2.4. L’exploration active de la langue et du culturel

Les activités de formation, enfin, s’efforcent de donner aux stagiaires l’opportunité d’arpenter eux-mêmes les territoires linguistiques et culturels. Pour mieux valoriser toutes les langues , «tirer profit de la richesse des langues parlées par les élèves », « faire apparaître que certaines choses s’expriment mieux dans une langue que dans l’autre » (Knapp, 2006 : 13), il est utile que les enseignants aient connaissance d’outils existants (par exemple le Trésor des Langues mentionné plus haut, organisé pour la Journée de l’Europe), et surtout qu’eux-mêmes en aient fait l’expérience dans des activités de formation et de mutualisation, à partir de termes techniques, désuets, de mots dans une langue de vie ou dans une variété d’une des langues du groupe. Ces activités, jeux de langues, création de définitions, partage des mots préférés, ont une dimension métalinguistique. Elles mettent aussi en évidence les liens particuliers à certains mots ou expressions, dans différentes langues, et permettent d’aborder la dimension affective de la langue, la force d’évocation, le caractère à la fois très privé et universel de la langue, les notions de point de vue et de relativisme. Au plan didactique, ces activités peuvent s’inscrire dans la présentation des démarches d’éveil aux langues et de l’approche pluri-sensorielle149 ; elles favorisent la prise de conscience de l’impact de l’expérience sensible, du sensoriel et de l’affectif sur les apprentissages, sur la mémorisation. Elles permettent également, en formation, la relecture des finalités européennes : accueillir la diversité linguistique et culturelle dans sa classe est en lien avec la compréhension des enjeux de la valorisation de toutes les langues : cet objectif de l’Union européenne comme du Conseil de l’Europe ne vise pas seulement une égalité d’espace linguistique pour tous les groupes de citoyens d’ordre quantitatif, mais, pour chacun, la possibilité d’accès à la diversité de relations au monde que représentent toutes les langues de l’espace européen.

Pour privilégier la formation à l’interculturel, la formation encouragera les enseignants à délaisser l’exposition d’univers culturels juxtaposés et cloisonnés et à développer chez leurs élèves la capacité à se situer de plusieurs points de vue et à saisir les essentiels communs à différentes cultures. Les enseignants sont invités à passer

‘d’une culture au singulier favorisant une conception verticale de l’enseignement et s’adressant à une élite qui « se cultive » à une conception qui ouvre l’enseignement sur la multiplicité des regards et marque un progrès pour chaque être humain. (Semal-Lebleu, 2006 : 24).’

Les contenus culturels associés aux langues sont encore souvent transmis comme des connaissances figées et ne mettent pas en jeu de compétences interculturelles. En formation, des activités d'éveil aux cultures créent les conditions d'une découverte active et permettent d'aborder la réflexion sur les contenus culturels dans une langue cible, sur les faits et objets culturels comme expression diversifiée de valeurs partagées et de besoins universels ; sur l’arbitraire du signe, la représentation du réel, l’écart entre signifié et signifiant, lorsque les groupes de stagiaires échangent des informations sur des objets ou des évènements culturels. Ces activités sont une formation à la didactique de la langue-culture, car elles peuvent être transposées dans la classe de langue : les ateliers d’écriture lors de la découverte d’objets ou d’éléments culturels amènent à solliciter des écrits simples (niveau A1 du CECRL) dans la langue cible, à travailler les fonctions de l'écrit (de la description à la création poétique), et peuvent déboucher sur une évaluation précise et ciblée d’activités d'expression écrite articulées à des interactions orales.

Notes
149.

Le plus souvent désignée en anglais par Total Physical Response.