1.2.1.1. Quel statut épistémologique de l’activité en sciences humaines ?

Au paragraphe précédent nous nous sommes demandé comment l'ergonome pouvait déterminer ce qui est pertinent pour l'opérateur, avant même d'avoir analysé l'activité. Il y a là un problème de circularité de la connaissance : pour connaître, il faut observer, mais pour observer il faut connaître. On peut se référer à Popper pour une discussion largement reconnue de cette difficulté, qui l'a conduit, dans cet ouvrage, à interroger la notion de réalité objective.

Ce problème, que toute observation contient en son sein une dose de théorie, est commun à toute science expérimentale, mais il prend toute son importance en sciences humaines. Dans ce cas, l’objet même de la science n’est pas posé comme un objet préexistantindépendamment de la communauté scientifique qui l’étudie. La définition de l’activité dans le cadre des sciences humaines que nous avons adopté au paragraphe 1.1.5 : « un flux temporel des aspects pertinents pour un sujet, de son comportement et de l’évolution de son environnement», pose le problème de définir a priori ce qui est pertinent pour le sujet. En d’autres termes, il faut déjà avoir une certaine compréhension de l’activité qu’on étudie pour pouvoir l’observer, et apprendre ainsi de nouvelles choses. Mais comment cette circularité peut-elle mener à un accroissement de la connaissance ?