5. Athènes ville mouroir ?

En ce qui concerne les différents comportements au sein de l’espace urbain et de l’espace rural conformément à la Statistique du mouvement annuel de la population, il semble qu’en Grèce en règle générale, les villes sont plus mortifères que les villages. Notons qu’il s’agit d’un fait constaté dans d’autres pays européens 318. M. Garden et E. Bournova, en examinant les données pour le département l’Attique - Béotie (un habitat profondément dispersé, sans véritable centre urbain en dehors de la capitale et du grand port), aboutissent à la même conclusion dans leur article « La population d'Athènes et de sa région dans la seconde moitié du XIXe siècle ». Plus précisément, les dernières années de la période qu’ils étudient montrent une pression poussée et continue de la mortalité urbaine, alors que le nombre des décès semble presque stable dans les communautés rurales. Entre 1880 et 1883 ce sont 58,6% du total des décès de l’Attique - Béotie qui sont enregistrés à Athènes - Le Pirée : la triste réputation de mouroir des grandes villes gagne la Grèce alors même que la capitale garde encore une taille modeste. A partir de 1875, l’écart se creuse entre l’agglomération urbaine et les zones rurales de l’Attique et de la Béotie.

La période étudiée est donc une période de mortalité élevée tant pour la Grèce que pour sa capitale. Les conditions de vie à Athènes pendant ce demi-siècle resteront difficiles vu que les grands problèmes de la ville (manque d’égouts, approvisionnement en eau potable insuffisant et rues non pavées) ne trouveront que des solutions partielles. Comme nous le verrons cependant, le pourcentage des enfants sur le nombre total de décès qui sont enregistrés à Athènes diminue, la part des personnes âgées et la durée moyenne de vie augmente. Pour la capitale, cette période coïncide avec le début d’une amélioration, même limitée, de l’hygiène publique.

Notes
318.

Lors de la moitié du XIXe siècle en Prusse la mortalité urbaine est de 31.5‰ et la mortalité dans le milieu rural de 29.8‰. Lors de la même période en Angleterre la mortalité urbaine est de 26.9‰ et dans le milieu rural elle s’élève à 20.6‰ alors qu’à la fin du XIXe elle s’élève à 18.9‰ dans le milieu urbain et de 16.7‰ dans le milieu rural. Enfin, en France pendant la période de 1886 à 1891 la mortalité dans les villes françaises est de 24‰ et de 19,9‰ dans les campagnes. Jean-Luc Pinol, François Walter, 2007, p.107.