Chapitre 4 Contraintes budgétaires et solvabilité dans la communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest

Introduction du chapitre

Il est théoriquement admis et empiriquement vérifié que dans une union monétaire, le financement monétaire des déficits budgétaires des Etats membres doit être, sinon interdit164, au moins soumis à des règles très strictes165. Cette contrainte expose les Etats membres au risque d’insolvabilité. En effet, privés de l’instrument monétaire et contraints de recourir aux emprunts sur les marchés des capitaux pour financer leur éventuel déficit, les pays membres d’une union monétaire encourent quasiment les mêmes risques de défaut que n’importe quelle autre entreprise privée. Car, les titres qu’ils émettent sur les marchés financiers sont appréciés sur la base de leur capacité de remboursement dont les déterminants sont, entre autres, leur niveau d’endettement et le volume de leur déficit budgétaire.

L’instauration d’une union monétaire dans la communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest exigera plus de discipline budgétaire que cela n’aurait été nécessaire ailleurs. Car les possibilités de financement d’un éventuel déficit sont très réduites (les marchés financiers nationaux sont embryonnaires, l’aide financière internationale ne cesse de baisser et la capacité d’endettement des Etats sur les marchés mondiaux de capitaux est affaiblie par les niveaux de dette déjà atteints) et le manque de rigueur budgétaire est très ancré dans certains pays (or, des budgets nationaux où le déficit et la dette suivraient des trajectoires insoutenables pourraient obliger la Banque centrale régionale à assouplir sa politique).

Compte tenu de la forme d’Union monétaire prévue166, les politiques budgétaires devront rester du ressort des Etats. Ce qui va forcément leur conférer une certaine autonomie (nécessaire pour faire face aux chocs spécifiques) alors que le partage d’un taux de change commun vis-à-vis de l’extérieur et d’un solde extérieur commun fait qu’une coordination des politiques budgétaires nationales est indispensable.

Comment laisser la conduite des politiques budgétaires à l’initiative des Etats membres tout en les obligeant à s’astreindre une discipline budgétaire et les inciter à coordonner les actions budgétaires ? Telle va être la problématique du système budgétaire de la Communauté, si malgré tout la CEDEAO parvenait à réaliser son projet de monnaie unique. Ceci, non pas parce que autonomie, discipline et coordination budgétaires seraient incompatibles, mais parce que les finances publiques sont, par nature, très influençables par la conjoncture nationale et internationale.

Les idées développées dans ce chapitre sont reparties entre deux sections : la première section est consacrée à un rappel des principaux points développés dans la littérature consacrée à l’utilité de la politique budgétaire en général et dans une union monétaire en particulier. Dans la deuxième section les situations budgétaires des pays ouest-africains sont analysées de façon approfondie.

Notes
164.

Cas de l’Union économique et monétaire européenne.

165.

Cas de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et de la zone d’émission de la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC).

166.

Union monétaire par convergence concertée.