6.3.2 Influence linguistique

La technologie dans le domaine de la télécommunication satellitaire a atteint un niveau très élevé qui a eu un impact positif et très fort non seulement dans le monde occidental mais également dans le monde arabe. Ainsi, tous les pays du monde arabe qui ont bénéficié et utilisé les nouvelles techniques instaurées dans ce domaine se sont retrouvées indéniablement obligés d’utiliser en plus de ces techniques, des termes puisés de la source même, c'est-à-dire, de la langue de ses inventeurs et c’est donc une autre forme d’imposer sa langue en dehors de son territoire.

C’est donc une arme à double tranchant qui devrait être utilisée à bon escient et surtout éviter qu’elle se retourne contre son utilisateur.

Pour l’utilisation de la langue arabe, il semblerait selon des statistiques établies en 2000150, que sur 500 chaînes arabes existantes, très peu se servent de la langue arabe comme support et si c’est le cas, ils le font de mauvaise manière.

Les différentes émissions qu’elles soient, culturelles, littéraires, de distraction ou autres, utilisent surtout les dialectes régionaux et les parlers courants selon le pays de diffusion (dialecte syrien, algérien, égyptien, tunisien ou autres). L’arabe littéraire est tout de même utilisé dans les feuilletons historiques, les journaux télévisés et quelques émissions particulières qui traitent de l’économie ou de la politique.

Une étude151 sur les émissions radiophoniques et télévisuelles destinées aux enfants a montré que la langue utilisée était l’arabe dialectal et non l’arabe classique et parfois une langue autre, située entre les deux, ce qui ne rend pas service à la langue qui se retrouve déformée, ni à l’enfant qui se voit induit en erreur quant à la réalité de l’arabe classique. On pourrait citer comme exemples des chaînes comme LBC, Syria Tv, El Moustakbel...etc.

Le problème est d’autant plus grave lorsque l’on sait que la télévision est la seule source d’information, d’enseignement et d’apprentissage pour beaucoup de téléspectateurs arabes, qui, analphabètes pour certains, ne lisent pas de livres mais se contentent de regarder ou d’écouter les émissions télévisées ou radiophoniques. Cependant, des efforts sont parfois consentis par certains détenteurs de chaînes qui contribuent par leurs émissions à faire connaître la langue arabe, sa grammaire et tout ce qui se rapporte à sa littérature, comme ce fut le cas pour des émissions telles que : « Iftah ya simsim » (simsim ouvre toi), « madinet el kawaid » (la cité de la grammaire), « loughatouna el djamila » (notre belle langue)152. Ces émissions restent cependant insuffisantes et pire, ne durent pas très longtemps.

Le problème de l’utilisation de la langue arabe dans les émissions diffusées par les chaînes satellitaires se résume en trois points153 :

Les différentes chaînes satellitaires arabes, à travers les présentateurs de leurs émissions, ont longuement contribué à la propagation des dialectes régionaux au détriment de la langue arabe classique, qui, au contraire s’est vue beaucoup régresser.

L’utilisation de ces dialectes était dictée soit par la volonté de simplifier ou vulgariser la matière, soit de se rapprocher d’avantage du téléspectateur, et donc de rentrer plus facilement chez lui, ou encore parce qu’il existait peu de matière en langue arabe, susceptible d’être présentée.

Il semble évident que même s’il est important de maintenir en vie les dialectes régionaux, il est cependant capital que les pays arabes utilisent une seule langue, unique et commune qui serait comprise par tous. Il aurait fallu donc rapprocher les dialectes de l’arabe classique et non faire l’inverse comme ce fut le cas hélas, dans pratiquement toutes les stations de diffusion arabes154.

Pour remédier à cette situation et permettre à la langue arabe de servir le téléspectateur arabe tout en se servant de la technologie de « l’autre », c'est-à-dire, celle qui vient de l’occident, de s’épanouir et d’être au même niveau que toute autre langue, il  serait judicieux de penser à développer son vocabulaire, à enrichir son répertoire en inventant puis en propageant à grande échelle de nouveaux termes techniques, qui seraient en mesure de pallier au manque dans ce domaine et surtout d éviter d’utiliser des vocables « empruntés ».

Créer des centres d’arabisation, dispenser une bonne formation en arabe littéraire aux divers présentateurs de télévision, suivre, corriger et améliorer la rédaction des textes de présentation, tels pourraient être les premiers pas vers une meilleure utilisation de la langue arabe dans la télédiffusion par satellite155.

Notes
150.

MERMIER Franck,  Mondialisation et nouveaux médias dans l'espace arabe , Co-édition Maison neuve et Larousse /Publications de la Maison de l'Orient, Lyon, France, 2003, p16.

151.

BELGHIT Soltane, Les moyens d’information et la langue arabe,28/06/2006. http://www.diwanalarab.com/spip.php?page=imprimersans&id_article=4568

152.

IKLINI Susanne et ABD EL ADHIM Azza, Les modèles culturels, éducatifs et comportementaux, revue des radios arabes, N° 1, Union des radios arabes, Tunis, 2002, p 111.

153.

HOUAIDI Fahmi, Situation de la langue arabe dans les moyens d’information, http://www.isesco.org.ma/pub/arabic/Langue_arabe/p7.htm

154.

Lo.cit.

155.

Lo.cit.