3.5. Conclusion : problématique méthodologique

Au chapitre 2, nous avons posé notre problématique en ergonomie cognitive comme étant de découvrir des schémas tactiques de conduite, en soulignant que ces schémas s'inscrivaient dans un projet de modélisation cognitive du conducteur. Ils doivent être basés sur des éléments de l'activité qui ont une valeur signifiante pour ce conducteur. La découverte de ces schémas soulève des questions épistémologiques que nous avons discutées au chapitre 1. Il s'agit de savoir comment un ergonome peut construire une connaissance à propos de la connaissance contextualisée qu'un opérateur construit au fil de son activité. Les réponses épistémologiques que nous avons apportées sont basées sur les épistémologies constructivistes. Elles proposent une démarche itérative, pragmatique et dirigée par l'ergonome. Pour répondre à cet objectif nous venons de présenter au chapitre 3 les méthodologies classiques en ergonomie : méthodologie d'observation de l'activité, méthodologie de recueil de données subjectives et méthodologie d'analyse des données séquentielles. Or, à notre connaissance, il n'est actuellement pas établi comment l'application de ces méthodologies peut répondre à notre démarche épistémologique. Notre problématique méthodologique est donc de mettre en œuvre cette démarche. Elle peut s'exprimer ainsi :

Permettre à un ergonome de construire des modèles cognitifs de l'opérateur
en analysant des traces d'activité

Cette méthodologie doit donner les moyens à l'ergonome de construire des explications à propos des différents niveaux de contrôle de l'activité par l'opérateur, qu'ils soient automatiques ou volontaires. Elle doit permettre d'argumenter ce processus de construction. Elle doit permettre de manipuler les grandes quantités de données collectées. Pour cela elle doit s'appuyer sur des outils informatiques dont on peut spécifier les objectifs généraux :

Ils devront permettre de gérer la complexité des traces d'activité, c'est-à-dire pouvoir les restituer sous une forme synthétique et intelligible.

Ils devront permettre de gérer différents angles d'analyse. En effet la synthétisation nécessite de faire des choix entre les données utiles et les données inutiles pour une question de recherche particulière. Le système doit donc permettre à l'ergonome d'indiquer quelles sont les données significatives pour lui en fonction de ses différentes questions de recherche.

Ils devront permettre de capitaliser l’expertise d'analyse. Pour cela ils devront permettre de formaliser cette expertise. Ils devront donc offrir des outils de modélisation de la connaissance de l’ergonome.

Ils devront offrir de bonnes qualités d'interactivité. La construction de connaissance est dirigée par l'ergonome et résulte de son utilisation de l'outil informatique. L'interactivité conditionne donc directement les résultats obtenus. Cette interactivité signifie la possibilité pour l'ergonome de modifier facilement le mode de visualisation des traces ainsi que de tester différentes formes de transformation.