4. 3. Propositions relatives OI

Dans l’étude de questionnaires (), les antécédents sont humains afin de pouvoir comparer à qui et auquel. Le relativiseur à qui ne peut renvoyer qu’à un antécédent animé alors que auquel peut être attaché à un antécédent quelle que soit son animation. Avant de présenter le modèle linéaire mixte obtenu pour les relatives OI ayant un antécédent animé (voir en ), c’est celui qui a été obtenu sur l’ensemble des relatives OI qui est reporté maintenant.

Dans le Tableau 17, on retrouve l’ensemble des effets fixes, effets principaux et interactions d’ordre 2 significatifs retenus pour le meilleur modèle des relatives OI. Dans les tableaux contenant les fréquences d’occurrence, les relatives introduites par auquel sont séparées, selon que leur site d’attachement est animé ou non. Cette séparation permet de discuter la distribution des relatives avec auquel selon l’animation de l’antécédent et surtout de comparer les fréquences obtenues avec à qui et auquel, quand tous les deux sont attachés à un antécédent animé (cf. ).

Tableau 17 : Coefficients et niveaux de significativité pour un modèle de l’attachement de propositions relatives non restrictives OI contenant les différents prédicteurs et leurs interactions
Effets fixes Coefficient p Significativité
(Résidu) 1,22 0,2 n. s.
Forme du relativiseur (à qui, auquel) -1,00 0,01 *
Longueur de la relative -0,23 0,01 *
Adjectif pour N1 (adjectif, pas d’adjectif) 0,64 0,002 **
Adjectif pour N2 (adjectif, pas d’adjectif) -0,47 0,01 *
Animation de N1 (animé, non-animé) -1,37 0,07 n. s.
Animation de N2 (animé, non-animé) 0,59 0,2 n. s.
Fonction syntaxique de N1 (sujet, objet direct) 1,18 0,0002 ***
Fonction syntaxique de N1 (sujet, OI et obliques) 1,32 < 0,0001 ***
Fonction syntaxique de N1 (sujet, sans fonction) 1,41 0,003 **
Longueur de la relative : Animation de N1 0,33 0,0005 ***
Longueur de la relative : Animation de N2 -0,16 0,002 **

* p < 0,05 ; ** p < 0,01 ; *** p < 0,001 ; n. s. : non significatif

On obtient un effet significatif de la Forme du relativiseur. Comme on peut le voir dans le Tableau 18, les relatives avec à qui sont attachées préférentiellement à N2 (71 %), alors que cette préférence est moindre pour les relatives avec auquel (56 %). Si ces résultats semblent contradictoires avec ce qui a pu être mis en évidence dans les Questionnaires 2 et 3, où les préférences d’attachement sont comparables selon que la relative est introduite par à qui ou auquel, c’est plutôt le modèle où seules les phrases avec un attachement à un antécédent animé sont comptabilisées qui fournit un test de l’Hypothèse 1 pour les relativiseurs à qui et auquel.

Tableau 18 : Fréquence globale d’attachements à N1 et N2 selon la forme du relativiseur (comparaison de à qui et auquel)
  Attachement à N1 Attachement à N2  
F. relativiseur Nb. % Nb. % Total
À qui 20 29 49 71 69
Auquel (antécédent animé) 43 31 95 69 138
Auquel (antécédent non-animé) 201 48 218 52 419
Total 264 42 362 58 626

F. relativiseur : forme du relativiseur ; Nb. : nombre d’occurrences

Il y a aussi un effet de la Longueur de la relative (regroupée en trois catégories dans le Tableau 19) : plus la relative est longue, plus il y a d’attachement à N1 (longue : 47 % ; moyenne : 40 % ; courte : 39 %, d’après les fréquences totales). Ce résultat est en conformité avec ce que prédit Fodor (1998) : une relative longue est attachée de façon préférentielle à un constituant de taille comparable.

Tableau 19 : Fréquence globale d’attachements à N1 et N2 selon la longueur de la proposition relative (comparaison de à qui et auquel)
  Longueur de la relative  
  Courte Moyenne Longue  
N1 Att. N1 Att. N2 Att. N1 Att. N2 Att. N1 Att. N2 Total
À qui 0 2 8 22 12 25 69
Auquel (antécédent animé) 5 23 18 39 20 33 138
Auquel (antécédent non-animé) 52 64 84 103 65 51 419
Total 57 89 110 164 97 109 626

Le pourcentage d’attachements est indiqué entre parenthèses ; F. relativiseur : forme du relativiseur ; Att. : attachement

La présence d’un adjectif pour N1 et N2 est un prédicteur significatif du modèle (Tableau 17), comme on peut aussi le voir dans le Tableau 20 qui présente les fréquences d’occurrence des relatives en fonction de la modification des antécédents.

Tableau 20 : Fréquence globale d’attachements à N1 et N2 selon la présence ou l’absence d’un adjectif (comparaison entre à qui et auquel)
    N2  
    Adjectif Sans adjectif  
F. relativiseur N1 Att. N1 Att. N2 Att. N1 Att. N2 Total
À qui Adjectif 2 (20) 4 (40) 1 (10) 3 (30) 10
Sans adjectif 7 (12) 17 (29) 10 (17) 25 (42) 59
Auquel (antécédent animé) Adjectif 7 (20) 9 (26) 9 (26) 10 (29) 35
Sans adjectif 8 (8) 33 (32) 19 (18) 43 (42) 103
Auquel (antécédent non-animé) Adjectif 24 (21) 17 (15) 45 (39) 28 (25) 114
Sans adjectif 46 (15) 87 (29) 86 (28) 86 (28) 305
  Total 94 (15) 167 (27) 175 (28) 195 (31) 626

Le pourcentage d’attachements est indiqué entre parenthèses ; F. relativiseur : forme du relativiseur ; Att. : attachement

De façon générale, pour une relative OI, il y a plus d’attachements à N2 si N1 est non modifié (62 %) que modifié (45 %), mais aussi quand N2 est modifié (64 %, non modifié : 53 %). Comme pour les relatives sujet et le modèle global, ces résultats infirment l’hypothèse de la modifiabilité (Thornton et al., 1999), favorisant celle de Colonna (2001). Qu’un antécédent soit le site d’attachement préféré quand il est modifié contredit aussi l’Hypothèse 2b qui proposait qu’un GN sans modifieur se situerait plus haut dans la hiérarchie d’accessibilité (Ariel, 1990, 2001 ; Gundel et al., 1993) qu’un GN avec modifieur et qu’il devrait donc être le site d’attachement préféré.

La Fonction syntaxique de N1 est aussi un bon prédicteur, la fonction sujet (68 % des attachements à N1) se détache significativement des fonctions objet direct (38 %), OI et obliques (37 %) et des cas où N1 ne remplit pas de fonction syntaxique (47 %). Ces résultats sont reportés dans le Tableau 21.

Tableau 21 : Fréquence globale d’attachements à N1 et N2 pour des propositions relatives introduites par à qui et auquel, en fonction de la fonction syntaxique de N1
  Fonction syntaxique de N1  
  Sans fonction Sujet Objet direct OI et obliques  
F. relativiseur Att. N1 Att. N2 Att. N1 Att. N2 Att. N1 Att. N2 Att. N1 Att. N2 Total
à qui 2
(3)
3
(4)
11
(16)
2
(3)
2
(3)
15
(22)
5
(7)
29
(42)
69
Auquel (antécédent animé) 5
(4)
3
(2)
13
(9)
13
(9)
4
(3)
29
(21)
21
(15)
50
(36)
138
Auquel (antécédent non-animé) 9
(2)
12
(3)
32
(8)
11
(8)
60
(14)
62
(15)
100
(24)
133
(32)
419
Total 16
(3)
18
(3)
56
(9)
26
(9)
66
(11)
106
(17)
126
(20)
212
(34)
626

Le pourcentage d’attachements est indiqué entre parenthèses ; F. relativiseur : forme du relativiseur ; Att. : attachement : OI : objet indirect

Quand N1 remplit une fonction syntaxique élevée comme la fonction sujet, il est très accessible, ce qui en fait le site d’attachement préféré. Par contre, quand il remplit une fonction syntaxique plus basse, son niveau d’accessibilité baisse et il n’est plus le site d’attachement préféré. Ce résultat est conforme à ce que prévoit l’Hypothèse 2e.

Enfin, les derniers prédicteurs du modèle sont deux interactions, entre la Longueur de la relative et l’Animation, de N1 (Tableau 22) et de N2 (Tableau 23).

Tableau 22 : Fréquence globale des attachements à N1 et N2 selon l’animation de N1 et la longueur de la relative (relatives OI)
  Longueur de la relative  
  Courte Moyenne Longue  
N1 Att. N1 Att. N2 Att. N1 Att. N2 Att. N1 Att. N2 Total
Animé 5 (5) 12 (13) 26 (28) 13 (14) 32 (34) 5 (5) 93
Non-animé 52 (10) 77 (14) 84 (16) 151 (28) 65 (12) 104 (20) 533
Total 57 (9) 89 (14) 110 (18) 164 (26) 97 (15) 109 (17) 626

Le pourcentage d’attachements est indiqué entre parenthèses ; Att. : attachement

L’interaction entre la Longueur de la relative et l’Animation de N1, révèle que lorsque N1 est animé, le pourcentage d’attachements à N1 augmente avec la longueur de la relative (courte : 29 % ; moyenne : 67 % ; longue : 86 %). Quand N1 est non-animé, par contre, la préférence d’attachement à N1 n’est pas influencée par la longueur de la relative (courte : 40 % ; moyenne : 36 % ; longue : 38 %).

Si on s’intéresse maintenant à l’interaction entre la Longueur de la relative et l’Animation de N2, cf. Tableau 23, on observe que, lorsque N2 est animé, cet antécédent est le site d’attachement préféré, et que cette préférence devient plus importante à mesure que la taille de la relative augmente (courte : 63 % ; moyenne : 69 % ; longue : 75 %). Le résultat observé quand N2 est non-animé va dans la direction opposée, puisqu’il y a moins d’attachements à N2 si la taille de la relative augmente (courte : 60 % ; moyenne : 56 % ; longue : 40 %).

Tableau 23 : Fréquence globale des attachements à N1 et N2 selon l’animation de N2 et la longueur de la relative
  Longueur de la relative  
  Courte Moyenne Longue  
N2 Att. N1 Att. N2 Att. N1 Att. N2 Att. N1 Att. N2 Total
Animé 15 (7) 25 (12) 28 (14) 61 (30) 19 (9) 58 (28) 206
Non-animé 42 (10) 64 (15) 82 (20) 103 (25) 78 (19) 51 (12) 420
Total 57 (9) 89 (14) 110 (18) 164 (26) 97 (15) 109 (17) 626

Le pourcentage d’attachements est indiqué entre parenthèses ; Att. : attachement

Aucune hypothèse n’a été formulée précédemment sur l’interaction entre l’Animation des antécédents et la Longueur de la relative. On peut considérer à partir des résultats que ces deux facteurs s’additionnent dans l’établissement du niveau d’accessibilité de l’antécédent, pour peu que l’on modifie l’hypothèse sur la relation entre la longueur de la relative et l’accessibilité de l’antécédent. Une relative longue est attachée de façon préférentielle à un antécédent très accessible, N1 (par rapport à une relative courte), mais cette préférence est d’autant plus forte que cet antécédent est accessible, quand il est animé. De façon converse, N2 n’est pas le site d’attachement préféré quand la relative est longue, et encore moins si le caractère non-animé de cet antécédent signale un faible niveau d’accessibilité.