1.2.1.4 Les indicateurs précoces de l’autisme

À partir de quel âge peut-on diagnostiquer un autisme ? Aujourd’hui, on arrive à établir un diagnostic entre l’âge de 18 mois et de 3 ans. Depuis quelques années, on cherche à identifier des indicateurs précoces de l’autisme.

Plusieurs études, y compris celles de Kanner et d’Asperger, considèrent que l’autisme est présent dès la naissance. Cependant, cela ne signifie pas que l’on puisse nécessairement détecter des signes d’autisme dès la naissance. Certains facteurs innés ont besoin de temps pour se développer et arriver à maturité – e.g. la théorie de l’esprit (il s’agit de la capacité à attribuer des états mentaux à soi-même et à autrui afin d’interpréter leurs comportements en termes d’états mentaux, voir 1.3.1).

Détecter un indicateur précoce de l’autisme serait utile seulement s’il est universel et spécifique. Si l’on choisit d’observer un facteur qui se retrouve dans un autre type de population – par exemple, la préférence pour la routine – on s’expose à de fausses alarmes, à diagnostiquer un enfant à développement typique en tant qu’autiste. De même, si l’on choisit un facteur que seul les enfants autistes montrent – l’aversion à être touché – cela risque d’amener à des omissions, et l’autisme n’est pas détecté. On ne peut pas non plus s’appuyer sur les dires des parents : ce qu’ils suspectent comme anormal n’est peut-être pas dû à l’autisme mais à des difficultés d’apprentissage. Ainsi la recherche d’un indicateur précoce de l’autisme doit comparer le développement précoce d’enfants autistes, d’enfants à développement typique et d’enfants présentant des sévères difficultés d’apprentissage.

À présent, plusieurs études se sont intéressées aux indicateurs précoces de l’autisme. Elles suggèrent toutes que ce n’est pas avant le milieu de la deuxième année que les signes de l’autisme apparaissent. À l’âge de 12 mois, un enfant qui sera plus tard diagnostiqué autiste ne présente pas de déficit social (basé sur le sourire et la réceptivité à autrui) et est jugé normal. Le déficit est détecté seulement autour de l’âge de 18 mois (Lister, 1992 ; Johnson et al., 1992). L’étude la plus ambitieuse qui a essayé de détecter les indicateurs les plus précoces de l’autisme est une recherche prospective de Baron-Cohen (1992) réalisée en Grande-Bretagne et en Suède. Étant donné que l’autisme a une base génétique, cette étude s’est intéressée aux frères et soeurs d’enfants autistes. Quarante et un enfants de 18 mois ayant un grand frère ou une grande sœur autiste ont passé des tests s’intéressant aux jeux de faire semblant, à l’attention conjointe et au pointage, à l’intérêt social et aux jeux sociaux. Ces enfants ont été comparés à un groupe contrôle d’enfants d’âge équivalent. Plus de 80% des enfants de ce groupe contrôle ont réussi tous les items de l’étude, montrant un développement normal de l’imagination et des capacités sociales à l’âge de 18 mois. En revanche, 4 des 41 enfant à haut risques d’autisme ont échoué sur deux items ou plus. Or lors du suivi de l’étude, à 30 mois, les quatre enfants et seulement ces quatre enfants qui avaient échoué à plusieurs items ont été diagnostiqués autiste. Cette étude suggère que l’on peut détecter l’autisme autour de l’âge de 18 mois en se basant sur des déficits dans des domaines spécifiques des compétences sociales, communicatives et imaginatives. Des études plus récentes se penchent sur l’importance d’un diagnostique précoce (Moore & Goodson, 2003 ; Magerotte & Rogé, 2004 ) pour la prise en charge des enfants autistes. Plusieurs études récentes( Baron-Cohen et al., 2000 ; Baird et al., 2000) développent notamment des questionnaires afin de diagnostiquer l’autisme le plus tôt possible.