Retour à la libéralisation du marché de change

Instaurée pour rationner l’allocation des devises, la politique de contrôle de change s’est révélée inefficace et perverse. La chute des cours du pétrole (principale rentrée de devises du pays) en cette fin de décennie 90 fait que la Bancaire centrale n’arrive pas à satisfaire la demande de devises des opérateurs économiques. D’après l’étude du Club de sahel et de l’OCDE citée supra, rarement la Banque centrale a été en mesure de satisfaire plus de 35% des besoins en devises des opérateurs économiques. Conséquence : beaucoup d’entreprises n’arrivent pas à utiliser toute leur capacité installée, faute de pouvoir renouveler leur équipement ou de faire face aux renchérissements du coût des matières premières, conclue l’étude. Mais depuis 1999, une nouvelle réforme du marché de change est en œuvre. Elle s’inscrit dans le cadre du renforcement des efforts de stabilisation du taux de change du naira et de l’amélioration de l’efficacité d’affectation des marchés de devises (Rapport sur la ZMAO, 2005). Elle est impulsée par le retour au libéralisme économique et soutenue par la remontée du cours de pétrole.

En somme, les pays ouest africains non membres de l’UEMOA ont suivi des expériences similaires en matière de politique de change. Quand ils se sont retirés des zones monétaires coloniales, ils ont tous adopté des systèmes de contrôle des changes ; ce qui était conforme aux politiques de développement volontariste qu’ils avaient choisies. L’ouverture au libéralisme économique à laquelle ils ont été contraints à partir de la seconde moitié des années 1980 les a conduits vers des régimes de change plus souples (ou flottement administré par rapport au dollar). L’incapacité de leur système bancaire respectif à satisfaire la demande de devises des agents économiques a engendré des marchés parallèles de change que les autorités monétaires ont fini par légaliser dans l’espoir de les absorber. La multiplicité des formes d’organisation des marchés de change révèle les difficultés qu’éprouvent les Etats à trouver un régime de change approprié. Par ailleurs, l’accès aux devises continue à hypothéquer le développement économique de ces pays.

Graphique 1.3 : Evolution des taux de change nominaux des monnaies locales par rapport au dollar américain

Source : Banque Africaine de Développement.

Par exemple, une des causes de la forte dépréciation du cédi en 1994 (visible sur le graphique I.3) peut attribuer à ce phénomène. En effet, selon De Dianous (1999), le Président ghanéen, J. Rawlings, confronté aux premières élections présidentielles pluralistes abandonne les mesures d’austérité budgétaire recommandées par le FMI ; réévalue les salaires des fonctionnaires de 80%, ralentit le processus de privatisation et laisse les tensions inflationnistes se développer (de 10, 2%, l’inflation atteint 60% en 1995). De même, pour Gomez (2001), parmi les causes expliquant la détérioration du cours du naira, à partir de 1999, figure l’abandon de discipline monétaire et fiscale. Quant à la situation en Guinée, entre 1999 et 2001, elle peut être attribuée à l’effort de lutte contre les razzias que des rebelles libériens et sierra léonais faisaient sur ses villes et villages jouxtant les frontières respectives des pays d’origine de ces rebelles (une situation qui demandait l’acquisition de matériels militaires).