1. 3. Mise en évidence expérimentale

Fletcher (1984) met en évidence l’existence d’une telle hiérarchie en réalisant des expériences à la fois en production et en compréhension. Dans une tâche de production, les participants lisent deux phrases constituées d’une proposition chacune et faisant référence toutes les deux à une même entité. Les participants doivent ensuite reformuler ces phrases en une seule. Si la deuxième phrase est toujours identique, la continuité référentielle est manipulée dans la première (l’entité est ou non sujet de la première proposition, une seconde entité est introduite). L’auteur analyse la forme des reprises anaphoriques, un nom, un pronom ou une anaphore zéro. Les phrases produites sont proches de celles présentées dans l’expérience de compréhension, où la seconde référence à l’entité Pete est réalisée sous la forme du zéro (36a), d’un pronom (36b), d’un pronom accentué (36c) qui ne pouvait être produit à l’écrit dans la tâche de production, et enfin un groupe nominal (36d).

(36)a. Pete had intended to go bowling with Sam last night but Ø broke his leg. (Pete avait l’intention d’aller au bowling avec Sam hier soir, mais s’est cassé la jambe)

b. Pete had intended to go bowling with Sam last night but he broke his leg. (Pete avait l’intention d’aller au bowling avec Sam hier soir, mais il s’est cassé la jambe)

c. Pete had intended to go bowling with Sam last night but HE broke his leg. (Pete avait l’intention d’aller au bowling avec Sam hier soir, mais il s’est cassé la jambe)

d. Pete had intended to go bowling with Sam last night but the guy broke his leg. (Pete avait l’intention d’aller au bowling avec Sam hier soir, mais le gars s’est cassé la jambe)

Les résultats des deux expériences mettent en évidence que l’accessibilité du référent a un effet sur la forme de l’expression référentielle employée. L’anaphore zéro, très peu marquée, est utilisée pour faire référence à une entité très accessible, alors qu’un groupe nominal fait référence à une entité moins accessible, confirmant ainsi la hiérarchie proposée par Givón (1983, 1990, 1992).

Les travaux de Givón sont intéressants et la hiérachie qu’il propose peut être retrouvée dans les modèles qui suivent. Comme le modèle de Givón, les théories de l’accessibilité, surtout la giveness hierarchy (Gundel et al., 1993, 2000) sont basées sur la distinction given-new (Clark, 1975 ; Haviland & Clark, 1974), mais la complexité des hiérarchies présentées est quelque peu augmentée.