et du bassin. Cette étape, permettant d’isoler le tronc, a pu s’effectuer à plusieurs reprises sur le lieu d’abattage, étant donné la pauvreté des parties axiales dans le site. Ces dernières, très riches en os spongieux ont pu également faire l’objet de traitements particuliers dans le site d’habitat, comme la fragmentation pour la préparation de bouillons gras ou être utilisées comme combustible. Dans une seconde étape, les os des membres (photo 108), les côtes et les vertèbres, ainsi que les mandibules et les crânes, étaient désarticulés. Aucun os en connexion n’a été retrouvé.
  • La décarnisation : cette opération a été observée sur tous les os longs (photo 105), ainsi que sur quelques côtes, vertèbres, omoplates et hémi-mandibules (enlèvement de la langue, des muscles de la joue et des lèvres supérieure et inférieure). Cette activité est associée à la désarticulation secondaire. La récupération de la chair laisse généralement de longues stries fines, peu profondes, obliques et parallèles entre elles. Cependant des incisions plus courtes et plus profondes sont observées sur les reliefs osseux, aux endroits d’insertion des muscles et des tendons. Leur présence abondante sur des os assez pauvres en viande comme les radius et les tibias, et parfois même sur des parties presque dépourvues de chair comme les métapodes, témoignent de la nécessité de cette opération avant la récupération de la moelle (Costamagno, 2000). Les os sont ainsi «nettoyés» de leur chair avant d’être fracturés. Pour les os canons notamment, certaines stries assimilées à du filleting par leur morphologie et leur orientation correspondraient en fait à des actions d’enlèvement des tendons, au dépouillement ou au raclage (cf. infra). Un fragment de vertèbre lombaire appartenant à la couche g présente une série de stries sur la face ventrale du corps vertébral. Ces stries pourraient correspondre non seulement à l’éviscération,.mais aussi au détachement des filets (muscle petit psoas ; photo 104).
  • Le raclage : nous observons des stries juxtaposées aux points d’impact sur une centaine d’ossements. Elles sont généralement superficielles, de taille variée, et parallèles entre elles. Elles témoignent de la préparation des plans de fracture. D’autres, plus étendues et fréquemment observées le long des diaphyses de métapodes, ont pu servir au nettoyage de la surface osseuse à des fins non alimentaires (photos 106 et 107). P. Valensi (1994) observe le même type de traces sur les diaphyses métapodiennes des cerfs du Lazaret. Elle évoque à ce sujet la possibilité d’un nettoyage du périoste avant la fracturation pour des éléments qui auraient été abandonnés quelques jours et dont la chair et la peau auraient été alors plus difficile à retirer. Elle émet aussi la possibilité d’un nettoyage nécessaire à des utilisations en tant que retouchoirs.

Sur les carcasses des cerfs, les marques de boucherie, nombreuses et variées, reflètent clairement la volonté de récupérer l’essentiel des parties nutritives, ainsi que la peau et les tendons des bêtes abattues.

Sur celles des chevreuils de cet ensemble 7, les incisions d’outils ont montré également plusieurs étapes bouchères : de la mise en pièces au dépouillement (un os canon présente une cinquantaine d’incisions courtes, fines, profondes et parallèles), en passant par le décharnement et la récupération des tendons.

Si chevaux et Bovinés ont été chassés pendant la fréquentation de l’abri, les produits alimentaires ont été introduits après un premier traitement sur le lieu d’abattage. La grande majorité des ossements de grands herbivores montre une exploitation alimentaire complète des morceaux rapportés à l’habitat. Tibias, fémurs et humérus ont été ramenés pour leur viande et leur moelle, et les métapodes pour la récupération des tendons et des peaux.

Pour le bouquetin, la pauvreté des restes postcrâniens (je pense que ce déficit est plus la conséquence d’un problème de détermination de l’espèce liée à l’intense fracturation que la manifestation d’une réelle lacune) rend hasardeuse l’analyse des stratégies d’exploitation des carcasses. Par contre, toutes les pièces portent des marques de récupération de la viande, et un métapode présente une cinquantaine de courtes stries, profondes et transversales au grand axe de l’os, caractéristiques de l’écorchement.

Dans les trois autres ensembles (tab. 252), j’ai étudié les marques laissées sur les ossements d’herbivore en procédant à une analyse descriptive par catégorie de segment anatomique (tab. 258).

L’ensemble supérieur rassemble 67 restes striés de cerf sur 134 NRDtobs, ce qui représente exactement la moitié de l’échantillon observable (tab. 258).

  • Crâne : deux hémi-mandibules et un maxillaire affichent une dizaine de stries témoignant de la récupération des muscles des joues (masséter et buccinateur) et de la langue (mylo-hyoïdien et digastrique).
  • Squelette axial : un seul fragment proximal de corps costal illustre l’exploitation bouchère de cette partie du squelette. Il comprend une quinzaine de courtes stries fines peu profondes et obliques sur la face externe, qui traduisent le décharnement du muscle dentelé dorsal crânial ou caudal (selon le rang de la côte) appartenant à la partie médiale du milieu de train-de-côtes ou arrière des faux-filets.
  • Membres antérieurs : deux fragments de scapula présentent l’un 5 et l’autre 18 courtes marques peu profondes et perpendiculaires alignées le long de leur bord postérieur. Elles trahissent la découpe du muscle triceps brachial et du grand rond qui appartiennent respectivement aux morceaux de l’épaule appelés en boucherie la macreuse à biftecks et le dessous de macreuse. Trois fragments proximaux d’humérus confirment la découpe de ces muscles par la présence d’incisions au niveau et sous la tubérosité du même nom qui leur donne lieu de zone d’insertion. Quatre autres fragments provenant de la face antérieure indiquent le détachement du muscle brachio-céphalique par des marques de taille moyenne et obliques présentes sous la crête et au-dessus de la fosse coronoïdienne. Enfin, quelques courtes stries perpendiculaires ont pu être relevées le long des épicondyles médial et latéral de trois humérus, découlant quant à elles de la désarticulation du coude. Deux longues stries très fines et obliques sur la face médiale d’un olécrâne pourraient également être assimilées à cette étape de la mise en pièces. La présence de ces marques à l’endroit de l’insertion du chef ulnaire du muscle fléchisseur profond des doigts peut aussi attester d’une phase de la décarnisation du jarret (gîte de devant). Leur morphologie irait dans ce sens. Quatre segments diaphysaires de radius montrent des incisions de toutes tailles et à directions variées, circonscrites dans la zone proximale du bord médial, sur et sous la tubérosité du radius. Elles correspondent à la récupération des muscles brachial et biceps brachial qui font partie des pièces de la raquette appelées macreuse gélatineuse ou à braiser et jumeau nerveux. Le dépouillement est observé sur cinq diaphyses métacarpiennes. Les marques, réparties le long des gouttières, sont de morphologies variées, longues ou courtes, perpendiculaires ou obliques, profondes ou superficielles. Elles dénotent la récupération des peaux, mais aussi certainement le « nettoyage du périoste », déjà observé dans l’ensemble 7 et aux Peyrards, afin de faciliter leur fracturation. L’un de ces métacarpiens compte plus d’une trentaine d’incisions.
  • Membres postérieurs : 18 diaphyses fémorales sont striées de plus d’une quinzaine de marques chacune, observées le long de leurs faces médiale, antérieure et postérieure, de part et d’autre de la ligne âpre et au niveau des fosses supra-condylaires. Tous ces fragments montrent une quantité importante d’incisions, qui témoignent toutes de la décarnisation en lanières ou de la découpe des insertions tendineuses (face postérieure). Elles mettent donc en évidence le détachement du muscle vaste intermédiaire (face médiale et bord antérieur) et des muscles pectiné, gastrocnémiens (chefs latéral et médial), adducteur de la cuisse et fléchisseur superficiel des doigts. Certains font partie des morceaux les plus charnus de la cuisse, de la poire pour le pectiné, d’une partie de la tranche grasse appelée le mouvant pour le vaste intermédiaire et d’autres moins tendre du gîte-noix, précisément le nerveux de gîte pour les derniers. 17 fragments diaphysaires de tibia révèlent la récupération de la viande du gîte de derrière rassemblant muscles poplité, fléchisseurs latéral et médial des doigts (face postérieure et bord latéral) et semi-tendineux (bord antérieur). Les marques sont aussi de toutes sortes, dénotant la découpe en lanières comme celle des zones tendineuses. Enfin, quatre métatarsiens et deux métapodes indéterminés présentent de nombreuses stries courtes et perpendiculaires le long des arêtes saillantes des gouttières dorsales et plantaires. Situées en position médiale, elles caractérisent nettement le dépouillement.

Les segments de cerfs les plus largement affectés par les opérations de boucherie sont aussi les plus charnus. Ce sont les scapulas et les diaphyses humérales et fémorales. Ces parties sont suivies de près par les tibias et les métapodes, marqués pour plus de la moitié. Les radius, les côtes et les mandibules sont les moins striés et certains restes en sont totalement dénués, c’est le cas du coxal, de la vertèbre thoracique et des épiphyses proximales d’un radius et d’un métatarsien.

Cinq os longs de chevreuil témoignent du dépouillement pour trois métapodes, de la désarticulation du coude pour une épiphyse proximale de radius et du décharnement du fléchisseur latéral des doigts sur un tibia présentant 25 courtes stries très fines et obliques sous le foramen. Le cheval compte quatre restes striés sur les cinq observables. Les étapes remarquées sont celles de la décarnisation de l’épaule et de la cuisse (diaphyses d’un humérus, d’un fémur et d’un tibia), et de l’écorchement. Un autre métatarsien entier porte deux groupes d’une dizaine de stries sur chacune de ses deux extrémités. La récupération des tendons est ici aussi envisageable. Des incisions présentes au-dessus de la fosse olécrânienne et sur la partie distale de la face latérale de deux humérus de bouquetins indiquent la désarticulation du coude pour les premières et le détachement du muscle extenseur radial du carpe pour les secondes. Enfin, deux diaphyses de fémur et de radius de mégacéros indiquent leur décarnisation.

Les cerfs de l’ensemble inférieur comptent un peu plus de la moitié, 51,1 %, de leurs 94 NRDtobs qui sont marqués, ce qui représente 48 ossements (tab. 258).

  • Crâne : deux maxillaires, une hémi-mandibule et une meule de bois portent des indices de l’écorchement, du détachement des muscles des lèvres inférieure et supérieure, de la joue et de la récupération de la langue.
  • Squelette axial : comme dans l’ensemble supérieur, une seule côte striée représente la boucherie du tronc. Il s’agit toutefois d’un corps costal quasi-entier recouvert d’une centaine de stries entremêlées, fines et peu profondes, réparties pour la plupart sur la face externe. Les hommes ont sans doute voulu décharner les muscles abdominaux en raclant les os. Sur la face interne, les marques sont celles de l’éviscération.
  • Membres antérieurs : cinq humérus ont des marques au niveau de la diaphyse distale, le long des épicondyles, attestant de la désarticulation du coude, et six montrent des stries de décharnement sur les faces médiale, au niveau du col et de la tubérosité du grand rond (muscles brachial, grand rond et grand dorsal, coraco et triceps brachial), et le long de la face postérieure (anconé et extenseur radial du carpe). Deux diaphyses de radius ont permis de mettre en évidence la désarticulation radio-carpale par détachement du muscle extenseur oblique du carpe. Cette opération est attestée par la présence de plus d’une trentaine de stries courtes et perpendiculaires réparties le long du sillon pour l’extenseur radial du carpe et le long de la partie distale du bord latéral. Deux autres fragments présentent une petite dizaine de marques obliques, fines et de taille moyenne sur leur face antérieure. Il s’agit également du décharnement, mais cette fois-ci en lanières, des chairs du jarret. Le dépouillement est observé sur deux fragments de gouttière dorsale de métacarpien.
  • Membres postérieurs : Cinq segments de bord antérieur de fémurs portent de courtes marques fines et obliques issues de la découpe du muscle vaste intermédiaire. 17 diaphyses tibiales comptent plusieurs stries de découpe en lanières de la viande du gîte de derrière et de détachement des zones tendineuses, jusqu’à une trentaine pour certaines, situées pour la plupart le long du bord latéral de part et d’autre du foramen nourricier, mais également en face postérieure et médiale. Enfin, cinq métatarsiens et une extrémité distale de première phalange indiquent le dépouillement, par de courtes marques sur les bords saillants de leur gouttière dorsale pour les premiers, et par une vingtaine de stries réparties sur la face abaxiale de l’épiphyse distale et la face postérieure de la diaphyse pour la dernière.

Les parties les plus fréquemment striées sont, comme dans l’ensemble supérieur, les plus riches. Ce sont les diaphyses humérale, fémorale et tibiale, et les côtes. Les diaphyses des radio-ulnas et des métapodes le sont un peu moins (moins de la moitié de leurs restes), et le coxal, les cervicales ainsi que les épiphyses d’os longs en sont totalement dépourvus.

Sur les treize restes marqués de chevreuil de l’ensemble inférieur, nous dénombrons un maxillaire portant une quinzaine de courtes stries liées au décharnement de la joue et à l’écorchement, trois côtes et un sternum qui témoignent de l’éviscération et du décharnement de l’abdomen pour les premières et de la récupération des muscles pectoraux pour le second (hampe). Ces muscles sont ceux du caparaçon formant le gros bout et le milieu de poitrine. Le sternum compte une vingtaine de stries. Une scapula, un humérus et trois radio-ulnas indiquent la désarticulation du coude et le désossement de l’épaule. Des marques d’écorchement ont pu être observées sur un fragment de gouttière dorsale de métacarpien. L’exploitation des quartiers arrière a seulement été relevée sur une diaphyse tibiale par plus d’une quarantaine de stries de décharnement et de raclage, et sur le côté de la diaphyse d’un métatarsien par une bonne dizaine de marques issues de la récupération des peaux.

Pour le daim, nous dénombrons le même nombre d’ossements marqués que pour les chevreuils. Parmi eux, quatre humérus et trois radio-ulnas représentent l’exploitation des quartiers avant, tandis que celle de l’arrière regroupe trois diaphyses fémorales, deux tibiales et un talus. Il s’agit donc principalement du décharnement de ces os, mais également de la désarticulation tibio-tarsale illustrée par des marques sur le bord latéral de la trochlée proximale du talus. Un des humérus affiche environ cinquante incisions en face médiale sur et sous la tubérosité du grand rond. L’os a été décharné puis raclé à cet endroit.

Enfin, chevaux et mégacéros comptent respectivement un métapode et trois diaphyses d’os longs striés, un radius et deux tibias. Pour le premier, il correspond au dépouillement, et pour les trois derniers, les marques, très nombreuses sur les diaphyses tibiales (une quarantaine et une trentaine), sont celles de la décarnisation.

Dans la couche u, les cerfs, moins abondants, comprennent 34 restes marqués sur les 71 NRDtobs, ce qui représente toujours à peu près la moitié de l’échantillon (tab. 258). Au sein du squelette axial, une vertèbre thoracique compte une vingtaine de stries sur l’une des faces de son processus épineux, qui découlent du décharnement du muscle épineux du thorax, et une lombaire, cinq courtes stries profondes situées en arrière de son processus articulaire caudal et qui témoignent de la découpe du muscle transversaire épineux. Ces opérations correspondent à la récupération des filets et faux-filets. Pour les membres antérieurs, deux radius et un humérus montrent des marques réparties autour de leur surface articulaire proximale, qui attestent de la désarticulation du coude. Quatre diaphyses humérales et trois radio-ulnaires ont connu le décharnement de leur masse musculaire. Sur l’un des humérus, le nombre (plus d’une dizaine) et la morphologie (longues, superficielles, serrées et parallèles) des stries dénotent le raclage du périoste. Deux métacarpiens, dont une épiphyse proximale, affichent des marques d’écorchement ou de découpe des tendons. L’extrémité compte en effet deux groupes d’une dizaine de stries situées le long de la gouttière mais également en face médiale juste sous la surface articulaire. Les quartiers arrière ont été proportionnellement plus affectés par les outils que les quartiers avant. Nous observons déjà au niveau de la ceinture pelvienne des incisions sur la surface iliaque d’insertion du muscle droit de la cuisse, provenant de la désarticulation coxo-fémorale, et une strie profonde présente entre les deux premiers processus épineux sacraux, résultant de la découpe du muscle transversaire épineux, et compris à ce niveau dans le rumsteck. Une diaphyse fémorale et treize tibiales révèlent la découpe en lanières des chairs de la cuisse. Un tibia comptant plus d’une quarantaine de longues stries fines et parallèles atteste également du nettoyage de l’os. Nous pouvons aussi observer cette opération sur le côté de trois diaphyses métatarsiennes regroupant plus d’une trentaine de marques très fines, superficielles, obliques et parallèles. Toutefois, certaines de ces marques, ainsi que d’autres présentes le long de l’arête d’une gouttière d’un quatrième métatarsien sont la conséquence de l’écorchement. Phalanges, tarsiens, mandibule et scapula n’ont pas été affectés par l’action humaine.

Les ossements de daim sont proportionnellement moins striés que ceux de cerf. 28,5 % des 267 restes observables le sont, ce qui en représente 76 (tab. 258).

  • Crâne : deux groupes de sept et vingt stries de taille moyenne, profondes, très fines et obliques se situent sur la face externe de la branche montante de deux hémi-mandibules, sous leur processus condylaire, à l’endroit de l’insertion du masséter. Ces marques illustrent la désarticulation de la mandibule et le décharnement de la joue. Deux autres fragments d’hémi-mandibules proches du foramen mentonnier, témoignent quant à eux de la découpe de la lèvre inférieure et de la langue, grâce à quelques stries présentes sur les deux faces. Une dizaine de longues stries très fines recensées le long du bord supra-orbitaire attestent de l’écorchement, et deux marques courtes localisées sur un fragment de condyle occipital de la désarticulation du cou.
  • Squelette axial : l’exploitation bouchère du tronc est un peu mieux documentée que chez le cerf. Cette partie regroupe deux fragments de corps costal avec quelques courtes marques d’outils sur leur face interne révélant l’éviscération, deux vertèbres thoraciques et une lombaire. Les zones striées des ces dernières sont leur processus épineux. Sur l’une des faces latérales d’une épine de thoracique, nous dénombrons une quarantaine de courtes incisions très fines et multidirectionnelles. Le décharnement de ces morceaux riches est donc attesté.
  • Membres antérieurs : le détachement du muscle infra-épineux d’une omoplate (macreuse gélatineuse) a été prouvé par la présence d’une trentaine de stries fines, courtes et moyennes, à directions variées, dans sa fosse infra-épineuse. Parmi les onze humérus striés, huit le sont dans les parties proximale et médiane de leur face médiale, à proximité de la tubérosité du grand rond et dessous. Nous avons déjà vu que cette zone est celle de l’insertion de nombreux muscles de l’épaule correspondant aux différentes catégories de la macreuse, comme le grand rond et le grand dorsal, le chef médial du triceps brachial et le coraco-brachial. Deux autres fragments ont permis la mise en évidence du détachement du deltoïde, pour la première fois observé grâce à des incisions situées à l’endroit même de la tubérosité deltoïdienne, et la récupération du brachio-céphalique avec des marques présentes sous la crête. Le dernier fragment compte une vingtaine de courtes stries fines et perpendiculaires situées juste sous la tête humérale en face postérieure. Elles participent de la découpe du muscle brachial et donc à cet endroit également de la désarticulation de l’épaule. Celle du coude est quant à elle attestée sur deux extrémités proximales de diaphyses radio-ulnaires. Des marques localisées sur la tubérosité de deux radius et en face postérieure d’un troisième révèlent la découpe de la zone d’insertion du muscle biceps brachial. La mise en pièces de la raquette est aussi illustrée au niveau radio-carpal par la présence de quelques courtes stries sur les faces latérale et médiale des processus styloïdes ulnaire et radial ainsi que sur la face latérale d’un capitato-trapézoïde. Seules deux diaphyses ulnaires prouvent la décarnisation du gîte de devant par de longues stries fines et obliques (l’une des deux en compte une trentaine) issues du détachement des muscles extenseurs des doigts. L’extrémité d’une patte avant a été séparée du reste du membre puisqu’une extrémité proximale de métacarpien porte deux courtes stries profondes sur sa face médiale, juste sous la surface articulaire. Deux côtés de diaphyses métacarpiennes et une extrémité distale de face dorsale ont des stries d’écorchement. L’un de ces fragments rassemble même un groupe d’incisions provenant d’un raclage de la surface osseuse.
  • Membres postérieurs : une trentaine de courtes marques très fines et perpendiculaires ont été relevées le long de la face antérieure du pubis. Elles sont la conséquence du détachement des muscles gracile, adducteur de la cuisse et obturateur externe. Ces parties composent le tende de tranche et la tranche grasse de la cuisse (partie supérieure). Ces mêmes morceaux charnus ont été détachés le long de onze diaphyses fémorales. Toutes les faces sont striées, certaines de façon très intense (quatre comptent plus d’une vingtaine de longues stries fines et obliques). Une opération de raclage a pu être reconnue grâce à de très longues incisions superficielles et parallèles au grand axe de l’os, s’étalant le long de la face médiale. Un fémur affiche une quinzaine de courtes stries profondes et obliques sur la tubérosité supra-condylaire latérale, à l’endroit de l’insertion du muscle fléchisseur superficiel des doigts et du chef latéral du gastrocnémien. Ces deux parties appartiennent quant à elles au nerveux de gîte de la semelle. La récupération du gîte de derrière est attestée sur douze diaphyses tibiales par des stries de découpe en lanière et par de courtes incisions placées au niveau des zones d’insertion. Une épiphyse distale de tibia et trois morceaux diaphysaires distaux affichent des marques de la désarticulation tibio-tarsale réparties sur toute leur circonférence. Un talus et un grand cunéiforme présentent chacun deux courtes stries fines profondes et perpendiculaires à l’axe du membre, pouvant également illustrer cette mise en pièces mais aussi l’écorchement des extrémités. De même, une épiphyse proximale de métatarsien portant cinq marques sur sa face latérale, juste sous la surface articulaire, peut témoigner du dépouillement, comme de la désarticulation des canons ou de la découpe des tendons. Par contre, six phalanges et six diaphyses métatarsiennes attestent indubitablement de la récupération des peaux de daim.

Les diaphyses d’humérus, de fémurs et de tibias de daim sont les parties les plus marquées par les hommes. Elles sont suivies ensuite dans l’ordre par les radius, les côtes, les tarsiens, les coxaux, les phalanges, les métapodes, les carpiens, les vertèbres thoraciques, les mandibules, puis enfin par les crânes, les scapulas et les vertèbres lombaires.

Un peu moins d’un tiers (32,4 %) des ossements de chevreuil de la couche u portent des traces d’outils, ce qui représentent 23 restes (tab. 258). Le squelette axial est assez bien documenté puisqu’il renferme un axis avec cinq courtes stries sous l’une des expansions latérales de la surface articulaire crâniale, révélant la désarticulation du cou, trois vertèbres présentant des marques sur les faces latérales des processus épineux, deux thoraciques victimes du décharnement des milieux de train-de-côtes (muscle semi-tendineux du thorax), et une lombaire de la récupération des filets, et enfin deux fragments de corps costal comprenant plus d’une dizaine de stries sur leurs faces interne et externe, qui nous ont permis de mettre en évidence le décharnement de l’abdomen et l’éviscération. Le désossement de l’épaule est attesté sur une surface striée de fosse infra-épineuse ainsi que sur deux fragments antérieur et postérieur de diaphyses humérales. Pour le dépeçage de cette partie, des marques situées en face médiale d’une scapula, juste sous la cavité glénoïde, et d’autres localisées au-dessus de la fosse olécrânienne d’un humérus et sous la surface articulaire proximale d’un radius en face antérieure, illustrent la désarticulation scapulo-humérale pour les premières et celle du coude pour les dernières. Nous avons pu dénombrer plus d’une quinzaine de stries sur les faces médiales de deux diaphyses radio-ulnaires. Ces marques sont celles de la découpe des muscles brachial, fléchisseur profond des doigts et rond pronateur appartenant pour le premier encore à la macreuse à braiser et pour les autres au gîte de devant ou jarret. En ce qui concerne les quartiers arrière, le chevreuil compte trois coxaux témoignant du détachement des muscles de l’araignée insérés sur la face interne (obturateur externe et iliaque), et un autre témoignant de la désarticulation coxo-fémorale par la découpe du muscle droit de la cuisse inséré dans la partie supérieure de l’acetabulum. Deux diaphyses fémorales rassemblant plus d’une vingtaine d’incisions chacune ont subi le décharnement et le raclage de leurs faces médiale et postérieure. Et enfin, de nombreuses marques longues et obliques ont été recensées le long de deux bords latéraux et d’une arête médiale de trois diaphyses tibiales. Aucun ossement n’indique de dépouillement.

Toujours dans cette couche profonde, un fémur de bouquetin a livré de courtes stries perpendiculaires situées le long de l’arête latérale de la tubérosité supra-condylaire médiale. Ces stries traduisent la découpe du chef médial du muscle gastrocnémien appartenant au nerveux de gîte. Un fragment osseux identique de mégacéros montre également deux longues incisions le long de cette tubérosité.

Une des caractéristiques principale de Saint-Marcel est l’exploitation intensive des carcasses animales, et ce pour tous les animaux rapportés à l’abri, avec toutefois une modération observée dans les traces de consommation laissées sur les squelettes de daim de la couche u. Malgré la pauvreté en extrémités d’os longs, biais très important dans l’analyse des marques de boucherie, celle-ci nous a néanmoins permis de mettre en évidence toutes les étapes du traitement des carcasses : éviscération, dépeçage, désarticulation, découpe de la viande et préparation des plans de fracture.

Dans l’ensemble F de PAYRE, nous étudierons la répartition des marques de boucherie sur les carcasses pour chacun des herbivores présents au sein des niveaux Fa, Fb et Fc-d (tab. 253, cf. tab. 123). La présence plus importante des épiphyses dans cet assemblage a rendu l’étude des procédés de mise en pièces des carcasses plus aisée.

Dans le niveau Fa, 16,7 % des restes observables de cerfs (24 crâniens et 395 post-crâniens) ont été marqués par les hommes, ce qui donne un nombre d’ossements striés équivalant à 70 (tab. 259). Il s’agit exclusivement de segments provenant du squelette post-crânien.

  • Squelette axial  : le tronc rassemble seulement trois os striés. Une vertèbre cervicale compte une longue strie à la base de son processus épineux qui trahit le décharnement du collier. Une vingtaine de stries obliques très fines et de taille moyenne ont été relevées sur les deux faces d’une épine de vertèbre thoracique. Elles indiquent la décarnisation des muscles épineux et transversaire épineux du thorax, qui correspondent en boucherie à la partie charnue de l’entrecôte (milieu de train-de-côtes). Une côte affectée d’une vingtaine de courtes marques fines et obliques le long de sa face externe met quant à elle en évidence le décharnement des muscles dentelé ventral et oblique externe de l’abdomen correspondant aux plats de côtes.
  • Membres antérieurs : trois cavités glénoïdes de scapula sont cernées de courtes stries situées sous la surface articulaire et sur le tubercule supraglénoïdal. Elles correspondent à la désarticulation de l’épaule. Celle-ci est associée à celle du coude, illustrée par des marques relevées sur les épicondyles latéraux et en face médiale de la trochlée de quatre humérus (photo 109) ainsi que sur la face médiale de deux olécrânes. La mise en pièces de la raquette continue avec de courtes marques situées sur un processus styloïde ulnaire, sur les faces antérieures de deux pyramidaux, sur celles antérieure et postérieure de deux capitato-trapézoïdes et autour de la surface articulaire proximale de trois métacarpiens. Elles mettent en évidence le détachement du carpe, la découpe des tendons et des ligaments ou l’écorchement. Le quartier avant a aussi connu une décarnisation dont les témoins sont les longues marques obliques, issues de la découpe en lanière, retrouvées le long de trois diaphyses humérales et de quatre radio-ulnaires. La récupération des peaux, déjà en partie observée par la présence d’une quinzaine de stries courtes et moyennes très fines, obliques et perpendiculaires, réparties sur les trois épiphyses proximales de métacarpiens, est confirmée par de nombreuses marques situées le long des gouttières dorsales et sur les côtés des diaphyses.
  • Membres postérieurs : un coxal strié sous l’acetabulum illustre la désarticulation coxo-fémorale, et quatre autres illustrent le détachement des muscles obturateur externe, iliaque et fessier profond composant la partie supérieure charnue de la cuisse. Trois diaphyses fémorales présentent des incisions sur leur face postérieure, de part et d’autre de la fosse supra-condylaire, et le long de la ligne âpre. Ces stries se situent dans les zones d’insertions multiples des muscles vaste intermédiaire, gastrocnémiens, adducteur de la cuisse et pectiné. Ces parties appartiennent à la tranche grasse de la cuisse. Le décharnement d’une partie du gîte de derrière (muscle fléchisseur latéral des doigts) est attesté sur six fragments latéraux de diaphyses tibiales par plusieurs dizaines de marques courtes ou longues et perpendiculaires ou obliques. Deux épiphyses distales de tibia ont été témoins de la séparation du tarse et/ou de la découpe des tendons. Les incisions courtes et profondes sont localisées au niveau de la malléole médiale. Dans la continuité de cette opération, nous avons pu relever des stries sur l’angle médio-antérieur de deux cubo-naviculaires (photo 110). Deux calcanéums portent également des marques de la désarticulation ou du moins du sectionnement des tendons et des ligaments sur leur bord antérieur et leur face médiale. Cinq épiphyses proximales de métatarsiens striées illustrent également ces opérations ainsi que celles du dépouillement. Cette dernière a pu être aussi remarquée sur onze diaphyses métatarsiennes et quatre phalanges (une première et trois deuxièmes).

En ce qui concerne la répartition des marques sur le squelette, les diaphyses tibiales, humérales et radio-ulnaires sont striées pour plus de la moitié de leurs restes. Viennent ensuite les scapulas, et les épiphyses distales des tibias et proximales des métatarsiens, qui sont marquées pour plus du tiers. Les coxaux, les thoraciques ainsi que les diaphyses fémorales et métapodiennes montrent des traces d’exploitation sur un peu moins du tiers de leurs ossements. Enfin, le nombre de restes affectés par les opérations bouchères des os courts, des épiphyses proximales des radius et des métacarpiens, des côtes, des vertèbres cervicales et des phalanges, se rapproche de 15 %.

Un peu moins du quart (24,6 %) des ossements observables de grands Bovidés du niveau Fa ont été affectés par des outils (tab. 259). Comme chez le cerf, le crâne ne porte aucune strie de boucherie.

  • Squelette axial : cette partie a été largement exploitée. La désarticulation du cou est illustrée par deux stries présentes entre deux processus articulaires d’une vertèbre cervicale, tandis que le détachement des filets et des parties charnues supérieures du milieu de train-de-côtes est attesté par plus d’une trentaine de stries réparties sur les processus épineux et les faces ventrales de deux lombaires (photo 111) et de trois thoraciques. Cinq faces externes de corps costal médial sont recouvertes d’une bonne vingtaine de fines marques assez longues et multidirectionnelles, qui découlent du décharnement de l’abdomen.
  • Membres antérieurs : un fragment de fosse subscapulaire compte une dizaine de longues stries obliques trahissant le décharnement du muscle plat du même nom appartenant au dessous de macreuse ou dessous de palette. Toujours en ce qui concerne le désossement de l’épaule, un humérus livre une dizaine de stries obliques de taille moyenne situées de part et d’autre de la tubérosité du grand rond. Une extrémité proximale de face postérieure d’un autre humérus affiche trois courtes stries profondes et perpendiculaires juste sous la surface articulaire. Elles correspondent au détachement du muscle brachial effectué au cours de la désarticulation scapulo-humérale. Celle du coude est quant à elle illustrée par une dizaine de marques assez longues et obliques présentes sur la face latérale d’un olécrâne et par une vingtaine d’autres localisées tout autour de l’extrémité proximale de trois diaphyses de radius. Ces marques participent également des processus de décarnisation par la découpe des insertions des muscles ancôné pour l’olécrâne et biceps brachial et extenseur du doigt latéral pour le radius. Enfin, pour terminer les opérations de mise en pièces des membres avant, un processus styloïde ulnaire traduit ici une fois encore le détachement du carpe. Un os pyramidal profondément incisé sur sa face dorso-latérale confirme cette étape. Le dépouillement des extrémités a été effectué au moins sur un animal, puisqu’une gouttière dorsale de métacarpien rassemble trois courtes stries profondes et perpendiculaires sur son arête.
  • Membres postérieurs : deux longues stries obliques et profondes observées sur la face interne d’un coxal au niveau de la grande échancrure sciatique trahit le détachement du muscle iliaque, tandis qu’une quinzaine d’autres plus superficielles sur l’ischium trahissent celui des muscles obturateur externe et adducteur de la cuisse. Ils correspondent respectivement à l’araignée et au tende à rôtir. Le rumsteck (muscle transversaire épineux) a quant à lui été récupéré le long d’une face postérieure d’un sacrum. Deux faces médiales de diaphyses fémorales rassemblent plus d’une cinquantaine de longues stries très fines et obliques typiques de la découpe en lanières du muscle vaste intermédiaire composant le mouvant. Un autre fragment compte en revanche des marques plus courtes et perpendiculaires situées le long de la ligne âpre et traduisant le sectionnement de nombreuses insertions musculaires faisant écho pour l’adducteur à la découpe observée sur le coxal. La récupération des chairs du gîte de derrière a été mise en évidence par deux fragments striés de face postérieure de diaphyses tibiales. Les marques sont ici celles de la découpe des muscles fléchisseurs médial et latéral et du poplité. Deux faces médiales de talus comptent respectivement six et quinze courtes stries obliques qui peuvent être la conséquence de la mise en pièces, de la découpe des tendons, ou du dépouillement (photo 112). Ces trois opérations doivent du reste s’avérer concomitantes au cours du traitement des carcasses. Cinq longues marques fines et obliques remarquées le long de la gouttière dorsale d’un métatarsien et cinq autres plus courtes présentes sur la face axiale d’une première phalange signalent la récupération des peaux.

Plus de la moitié des côtes, radio-ulnas et diaphyses fémorales et tibiales des Bovinés rapportés à la grotte portent des marques d’une exploitation humaine. Celle des quartiers arrière, richement illustrée, est confirmée par les taux importants de coxaux et de lombaires marqués (40 %), alors qu’environ le tiers des restes de l’épaule le sont, ce qui inclut les scapulas, les humérus et les radius proximaux. Le quart des diaphyses de métacarpiens et le tiers de celles de métatarsiens sont incisées. Entre 20 et 30 % des vertèbres cervicales, thoraciques et des os courts sont marquées. Les phalanges le sont très peu, seules 7 % dénotent des traces de dépouillement. Enfin, la plupart des épiphyses d’os longs, pourtant plus présentes que dans les autres assemblages, sont dénuées de marques de dépeçage, ce qui trahit peut-être une moindre part de cette étape dans le traitement des carcasses à l’habitat. La décarnisation est de loin l’opération la plus observée sur les ossements.

De taille similaire à ceux des grands Bovidés, les ossements de chevaux de ce niveau ont été pourtant moins marqués par les hommes. 17,2 % de leurs NRDtobs le sont, ce qui représente seulement 16 restes (tab. 259). Une face médiale de branche montante d’hémi-mandibule comprenant cinq stries obliques de taille moyenne témoigne de l’enlèvement du muscle ptérygoïdien médial. Ce dernier fait partie des muscles masticateurs et traduit ici le décharnement de ce muscle épais sans doute afin de faciliter à terme la désarticulation de la mandibule. Deux groupes de marques présentes en face postérieure d’un humérus, au niveau de l’étendue des muscles anconé et sur celle du triceps brachial (chef médial) trahissent la décarnisation et le dépeçage du coude. Cette dernière étape est également signalée sur un olécrâne ainsi que sur une épiphyse proximale de radius. Deux longues stries obliques s’étalant le long de la face antérieure d’une diaphyse radio-ulnaire ont pu mettre en évidence la décarnisation du gîte de devant. Une face antérieure de capitatum avec quatre incisions perpendiculaires au grand axe du membre indique le dépouillement ou la section des tendons. A nouveau, quatre marques ambiguës placées du côté latéral de la face palmaire d’un métacarpien, dans sa partie proximale, peuvent provenir d’un dépouillement comme d’une mise en pièces ou d’une ablation des tendons. Par contre deux autres placées sur le côté de la diaphyse marquent l’écorchement d’une bête. La mise en pièces des quartiers arrière et plus précisément la désarticulation coxo-fémorale est attestée par des marques localisées sous l’acetabulum de deux fragments d’ischiums. L’un de ces restes compte également des marques plus longues et réparties de façon plus vaste provenant du décharnement de cette zone. Des incisions placées sur le troisième trochanter d’un fémur révèlent la récupération des muscles fessier superficiel (cœur de rumsteck) et vaste latéral (plat). La désarticulation du genou est illustrée par huit stries placées juste sous la surface articulaire en face postérieure d’un tibia. Deux autres morceaux de cet os comptent des traces de décarnisation sur leur bord antérieur, à l’endroit de l’insertion du semi-tendineux, et en face postérieure, au niveau de la zone du fléchisseur latéral du doigt. Une quinzaine de longues incisions effectuées le long de la face dorsale d’un métatarsien trahissent le dépouillement puis le raclage de ces extrémités, tandis qu’une face antérieure de première phalange avec deux courtes stries profondes et perpendiculaires confirme seulement la première étape de cette opération.

Mis à part les épiphyses proximales radio-ulnaire et métacarpienne, comme pour les grands Bovidés, la plupart des quelques articulations d’os longs représentées ne montrent pas les stigmates de la mise en pièces des membres. Bien qu’il soit possible que la masse charnue présente au niveau des intersections ligamenteuses chez ces grands herbivores ait en partie protégé les surfaces osseuses, le déficit des stries au niveau des zones articulaires soutient a priori l’hypothèse d’un moindre dépeçage. Le tronc et les omoplates sont dépourvus d’indices de boucherie, tandis que les deux seuls restes de bassin sont striés. Les diaphyses de tous les os longs témoignent abondamment de leur traitement par les chasseurs.

Pour les espèces plus rares (tab. 253), seulement 7 % des 71 NRDtobs de chevreuil, soit cinq restes, sont striés. Ils nous informent du dépouillement par la présence d’une strie sur la face abaxiale d’une première phalange, de la désarticulation du tarse grâce à cinq courtes marques situées sous la trochlée proximale en face latérale d’un talus, et de la décarnisation par une dizaine d’incisions assez longues, fines et obliques, réparties le long d’une face antérieure d’un radius et sur deux coxaux.

15,2 % des 33 ossements lisibles de Rhinocérotidés, soit cinq restes, portent des marques d’outils. Ces restes sont une extrémité distale de radius, deux côtes, une première phalange de troisième doigt et un calcanéum. Ces deux derniers appartiennent à des individus juvéniles. Le radius affiche sur le bord latéral de son épiphyse distale quatre courtes stries très fines, peu profondes et obliques, témoignant de la découpe d’une zone d’insertion musculaire afin de séparer le carpe de cet os ou tout simplement de détacher un muscle au cours du désossement. Les deux côtes sont deux segments de corps costal montrant sur leurs faces externes plus d’une quinzaine d’incisions, longues, obliques, et assez profondes chacune. Elles révèlent le décharnement du thorax et de l’abdomen (photo 113). La phalange présente une seule strie profonde sur un des côtés de sa diaphyse et le calcanéum une dizaine de courtes stries fines et peu profondes localisées sur les bords plantaire et médial. Le traitement des extrémités pour la désarticulation ou la récupération des tendons est donc attesté.

8,1 % des 37 ossements de tahrs ont été affectés par les hommes, ce qui représente 3 restes. Il s’agit exclusivement de marques jouxtant les articulations, celle du coude sur un humérus distal et un radius proximal et celle du carpe sur la face antérieure d’un scaphoïde.

Deux os de daim sur 14 témoignent d’opérations bouchères telles que la désarticulation coxo-fémorale (par trois courtes stries situées sur la face médiale d’une tête fémorale) ou la désarticulation du tarse (par une dizaine de marques courtes, profondes et épaisses circonscrites à l’extrémité distale de la face médiale d’un talus).

Enfin, trois stries profondes et très fines ont pu être observées sur le côté de la diaphyse d’une première phalange de mégacéros. Ces marques sont celles de l’écorchement. Cette espèce compte seulement trois restes observables dans ce niveau.

Dans le niveau Fb, moins riche (tab. 253), les cerfs rassemblent onze ossements striés sur 57 NRDtobs, ce qui équivaut à un taux moins significatifs de 19,3 %. Parmi eux nous avons pu dénombrer deux hémi-mandibules, qui ont été les témoins de la désarticulation d’avec le crâne et de la décarnisation de la joue, avec des stries respectivement placées au niveau d’une incisure mandibulaire et sur la face externe d’une branche horizontale. Le décharnement du tronc est illustré par des marques recensées sur les épines dorsales d’une vertèbre thoracique et d’une lombaire et sur la face externe d’un corps costal. Celui des membres arrière l’est par une trentaine d’incisions qui s’étalent le long du bord antérieur d’un tibia et par six autres plus longues observées sur une face médiale d’un autre fragment du même os. Le désossement de l’épaule et sa désarticulation sont attestés par deux cavités glénoïdes cernées de courtes marques et par une extrémité distale d’humérus comptant des traces de boucherie sur ses épicondyles latéral et médial. Enfin, trois fines stries obliques localisées à l’extrémité proximale d’une face médiale de métacarpien trahissent le dépouillement ou la découpe des tendons. Seuls deux restes de Bovinés portent des traces d’action humaine. Il s’agit de deux fragments diaphysaires de tibia (photo 114) et de fémur couverts d’une dizaine de longues stries obliques indiquant la découpe de leurs chairs en lanières, celles insérées sur la face postérieure pour le premier (muscles poplité et fléchisseurs des doigts) et sur la face médiale pour le second (muscle vaste intermédiaire). Le même nombre d’os affectés a été relevé pour les chevaux. Une branche horizontale d’hémi-mandibule présente deux longues stries fines et obliques sur sa face vestibulaire, correspondant à l’enlèvement de la lèvre inférieure, et une deuxième phalange compte deux courtes stries sur le côté de sa diaphyse, juste au-dessus de la surface articulaire. Ces deux restes peuvent être les indices de l’écorchement d’un animal. Une vertèbre thoracique de tahr rassemble une dizaine de stries fines et obliques sur les deux faces de son processus épineux. Le décharnement de cette partie du tronc a donc été réalisé par les hommes. Comme dans le niveau a, une première phalange non épiphysée de jeune rhinocéros présente des traces d’exploitation bouchère. Celles-ci consistent en six fines marques courtes et profondes relevées sur la face antérieure de cet os.

Dans les niveaux profonds Fc-d, les ossements striés de cerf sont proportionnellement encore plus nombreux que dans les deux ensembles sus-jacents, atteignant un taux de 22,5 %. Ce qui donne, pour 160 restes observables, 36 éléments répartis au sein du squelette de la façon suivante (tab. 260) :

  • Crâne : un segment de voûte crânienne incisé illustre l’écorchement, tandis qu’une branche montante et une branche horizontale de deux hémi-mandibules témoignent de l’enlèvement du muscle masséter et de la lèvre inférieure.
  • Squelette axial : deux extrémités distales de corps costal avec quelques stries fines obliques et de taille moyenne indiquent le décharnement du muscle oblique externe de l’abdomen correspondant au plat de côte couvert du carapaçon. Deux vertèbres lombaires affichant des marques sur les deux faces de leurs processus transverses montrent le détachement des muscles des filets : grand psoas, carré et intertransversaire des lombes.
  • Membres antérieurs : le désossement de l’épaule est très bien documenté par des dizaines de longues stries obliques et parallèles présentes dans les fosses subscapulaire, infra et supra épineuses de deux omoplates, découlant de l’enlèvement des muscles du même nom appartenant à la partie supérieure de la raquette, respectivement au dessous de macreuse, à la macreuse gélatineuse, et au jumeau à biftecks. L’humérus a aussi subi cette étape de la décarnisation puisque l’on observe sur quatre fragments des marques de détachement du muscle coraco-brachial situées en arrière de la tubérosité du grand rond, de l’extenseur radial du carpe le long de l’épicondyle latéral, et du brachio-céphalique et du pectoral descendant en face antérieure juste au-dessus de la fosse coronoïdienne. Ces viandes sont celles des jumeaux nerveux et de la macreuse à braiser. Aucune diaphyse radio-ulnaire ne montre d’indice d’exploitation de la partie inférieure de la raquette ou gîte de devant (jarret). La mise en pièces de cette partie est signifiée par une courte strie profonde présente sous la surface articulaire d’un radius en face antérieure et par quelques autres plus nombreuses circonscrites au pourtour de la diaphyse distale de trois humérus. Le traitement du membre antérieur se termine par une dizaine de longues marques fines, profondes et parallèles au grand axe d’un métacarpien qui proviennent du dépouillement et du raclage des extrémités.
  • Membres postérieurs : les quartiers arrière présentent des taux plus important d’ossements traités par l’homme que ceux de l’avant. La récupération du muscle glutéo-biceps composant l’aiguillette de rumsteck a laissé quatre longues traces sur la face latérale d’un ischium et la désarticulation coxo-fémorale a laissé deux marques sur le bord inférieur d’un acetabulum. La partie de la cuisse appelée mouvant, correspondant au muscle vaste intermédiaire, a été détachée le long des faces médiale et latérale d’un fragment de diaphyse fémorale. Le muscle fléchisseur latéral des doigts du gîte de derrière a été récupéré sur deux tibias. Une trentaine de marques sont équitablement réparties le long d’un bord latéral et d’une face postérieure dans sa partie distale. Deux autres de ces os portent à leurs deux extrémités des indices du dépeçage des membres postérieurs au niveau du genou et du tarse. Un talus, un calcanéum et un grand cunéiforme confirment cette étape par la présence respective d’une quinzaine d’incisions en face médiale de la trochlée proximale et d’une dizaine de courtes marques sur le bord antérieur du second, comme sur la face dorso-médiale du dernier. Le dépouillement est très largement observé puisque l’on recense six métatarsiens et quatre phalanges portant de nombreuses stries, ce qui représente un tiers des fragments rapportés à la grotte.

19,1 % des 94 NRDtobs de Bovinés sont marqués, soit 18 ossements (tab. 260). Il s’agit pour une très large part des segments très riches du tronc. Une vertèbre cervicale présente cinq courtes incisions fines et profondes en arrière d’un processus articulaire, qui traduisent la découpe des muscles du collier lors du décharnement (complexus et longissumus) ou lors de la désarticulation du cou. Trois vertèbres thoraciques et une lombaire affichent des traces de décharnement le long de leur épine dorsale. Elles concernent la récupération des muscles épineux du thorax et transversaires épineux. Deux courtes marques ont été observées au niveau de l’angle d’une côte et quatre plus longues sur la face interne d’une autre. Les premières correspondent à la découpe du muscle élévateur des côtes qui a pu être nécessaire lors de la désarticulation du tronc ou plus simplement au cours de la décarnisation du milieu de train-de-côtes, et les secondes sont celles laissées par l’éviscération d’une bête. Deux fragments diaphysaires proximaux d’humérus comptent de longues stries fines, profondes et obliques, pour l’un réparties sur la tubérosité du grand rond et sur la face postérieure, et pour l’autre au-dessus de la tubéroisté du grand rond. Ces marques trahissent la découpe en lanières des muscles grand rond, grand dorsal, triceps, coraco-brachial et anconé appartenant au dessous de macreuse et à la macreuse à braiser. Une extrémité proximale de radius indique la désarticulation du coude par une dizaine de courtes stries situées juste sous le relief latéral d’insertion pour le muscle extenseur du doigt latéral et indique le décharnement par cinq longues marques fines et obliques s’étendant dans la partie proximale de la face antérieure. L’exploitation des quartiers arrière commence par deux marques profondes de taille moyenne situées en face interne du pubis à l’endroit de l’insertion du muscle obturateur externe (araignée). Les parties charnues de la tranche grasse du fémur, et plus précisément le mouvant (muscle vaste intermédiaire), ont été récupérées sur deux os. L’un porte une dizaine de très longues stries le long de sa face médiale et l’autre une, plus courte, sur sa face postérieure. Les muscles du gîte de derrière insérés le long de la diaphyse tibiale (semi-tendineux, fléchisseurs des doigts et poplité) ont subi une découpe sur trois segments. Enfin, l’écorchement est attesté par une première et une deuxième phalanges striées. Les diaphyses tibiales et humérales ainsi que les coxaux sont striés pour plus de la moitié de leurs restes. Viennent ensuite les parties du squelette axial puis les autres os longs. Aucun métapode, ni tarsien ou carpien ne sont marqués.

Les chevaux comptent 14,8 % de leurs 122 NRDtobs marqués, soit le même nombre que pour les Bovinés : 18 restes (tab. 260). Comme dans les autres niveaux, avec le cerf, ce sont les seules espèces qui renferment des restes crâniens avec des signes d’exploitation. Ici, il s’agit d’un fragment d’os nasal gauche présentant une quinzaine de très fines stries parallèles de taille moyenne résultant de la découpe du muscle dilatateur des narines lors de l’écorchement. Le tronc ne comprend qu’un seul fragment de deuxième côte marqué par six incisions de taille moyenne sur sa face interne. Cette partie supérieure striée du thorax correspondrait, plutôt qu’à une éviscération, à la récupération du gros bout de poitrine (deux premières sternèbres et extrémités des côtes y attenant) qui est constitué par le muscle pectoral descendant. Un humérus témoigne de deux opérations : la découpe en lanières de la branche longue du muscle coraco-brachial par une vingtaine d’incisions très fines et obliques de taille moyenne en face antérieure et la désarticulation du coude par la présence de six courtes marques perpendiculaires serrées le long du bord médial de la fosse coronoïdienne. En ce qui concerne l’articulation du coude, deux faces médiales d’olécrâne rassemblent l’une une vingtaine de courtes stries obliques découlant de la découpe des insertions des muscles fléchisseur profond du doigt (chef ulnaire) et triceps brachial (chef médial), et l’autre trois courtes stries proches de la surface articulaire correspondant à la zone d’insertion du muscle anconé. Ces deux fragments témoignent de la désarticulation et de la décarnisation du coude. Un troisième radio-ulna affiche des stries de décharnement du muscle extenseur latéral du doigt le long du bord latéral de la surface de synostose radio-ulnaire. Outre l’opération de mise en pièces du membre antérieur, le gîte de devant atteste aussi d’une exploitation de la viande. Le long du côté d’une diaphyse métacarpienne, cinq courtes marques ont été relevées. Ce sont les indices d’un dépouillement. Les quatre segments de la patte arrière ont tous fourni un fragment portant des traces de boucherie. Le coxal porte deux longues stries sous l’acetabulum en face ventrale. Elles sont placées à l’endroit de l’insertion des muscles gracile et adducteur composant le dessus de tranche et la poire. Le fémur indique la désarticulation coxo-fémorale par une marque assez profonde située juste en arrière de la fovéa capitis d’une tête fémorale. Le tibia affiche seulement une incision sur sa face postérieure au niveau de la zone d’insertion du muscle fléchisseur latéral du doigt. La désarticulation et la récupération des tendons ont laissé des traces sur trois os du tarse. Un calcanéum présente deux groupes de stries sur le bord plantaire et dans le sillon tendineux du fléchisseur latéral des doigts. Un grand cunéiforme (photo 115) et un cuboïde rassemblent une petite dizaine de marques chacun sur leur face antérieure et latérale. Le métatarsien compte sept courtes marques issues de l’écorchement sur l’un des côtés de sa diaphyse. Le dépouillement a pu également être mis en évidence sur deux métapodes indéterminés et deux premières phalanges. A l’inverse de ce que nous avons pu observer chez les Bovinés de ce niveau, le tronc ne porte aucune marque de boucherie, tandis que les métapodes et les tarsiens en sont richement pourvus. Les quartiers avant ont été proportionnellement plus atteints par les outils que ceux de l’arrière. Malgré le nombre important des restes de tibias et de fémurs, très peu ont fait l’objet d’un décharnement, ce qui est assez exceptionnel par rapport aux autres herbivores. Par curiosité, j’ai regardé si ces parties avaient plutôt été affectées par des morsures de Carnivores, or seuls deux restes également sont les témoins de l’action de ces autres prédateurs. Le dépouillement des chevaux est récurrent dans tout l’assemblage, illustré par des morceaux striés des extrémités des pattes, comme du crâne.

Les quelques ossements striés appartenant aux espèces plus rares sont ceux de Rhinocérotidés et de Proboscidiens (tab. 253). Les premiers sont riches de trois restes : une deuxième phalange de troisième doigt avec deux courtes traces profondes sur la face antérieure ; un épicondyle latéral d’humérus regroupant dix marques obliques et parallèles et le bord postérieur d’une diaphyse proximale d’ulna comptant quatre très fines stries obliques. L’exploitation des extrémités et de l’articulation du coude pour leur désarticulation ou leur décharnement est ainsi avérée sur ces pachydermes. Les deux os striés de Proboscidiens (sur les neuf observables) sont une diaphyse proximale d’ulna et un corps vertébral. Le premier regroupe une vingtaine de longues incisions fines et à directions variées réparties le long de son bord postérieur et le second sept stries plus courtes. Toutes trahissent un décharnement de ces parties par les hommes.

L’ensemble F indéterminé regroupe 18 ossements post-crâniens marqués indiquant les mêmes types d’exploitation bouchère pour les carcasses de cerfs, chevaux, Bovinés et chevreuils.

Dans tout l’assemblage, aucun reste de sanglier ni de chamois n’a fourni de marques de boucherie. Ces deux espèces d’herbivore mises à part, toutes les autres témoignent de leur traitement par les Néanderthaliens.

Dans la grotte des Barasses à BALAZUC, nous avons vu que les marques de boucherie sont extrêmement rares (chp. 4.2.1. ; tab. 125). Dans le niveau 1, le seul os strié est une extrémité proximale de radius de cerf. Il s’agit de deux fines marques obliques et de taille moyenne provenant de la désarticulation du coude et situées juste au-dessus de la tubérosité du radius (photo 116). Le niveau 2-3 est plus fourni, mais reste proportionnellement pauvre en restes striés. Sur les 17 ossements marqués de bouquetin (2 % des 863 restes observables), nous comptons douze os longs et cinq côtes (tab. 261). Les métapodes sont les plus nombreux. Ils portent le plus souvent de courtes stries situées sur les côtés des diaphyses illustrant le dépouillement de quelques animaux. Le décharnement est toutefois attesté sur les fragments diaphysaires d’un humérus, d’un fémur, de deux radio-ulnas et de deux tibias. Sur les cinq côtes, deux portent des marques d’éviscération sur leur face interne et trois celles de la désarticulation du train-de-côtes au niveau de la tête et de l’angle costal. Trois de ces restes, deux métapodes et une diaphyse radio-ulnaire affichent également des traces de morsures de Carnivore. Stries et impacts de dents n’étant pas superposés, il ne nous est pas possible de déterminer l’ordre d’apparition des prédateurs auprès de ces os.

Les onze restes striés de cerf, qui représentent tout de même 32,4 % de leurs restes, sont tous des diaphyses d’os longs. A l’exception de l’humérus qui ne compte qu’un seul reste, tous les segments des pattes, antérieures comme postérieures, sont illustrés par deux fragments marqués. Le désossement de l’épaule et de la cuisse est donc attesté par de longues stries réparties le long des diaphyses des stylopodes et zeugopodes et le dépouillement sur les quatre diaphyses métapodiennes.

Comme chez le cerf, deux diaphyses métatarsienne et métacarpienne de renne regroupant une dizaine de stries ont connu l’écorchement (photo 117). Le troisième reste est un talus qui présente quelques incisions sur ses faces antérieure et médiale. Ces dernières indiquent soit le dépouillement, soit la découpe des tendons observée au cours de la désarticulation du tarse.

Enfin, les Bovinés affichent deux longues marques fines et obliques sur la face interne d’une hémi-mandibule, issues de l’enlèvement de la langue, et d’autres de taille moyenne, profondes et obliques sur la face postérieure d’un tibia, issues de la décarnisation.

Les couches profondes 4-5-6, ont livré un calcanéum de jeune bouquetin présentant plus d’une vingtaine de courtes incisions très fines le long de son bord antérieur et de ses faces latérale et médiale (photo 118). Là aussi, des opérations de récupération des tendons et de désarticulation du tarse peuvent être évoquées.

A la BAUME FLANDIN, les taux d’ossements striés d’herbivores sont un peu plus importants qu’à Balazuc (tab. 125). Le cerf est là aussi l’animal le plus exploité par les hommes, c’est aussi le plus fréquent de l’assemblage osseux. Dans la couche 3 de la terrasse, le cerf rassemble un tiers des 24 NRDtobs, ce qui représente huit ossements. La patte avant compte deux humérus qui révèlent la désarticulation du coude par de courtes marques situées dans la partie distale de la face postérieure et sous la trochlée médiale. La patte arrière compte quant à elle deux diaphyses tibiales avec de courtes marques au niveau des zones d’insertions musculaires des muscles gracile et semi-tendineux en face médiale de la crête et du poplité en face postérieure, un calcanéum avec deux incisions issues de la désarticulation sur son processus coracoïde et deux métatarsiens objet de l’écorchement le long de leur gouttière dorsale. Une deuxième phalange striée met également en évidence la récupération des peaux. Un troisième métatarsien de cheval affiche à l’extrémité distale de sa face médiale une strie de taille moyenne perpendiculaire au grand axe de l’os provenant du dépouillement. Une face médiale de diaphyse fémorale de chevreuil a livré une vingtaine de courtes marques peu profondes et perpendiculaires issues du détachement du muscle vaste intermédiaire.

A l’intérieur de la salle, seuls les os de cerfs montrent des traces de boucherie. Ils sont d’ailleurs proportionnellement légèrement plus importants, et équivalent à presque la moitié du NRDtobs, 46,9% exactement, ce qui donne pour 32 restes un nombre de 15. Parmi eux, deux appartiennent au squelette crânien. Il s’agit de la face vestibulaire d’une branche horizontale d’hémi-mandibule (photo 119) et d’une extrémité d’andouiller incisée d’une dizaine de courtes marques, indiquant pour la première l’écorchement et l’enlèvement de la lèvre inférieure et pour la seconde un traitement des bois, déjà observé aux Peyrards (cf. supra et chp. 5.2.2.). Neuf diaphyses d’os longs (dont sept de tibias et deux de fémur et d’humérus) ont subi un décharnement : découpes en lanières et sectionnement des insertions musculaires. Trois diaphyses métacarpiennes et une métatarsienne ont livré des marques du dépouillement, parfois courtes et perpendiculaires, parfois longues, superficielles et parallèles illustrant le raclage.

A l’abri du MARAS, les marques d’outils sont très fréquemment observées sur les ossements d’herbivores, ceci à l’inverse des traces de Carnivores qui restent exceptionnelles (tab. 124 et 125). En ce qui concerne le renne, abondant dans le niveau 1 et l’ensemble supérieur, il compte respectivement 17,6 % et 31,7 % de restes striés (tab. 125). Par contre, aucun des quatre os observables de l’ensemble inférieur n’en a livré. Pour les 17 et 82 restes déterminés observables (lisibles) de rennes présents dans les deux premiers échantillons, nous avons donc dénombré respectivement 3 et 26 restes portant des marques de boucherie. Deux diaphyses striées de métacarpien et une de radio-ulna trahissent des opérations d’écorchement et de décarnisation du membre antérieur dans le niveau 1.

L’ensemble supérieur montre des étapes plus diverses (tab. 261). Le dépouillement du crâne et la décarnisation de la joue ont pu être observés sur deux fragments de faces vestibulaires d’hémi-mandibules striées. L’exploitation bouchère du membre antérieur est seulement illustrée par de courtes marques profondes de désarticulation du coude localisées dans la partie distale d’une face médiale d’humérus droit et dans la partie proximale d’un bord médial de radius droit, au-dessus de la tubérosité. Ces stries dénotent peut-être une opération effectuée sur des os d’une même patte. Le membre postérieur strié est proportionnellement plus riche. Trois diaphyses fémorales comptent plus d’une dizaine de longues marques de découpe en lanières du muscle vaste intermédiaire (mouvant) réparties le long du bord antérieur et en face médiale. Une tête de fémur juvénile a livré une dizaine de petites incisions transversales profondes juxtaposées à la fovéa capitis qui dénotent la désarticulation coxo-fémorale. Deux courtes incisions ont été relevées sur la face médiale de la crête d’un tibia, elles ont été laissées lors du détachement du muscle semi-tendineux. Trois tarsiens droits, un grand cunéiforme, un cubo-naviculaire et un calcanéum, montrent des marques de désarticulation, du sectionnement des tendons et du dépouillement. Le grand cunéiforme a l’une de ses stries en continuité avec une autre strie présente sur la face médiale d’une extrémité proximale d’un métatarsien droit (photo 120). Cette observation permet de limiter l’impact des déplacements post-dépositionnels au sein de la séquence. Le cubo-naviculaire a été également marqué sur sa face médiale. Peut-être ces trois os sont-ils, comme nous l’avons déjà suggéré pour le membre antérieur, le reflet d’un même geste humain. Raclage et écorchement des extrémités de pattes arrière sont les opérations qui ont laissé le plus de traces. 14 métatarsiens en ont subi les conséquences.

Après les rennes, les chevaux sont les animaux qui rassemblent le plus d’ossements exploités par l’homme (13 en tout), et ce dans les trois ensembles (tab. 125). Dans le niveau 1, une hémi-mandibule comporte une marque de décarnisation de la joue, une diaphyse fémorale est marquée d’une centaine de stries de toutes tailles et de toutes morphologies, réparties le long du bord antérieur (le périoste a été entièrement raclé ; photo 121) et une diaphyse radio-ulnaire a quelques vingt longues incisions obliques sur sa face antérieure, qui proviennent aussi d’opérations de désossement. Dans l’ensemble supérieur, nous avons pu observer le décharnement d’une côte, de deux fémurs et de trois radius, et dans l’ensemble inférieur, celui d’un fémur, d’un tibia et d’un radius. Ce dernier ensemble renferme également une extrémité proximale de métatarsien avec des stries de dépouillement ou de désarticulation.

L’enlèvement de la langue d’un grand Bovidé est attesté par une quinzaine de stries sur une face linguale d’hémi-mandibule au niveau de la troisième molaire. Les trois autres os marqués de ces grands herbivores issus de l’ensemble supérieur sont des os longs des membres postérieurs : un fémur et deux tibias présentent des marques de décarnisation sur leur diaphyse.

Enfin, le niveau 1 renferme deux diaphyses tibiales de cerf incisées le long de leur bord latéral, et l’ensemble inférieur livre une extrémité proximale de face antérieure de fémur avec cinq longues stries superficielles et parallèles provenant d’un raclage.

A l’abri des PECHEURS , les cinq restes d’herbivores portant des traces de boucherie sont quatre os de bouquetin et un de cerf (tab. 125). Les premiers affichent des marques de décharnement sur les faces antérieure et latérale de deux diaphyses fémorales (photo 122) et le long de deux bords antérieurs de côte. Le reste de cerf correspond à un olécrâne avec trois courtes stries situées au niveau du processus anconé provenant de la désraticulation du coude.

A la grotte du FIGUIER , deux hémi-mandibules de renne et de cerf regroupent chacune une dizaine de fines marques obliques en face linguale témoignant de l’enlèvement de la langue (photo 123). En ce qui concerne le post-crânien, nous dénombrons un métatarsien proximal de renne avec une longue marque de dépouillement sur sa face médiale, une diaphyse tibiale de Cervidé indéterminé avec une vingtaine de marques de décarnisation et de raclage sur sa face postérieure et une partie proximale de face médiale d’humérus de cheval renfermant trois courtes marques profondes de découpe sur la tubérosité du grand rond (tab. 125).