1.1. Le cadre théorique de l’ergonomie cognitive

1.1.1. Contexte historique

L’homme a probablement toujours porté une réflexion sur son activité pour tenter de l'optimiser. On en retrouve des traces qui remontent à la Grèce antique : Xénophon, général et philosophe athénien (vers 427 - 355 avant J-C.) préconisait de diviser le travail de fabrication des chaussures de l'armée de façon à ce que chaque ouvrier n'effectue qu'une seule opération.

Cette réflexion sur l’activité dans le but de l'optimiser s’est constituée comme science en 1949 avec la création de la société anglaise d'ergonomie. Cette nouvelle science a depuis lors posé les bases de son objet, mis au point le cadre de ses pratiques, et défini ses notions fondatrices. C’est dans ce cadre de recherche que nous positionnons notre travail. Ces dernières décennies, la mécanisation, l'automatisation et l'informatisation ont entraîné une profonde transformation des activités humaines, entrainant parallèlement une évolution de l'ergonomie. Les activités physiques, impliquant une mise en œuvre d’énergie importante, ont massivement laissé la place à des activités mentales qui se traduisent par des actions à vocation informationnelle, telles qu’appuyer sur une pédale ou taper un texte sur un clavier.

Dans ce contexte, les performances des opérateurs ne s’expriment plus en termes physiques, telles que la qualité du geste ou la rapidité d’exécution, mais en termes mentaux, tels que le bien-fondé d’un choix ou la qualité d’un texte. Du point de vue de la subjectivité de l'opérateur, les contraintes ne s’expriment plus en termes de fatigue musculaire mais en termes de fatigue mentale, de charge mentale, de difficulté de compréhension, de difficulté à prendre en compte tous les éléments d’une situation ou d’un problème. L’activité elle-même ne s’exprime plus en termes de gestes physiques mais en termes mentaux tels que raisonnement, évaluation, anticipation. Cette évolution du travail a donné naissance à l'ergonomie cognitive, que nous présentons dans ce chapitre.