4.6. Détection des indices d’attention conjointe et partagée

Nous avions envisagé, dès le début de notre travail, de proposer des techniques d’évaluation des méthodes de prise en charge des enfants autistes, principalement au niveau orthophonique. Suite à plusieurs discussions avec des orthophonistes qui traitent ce type de population, il s’est avéré que la diversité des techniques employées n’est pas très étendue (ce qui s’explique par le faible niveau linguistique de la plupart des patients autistes, au moins dans l’enfance). Ainsi l’évaluation de ces techniques ne présente pas de grand intérêt.

Néanmoins, nous ne voulions pas abandonner ce projet pour pouvoir proposer des pistes pour la priser en charge (cette partie de l’étude a été réalisée en collaboration avec l’école d’orthophonie de Lyon). Nous avons décidé de mettre à profit les résultats de la précédente expérience sur l’attention conjointe (voir 6.5) à cause de l’impact de l’attention conjointe sur l’acquisition du langage. Nous avons donc intégré à notre étude deux étudiantes en dernière année de l’école d’Orthophonie de Lyon afin d’étudier la possibilité (ou l’impossibilité) de rééduquer les capacités d’attention conjointe des enfants autistes.

Afin d’établir le protocole de leur expérimentation, les deux étudiantes Sophie Brunel et Marion Leicher (2008) se sont inspirées des travaux de Corkum et Moore (1995) sur le développement de l’attention conjointe. Dans leur article, Corkum et Moore postulent un âge plus précoce (autour de 6 mois) de l’acquisition des capacités d’attention conjointe que le reste de la littérature (voir 3.3). Pour ces auteurs, l’âge d’apparition de cette capacité se situerait autour de l’âge de 6 mois. Ils insistent aussi sur le fait que pour développer les capacités d’attention conjointe, c’est-à-dire du suivi du regard, chez le jeune enfant, la présence d’une cible est nécessaire. En effet, si un bébé apprend à suivre la direction de la tête ou des yeux d’un adulte, et qu’il n’y a rien de saillant ou d’intéressant à voir pour lui, il ne persévérera pas dans le développement de ce comportement. Ce constat leur permet d’expliquer pourquoi Scaife et Bruner (1975) ont trouvé un âge d’acquisition de l’attention conjointe beaucoup plus tardif. Corkum et Moore insistent sur la nécessité de l’acquisition de l’attention conjointe du fait de son importance dans le développement de la compréhension sociale et dans l’acquisition du langage.