Absence du motif

La figure métaphorique est « non motivée » en cas d’absence du motif, de sorte que « la relation [entre le comparé et le comparant] est non saturée », ce qui nécessite, suivant C. Fromilhague, l’intervention du récepteur et sa « compétence interprétative ». Dans cette perspective, il est invité à retrouver, pour les exprimer, « les sèmes communs composant les propriétés logiques communes au cé et ca », uniquement lorsque la figure métaphorique est inventive et créative, « particip[ant] alors d’une stratégie de l’énigme, d’un jeu montré / caché » 257 , et dans laquelle la relation entre cé et ca est une relation « originale » et « jamais achevée », où « de nouveaux sèmes peuvent toujours être découverts ». Par conséquent, nous pouvons confirmer, comme cet auteur, que « la dimension nécessairement réceptive de la recherche assure l’inventivité et la richesse symbolique de la métaphore » 258 . Nous citons à tire d’exemple :

‘Cette chevelure déployée avait la pâleur électrique des orages, l’embu d’une respiration sur le métal. Une sorte de bête lasse qui somnole en voiture.’ ‘(« Le Passage de l’Opéra », Le paysan de Paris, p.52)’

Dans cet extrait, l’auteur fait la louange d’un attribut féminin des plus représentatifs de la beauté, à savoir « la chevelure ». Toutefois, nous constatons qu’il lui accorde un nombre de caractéristiques curieuses, sans pour autant exprimer leur point commun. En tant que lecteur, nous essayerons de le saisir : il est possible que « la pâleur électrique des orages » signale la blondeur claire et pourtant lumineuse de cette crinière, alors que « l’embu d’une respiration sur le métal » insiste, à l’opposé, sur l’aspect terne de celle-ci. Par conséquent, si le poète décrit les cheveux sous le signe de l’opposition, en associant des éléments différents, nous n’avons pas pu accéder au sens développé dans la totalité de l’image. En outre, la métaphore finale est in absentia, substituant au thème « chevelure » un phore qui lui accorde un caractère animé, puisqu’elle est représentée telle « une bête lasse qui somnole en voiture », en raison de sa couleur qui rappelle celle d’un fauve, mais encore parce qu’elle est « déployée », sans manifester aucun mouvement.

Notes
257.

C. FROMILHAGUE, les figures de style, Paris, Nathan 1995, p.74.

258.

Ibidem., p.84.