1.2 La nosographie de l’autisme

1.2.1 L’autisme au niveau comportemental

1.2.1.1 Le spectre autistique

Définir les caractéristiques d’un désordre c’est pouvoir définir les symptômes nécessaires et suffisants pour établir le diagnostic de ce désordre. Chaque désordre a un noyau de caractéristique qu’une personne doit présenter pour recevoir le diagnostic. Mais il y a aussi des symptômes associés qu’un patient peut montrer sans qu’ils soient nécessaires au diagnostic. Seuls les symptômes noyaux distinguent un désordre d’un autre. Du fait que Kanner ne disposait que de peu de cas, il a inclus dans son diagnostic des caractéristiques qui ne sont ni essentielles ni spécifiques à l’autisme. Beaucoup d’études se sont proposées depuis, de « nettoyer » la description de Kanner. Par le passé, plusieurs études se sont attelées à prouver que certaines caractéristiques qui se sont révélées par la suite non universelle, étaient en cause dans l’autisme. Par exemple, l’hypothèse de sur-sélectivité du stimulus17 de Lovaas et al. (1971) suggère que les handicaps dans l’autisme étaient causés par une sur attention18. Cette théorie prometteuse a eu quelques difficultés lorsque des études ont montré que le manque d’attention à certains aspects de l’environnement était associé aux difficultés d’apprentissage (handicap mental) en général et qu’il n’était pas spécifique à l’autisme. De même, des études épidémiologiques ont mis en évidences que certains symptômes fréquents que montrent certaines personnes autistes ne sont pas spécifiques à l’autisme. Par exemple, Wing & Wing (1971) avaient trouvé que plus de 80% des enfants autistes avaient une préférence pour les sens primaires (odorat, goût, toucher) mais cette préférence à été retrouvées à 87% chez les enfants sourds ou malvoyants, à 47% chez les enfants atteints du syndrome de Down et à 28% chez les enfants à développement typique. C’est notamment pour cette raison qu’il est important de comparer les patients souffrant d’autisme avec des groupes contrôles, appariés en âge, au niveau du QI ou du développement mental selon les études afin de ne pas inclure des symptômes que l’on pourrait retrouver dans d’autres populations pathologiques. Qui plus est, d’autres facteurs comme les stéréotypies ou le retard mental peuvent être mis en évidence dans d’autres pathologies que l’autisme. Ils ne peuvent donc être considérés comme des causes primaires et suffisantes des problèmes des enfants autistes. Comme on le voit à travers ces exemples, il n’a pas été aisé d’établir des symptômes précis de l’autisme, même si la triade autistique est aujourd’hui bien établie.

Étant donné que les handicaps des personnes souffrant d’autisme varient énormément entre les individus (et peuvent même se manifester de différentes manières), selon leur âge et/ou leurs capacités intellectuelles, le portrait clinique de l’autisme a évolué depuis la description qu’en a proposée Kanner. Cet aspect de l’autisme a amené Wing (1988) à introduire le concept de spectre autistique afin de donner une base à l’idée d’un faisceau de manifestations d’un même handicap.

Notes
17.

« stimulus overselectivity hypothesis ».

18.

« over-focused attention ».