A. Une exposition au risque non maîtrisée

La première difficulté concerne l’exposition au risque des banques. Alors que les « Trente Glorieuses » avaient été marquées par une croissance économique forte et stable favorable à l’activité bancaire, la crise de 1974 remet profondément en cause les performances de l’économie française. Les banques qui financent par le crédit les investissements des entreprises, se trouvent confrontées à la montée des risques industriels dès le début des années 1980 (Grafmeyer, 1992). Elles doivent non seulement faire face aux pertes constatées (les prêts qui ne seront pas honorés par des entreprises mises en faillite), mais également aux « créances douteuses » (les prêts dont le niveau de risque élevé suppose des provisions importantes d’avoirs bancaires en prévision d’une défaillance des emprunteurs ce qui grève les résultats des banques). Ces difficultés qui affectent principalement les banques commerciales240, se poursuivront jusqu’au milieu des années 1990 en raison des crédits accordés aux PME et de la faible croissance économique dans son ensemble.

À ces difficultés du secteur productif, il faut ajouter celles issues de l’éclatement de la bulle spéculative immobilière au début des années 1990. De 1991 à 1995, le prix moyen du mètre carré à Paris passe ainsi de 22 000 à 17 294 francs et les transactions à Paris et dans la petite couronne chutent de 19 % (Dressen & Roux-Rossi, 1996). Ce sont cette fois les banques publiques et semi-publiques qui sont le plus exposées241.

La maîtrise des risques de la part des banques est donc fortement prise en défaut ce qui affecte évidemment très durement leurs résultats. De 1992 à 1995, les banques françaises ont provisionné 120 milliards de francs au titre de l’immobilier et le double au titre des crédits aux PME (Dressen & Roux-Rossi, 1996).

Notes
240.

 « En 1992, les profits ont chuté de 60 % par rapport à l’année précédente (1,5 milliard de pertes dans les banques AFB). Pour la première fois depuis la Libération, cette année-là, les banques françaises ont perdu de l’argent. En 1993, les pertes se sont élevées à 10,1 milliards de francs. En 1994, le PNB des banques AFB a diminué de 5,4 %, et, encore de 10 % en 1995 (néanmoins leurs comptes se sont redressés cette année-là, on ne l’a appris qu’en 1996) » (Dressen & Roux-Rossi, 1996, p. 16).

241.

 « Les encours de crédits aux professionnels de l’immobilier à fin 1992 atteignaient au total 371 % des fonds propres au Comptoir des entrepreneurs, 574 % à l’UIC et 89 % au Crédit foncier de France. Quant à leur fraction douteuse non provisionnée, elle représentait 21 % des fonds propres au Crédit lyonnais , 119 % au Comptoir des entrepreneurs, 73 % à l’UIC, alors que le même ratio était inférieur à 10 % pour la BNP , la Société Générale , le Crédit agricole, Paribas et n’était que de 13 % pour Suez » (Haut Conseil du secteur financier public et semi-public, 2001, p. 26).