A. Une coopération réductrice d’incertitude quant à la qualité du résultat

« Les relations de service , envisagées sous un angle instrumental qui n’en épuise pas le contenu, sont ainsi des modes d’ajustement réciproque rendus nécessaires par le caractère idiosyncrasique des demandes, par la diversité des problèmes et de leur expression, et par le mode procédural de leur résolution, […]. Elles sont réductrices de complexité et d’incertitude pour le "praticien" comme pour l’utilisateur » (Gadrey, 1996, p. 285)217.

Les relations de service permettent ainsi en principe :

  • d’adapter en continu la prestation aux besoins du client et de lui expliquer les modalités d’utilisation des quasi-produits.

Les interactions répétées permettent le transfert d’informations entre les parties et ainsi l’ajustement en continu des quasi-produits mis à disposition par la banque. C’est la prise en compte de la parole du client par le banquier qui est ici soulignée. Mais elles limitent également la possibilité que le client utilise ces quasi-produits à mauvais escient par manque de connaissances. Les conseils du banquier jouent ici un rôle déterminant sur le comportement du client. Cette coopération continue est censée éviter également les désaccords au moment de l’évaluation du résultat dans la mesure où les deux parties ont été impliquées tout au long du processus.

  • à chacune des parties d’évaluer la qualité de l’autre.

Au travers des entretiens répétés que les banquiers ont avec leurs clients, ils obtiennent non seulement des informations sur des aspects financiers ou professionnels (évolutions possibles, aspirations, etc.) mais également sur un large ensemble d’éléments sociaux et culturels tacites favorisant leur évaluation fine de la qualité du client, autrement dit de son niveau de risque (Courpasson, 1995, Leyshon & Thrift, 1999). De leur côté, les clients obtiennent également des informations sur leur banquier afin d’en évaluer la qualité, bien que cette évaluation soit parfois délicate, notamment pour ceux ayant peu de compétences bancaires. Toutefois, en dépit de cette hétérogénéité, nos enquêtes ont montré que l’évaluation des clients porte principalement sur deux éléments : la compétence de leur interlocuteur et ses aptitudes relationnelles (le fait qu’il soit sympathique, poli, intéressé… ou au moins qu’il en donne l’impression).

Les interactions composant les relations de service permettent donc potentiellement une meilleure interconnaissance et ainsi une plus grande efficacité de la prestation. Elles le font de deux manières. Elles favorisent l’évaluation afin de prendre une décision quant à la réalisation ou non de la prestation. Cette qualité pour réduire l’incertitude est commune au jugement et à la consolidation. Mais ces interactions accroissent de plus la qualité de la prestation. Contrairement à la consolidation, qui ne peut qu’évaluer ex ante la probabilité que cette qualité soit mauvaise, ces interactions et la mise en œuvre du jugement qu’elles autorisent, diminuent la potentialité qu’une telle situation se réalise. Cependant, ces effets sont en grande partie dépendants d’un ingrédient indispensable à leur qualité : la confiance.

Notes
217.

L’utilisation du pluriel pour les relations de service a deux justifications. D’une part, ces relations sont d’une grande diversité selon les secteurs d’activité et le type d’organisation de la prestation. D’autre part, la nature de la relation varie fortement en raison de l’hétérogénéité sociale du public.