B. Caractéristiques de l’offre et aléa moral

La probabilité qu’un prêt soit remboursé dépend de la qualité du projet mais également du comportement de l’emprunteur. Ce comportement est influencé par les caractéristiques de l’offre : plus le taux d’intérêt est élevé, plus l’emprunteur sera incité à prendre des risques pour maximiser le rendement de l’investissement, réduisant d’autant l’espérance de profit du prêteur. Il y a risque d’aléa moral.

Il convient donc de s’interroger sur les caractéristiques de l’offre qui favorisent chez l’emprunteur l’adoption d’un comportement allant dans le sens des intérêts du prêteur. Cette question sera considérablement approfondie par les auteurs qui suivront Stiglitz et Weiss bien que contrainte par les hypothèses comportementales retenues (notamment en postulant des relations de causalité « mécaniques » entre caractéristiques de l’offre et comportement de l’emprunteur). Mais ce qui nous intéresse véritablement ici, c’est la mise en évidence de la modification du niveau de risque du prêt par les caractéristiques de l’offre.

Au travers de la sélection adverse, il apparaît que les caractéristiques de l’offre jouent un rôle sur les profils d’emprunteurs qui restent sur le marché. Autrement dit, ce n’est pas le niveau de risque de chaque projet qui est affecté par une hausse du taux d’intérêt mais le niveau de risque moyen auquel s’expose le prêteur en raison du départ des emprunteurs ayant un projet faiblement risqué. L’étude de l’aléa moral met en évidence un mécanisme fondamentalement différent. En effet, c’est à présent le niveau de risque de chaque projet qui est affecté. La cause en est l’influence des caractéristiques de l’offre sur le comportement de l’emprunteur. Il en découle, et ceci est essentiel, qu’il n’est pas possible de considérer le niveau de risque d’un projet isolément des caractéristiques de l’offre. Il est en partie conditionné par ces caractéristiques.

Dès lors, à condition de ne pas considérer le comportement de l’emprunteur comme mécaniquement déterminé par les caractéristiques de l’offre, à l’instar des modèles de l’économie bancaire, l’opération de crédit apparaît comme nécessitant la collaboration du prêteur et de l’emprunteur, dont les modalités sont à préciser, dans le but de définir un intérêt commun.