2.2.4 Le cas du Nigeria

Le premier rapport de change entre la livre nigériane et la livre anglaise était fixe avec une parité de 1 contre 1. Par la suite, la livre nigériane s’est dépréciée de 50% par rapport à la livre anglaise. Pour atténuer l’impact des derniers soubresauts d’une zone sterling agonisante, le Nigeria introduit le "naira" parallèlement et indépendamment de la livre, c’est-à-dire que les deux monnaies avaient toutes les deux cours légale mais non convertibles l’une dans l’autre.

A l’instar des pays étudiés ci-dessus, la politique nigériane de change est marquée par trois phases distinctes.

Un essai de libéralisation entre 1986 et 1993 . Trois réformes ont lieu pendant cette période.

En septembre 1986, le gouvernement procède à une dévaluation du naira et crée un second marché de change, « The Second Tier Foreign Exchange Market, (SFEM) ». Avec ces mesures, le gouvernement espéraient voir le marché déterminé le taux de change du naira et favoriser une meilleure allocation des devises étrangères. Mais c’est l’effet inverse qui s’est produit. En effet, l’offre de devises couvrant à peine le tiers de la demande, un marché parallèle de devises s’est développé et a entraîné une dépréciation du naira. Par rapport à son taux de change de 1980 vis-à-vis du franc CFA, le naira avait perdu 82,7% de sa valeur dans le marché officiel de change et 70,4%, dans le marché parallèle, selon une étude réalisée par le Club du Sahel et l’OCDE en 2000.

A la fin de l’année 1987, le SFEM est remplacé par un marché aux enchères de devises ("The Foreign Exchange Market", FEM) qui se tient une fois toutes les deux semaines sous la supervision de la Banque centrale fédérale. Et parallèlement, les banques commerciales sont autorisées à vendre et à acheter des devises au public à des taux libres de toute contrainte. C’est le marché autonome de devises ou "Autonomous Foreign Exchange Market" (AFEM). Le gouvernement espérait, à travers ces mesures, favoriser une appréciation du naira face au dollar. Mais c’est l’effet inverse qui, à nouveau, s’est produit : l’écart entre le taux de change du marché officiel et le taux de change pratiqué dans le marché parallèle a continue à se creuser.

En janvier 1989, après une dévaluation de 30% du naira par rapport au dollar américain, le gouvernement nigérian fusionne le FEM et l’AFEM dans le but de réduire l’écart entre les taux de change pratiqués dans les deux marchés. Le nouveau marché, "the Inter Bank Exchange Market (IFEM)" qui en résulte assure des ventes aux enchères quotidiennes de devises. Enfin, pour élargir davantage l’offre de devises (et en même temps pour combattre le marché parallèle de devises), le gouvernement autorise la création de « bureaux de change », à l’image du Ghana et de la Guinée.

Malheureusement, ces efforts se sont avérés insuffisants pour améliorer la cote du naira qui, en 1993, s’échangeait à 42 unités contre 1$ US dans les « bureaux de change » et dans le marché parallèle de devises, alors que dans le marché officiel, il échangeait à 22 unités contre 1 $ US.