A. Diversité des rationalisations

Gadrey (1996) distingue deux types de rationalisation : la rationalisation industrielle et la rationalisation professionnelle. La seconde concerne les activités qualifiées de services professionnels qui ne peuvent être standardisées. Elle se développe à un double niveau. À un niveau cognitif, elle correspond à une « typification des cas, une formalisation relative des procédés […] de résolution de problèmes, et le recours à un répertoire de routines que les individus peuvent avoir acquises à titre personnel mais qui existent souvent en tant que compétences collectivement diffusées dans et par l’organisation […] » et, à un niveau institutionnel, à un « processus d’édiction de règles [(qui s’appuie sur la rationalisation au niveau cognitif)] auxquelles l’ensemble d’une profession est soumis » (Gadrey, 1996, p. 315).

L’ensemble des activités de service est soumis à ce type de rationalisation. C’est ce qui permet de les rendre performantes et d’en assurer la viabilité économique. La rationalisation professionnelle correspond par exemple à une amélioration du jugement du banquier grâce à l’expérience acquise et à la prise en compte de cette amélioration par la banque qui l’intègre dans ces règles. Ici, typification ne signifie pas standardisation. Elle permet d’améliorer l’efficacité de l’action du banquier mais n’empêche pas la prise en compte de la singularité de la situation et ne préjuge pas de la réponse qui sera apportée. Dans le cas de la rationalisation industrielle, les choses sont très différentes.

Comme énoncé en introduction de ce chapitre, Gadrey (1996) définit l’industrialisation comme un processus au cours duquel une organisation qui n’appartient pas au monde industriel s’en rapproche sur au moins trois plans : la production de biens tangibles²⁶⁶, un modèle d’organisation productive mécaniste qu’il qualifie d’« Aoki-Mintzberg », et qui correspond à l’usage de machines ou d’équipements techniques, et l’évaluation basée sur la productivité et la quantification. C’est à partir de ces éléments que nous allons pouvoir analyser la rationalisation à l’œuvre au sein de la banque de détail.