1.2.4.3. Les épistémologies constructivistes : la connaissance comme produit d’une activité cognitive

Le Moigne fonde les épistémologies constructivistes sur deux hypothèses :

a) L'hypothèse phénoménologique. Cette hypothèse accorde le primat absolu au "sujet connaissant" capable d'attacher quelque valeur à la connaissance qu'il constitue. La connaissance implique un "sujet connaissant" et n'a pas de sens ou de valeurs en dehors de lui. Il s'en suit qu'il est impossible de séparer la connaissance du processus qui la produit.

b) L'hypothèse téléologique. Cette hypothèse consiste reconnaître l'intentionnalité ou la finalité de ce sujet connaissant, comme moteur du processus de construction de connaissance. La connaissance devient alors le produit d'un processus actif, dirigé par le "sujet connaissant" en fonction de ses intentions et orienté vers ses propres finalités.

Le Moigne justifie ces hypothèses par opposition aux épistémologies positivistes. Selon lui, ces dernières reposent sur deux autres hypothèses principales : l'hypothèse ontologique et l'hypothèse déterministe. L’hypothèse ontologique postule que la connaissance que constitue la science est la connaissance de la réalité, une réalité elle-même postulée indépendante des observateurs qui la décrivent. L’hypothèse déterministe postule une détermination interne propre à la réalité connaissable. Dans cette hypothèse la réalité contient des lois de causalité.

Le Moigne souligne que si les épistémologies positivistes fonctionnaient dans le cadre de sciences telles que la physique classique, elles commencent à être remises en cause avec l’apparition de la physique quantique, où il est impossible d’observer une réalité sans la modifier. énonce leurs limites dans le cadre de ce qu'il définit comme des sciences de l’artificiel, telles que les sciences de l’ingénieurou les sciences de la cognition. Pour ces sciences, l’objet même de la connaissance est clairement posé comme n’étant plus une réalité naturelle indépendante des scientifiques, mais au contraire comme étant une réalité construite par une communauté dont les scientifiques constituent un sous-ensemble.

Ainsi, les épistémologies constructivistes visent à sortir de cette circularité, dans laquelle l’objet même de la connaissance est constitué, au moins en partie, par le sujet connaissant. En cela, elles recouvrent les principes évolutionnistes et pragmatiques, en leur ajoutant un troisième principe : le principe téléologique.