N2 (Phore) de N1 (Thème)

L’antéposition du phore par rapport au thème implique une sorte de hiérarchie. D’ailleurs, cette forme syntaxique, inverse de la première, valorise le phore, soit qu’il apporte une qualité, soit une précision, dans le but d’expliciter le thème. La position de N2 est alors importante, dans la mesure où elle offre à cet élément de la métaphore une priorité. Cela indique clairement que ce procédé d’inversion est révélateur de sens. Le locuteur insiste donc sur la « vertu symbolique » 113 du phore qui est attribuée au thème. Ce dernier perd toutes ses qualités essentielles pour acquérir une nouvelle dimension impliquée par N2.

L’étude de quelques cas réalisés selon cette structure métaphorique sera révélateur des effets ainsi crées :

j’entends par les soupiraux des visages sortir les hoquets

de la faim.

(«Le Progrès», Persécuté Persécuteur, p.205)

Ou :

Je suis à la roulette de mon corps et je joue sur le rouge.

(«Préface à une Mythologie Moderne», Le Paysan de Paris, p.12)

Cette permutation du thème et du phore indique également que ces métaphores déterminatives peuvent être substituées par d’autres fondées autour de la copule « être ». Ainsi, « les visages sont des soupiraux », révélateurs de la souffrance causée par la faim et « mon corps est une roulette », qu’il est impossible de deviner le sort. Toutes ces métaphores mettent en valeur le statut de l’énonciateur qui crée des associations entre des éléments variés et des affinités qui poussent les liens jusqu’à la fusion totale. Par conséquent, en se plaçant avant le thème, le phore s’impose encore plus et il acquiert une force suggestive beaucoup plus importante.

Notes
113.

H. MORIER, Dictionnaire de Poétique et de Rhétorique, Paris, PUF 1961, p.677.