2.2.3. Implication des fonctions exécutives

Partant de la définition des fonctions exécutives – processus qui se met en place pour faciliter l’adaptation du sujet à des situations nouvelles, notamment lorsque les routines d’actions, c’est-à-dire les habiletés cognitives surapprises, ne peuvent suffire – nous constatons immédiatement que la conduite fait sans cesse appel à des situations nouvelles et non routinières et donc aux fonctions exécutives. Cependant, la littérature dans le champ de la psychologie de la conduite ne fait que rarement intervenir les processus exécutifs pour décrire les fonctions cognitives impliquées. En général, on fait surtout état de l’intervention du système attentionnel, sans aller plus loin. Par exemple, Meulemans (2000), dans un chapitre d’ouvrage consacré aux processus cognitifs indispensables pour une conduite sécuritaire, discute de rôle de la perception, de la mémoire, de l’attention mais finalement assez peu des fonctions exécutives.

En revanche, c’est avec les études en neuropsychologie que l’on commence seulement à s’intéresser au risque d’accident et à la compétence de conduite des patients avec des troubles des fonctions exécutives. En effet, on trouve aujourd’hui dans la littérature un certain nombre de recherches concernant la conduite automobile et les déficits exécutifs. Ces études s’intéressent particulièrement aux patients avec lésions frontales , au vieillissement normal ou encore au vieillissement pathologique . Ces études s’accordent toutes sur le fait que des déficits exécutifs peuvent entraîner des difficultés à la reprise de la conduite lorsqu’il s’agit de patients qui ont eu un accident cérébral, ou des difficultés pour continuer à conduire, comme cela peut être le cas dans les pathologies dégénératives, telles que la maladie d’Alzheimer ou la maladie de Parkinson. Cependant, l’évaluation des fonctions exécutives se fait la plupart du temps avec des tests d’évaluation globale du fonctionnement exécutif, comme le WCST ou la Tour de Londres , et les fonctions impliquées ne sont pas clairement identifiées. Par exemple, l’équipe de Rizzo et Uc a publié un certain nombre d’études sur la conduite automobile chez des patients avec maladie d’Alzheimer, de Parkinson ou chez des patients avec traumatisme crânien grave, avec dans chaque étude une évaluation détaillée du fonctionnement cognitif . Cependant, pour leurs analyses, ils ne différencient pas les fonctions cognitives mesurées pour les mettre en rapport avec la compétence de conduite mais ils calculent un score cognitif global « cogstat » 1 utilisé pour comparer les patients et les témoins et pour le comparer à la performance en situation de conduite. Le « cogstat » rassemble des tests d’attention sélective, d’attention divisée (paradigme de double tâche), une mesure du champ visuel utile (UFOV), le test des codes de la WAIS (Wechsler Adult Intelligence Scale) ou encore le TMT A et B.

En définitive, la conduite automobile telle que nous l’avons définie implique un grand nombre de processus cognitifs simples et complexes. La section suivante présente le cadre conceptuel que nous avons retenu comme modèle de la conduite, celui de Brouwer .

Notes
1.

A partir des performances individuelles à chaque test, un score standard T est calculé (moyenne = 50, écart-type = 10) puis la moyenne entre les différents scores T est calculée et correspond à ce score global « cogstat ».